Chapitre 29 - Toge, épitoge et serment // 3

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Alors que je prononce ces derniers mots, l'amphithéâtre explose en applaudissements. Je jette un regard à mon jury, à Lucie, ma directrice de thèse, qui m'adresse un sourire franc et sincère. Dans les gradins, je rencontre le regard d'Eric, brillant d'émotion, qui se lève déjà pour venir vers moi. Encore sur un nuage, je le laisse m'embrasser et m'accompagner dans la salle adjacente où est organisé le buffet. Pendant qu'il part me chercher un verre d'eau, ma mère est la première à accourir vers moi.

— Ma chérie, c'était magnifique ! s'exclame-t-elle. Regarde, j'ai pris plein de photos !

Elle me montre son téléphone avec entrain. Claire Delmas est une jolie brune, aux cheveux bouclés et aux grands yeux marron. Elle est plus petite que moi, mais il est facile de deviner notre lien de parenté. Pour l'occasion, elle porte un élégant tailleur noir qui lui donne un air très sérieux.

— Oui, c'était magnifique ma puce, renchérit mon père en nous rejoignant. Bon, je dois avouer que je n'ai pas tout compris à ce charabia médical...

J'adresse un sourire indulgent à mon père. Grand et élancé, les cheveux poivre et sel, c'est de lui que je tiens mes yeux verts. Pour l'occasion, il a mis une chemise, ce qui est déjà beaucoup.

— Sophia !

J'entends la voix de ma cheffe dans mon dos qui nous rejoint.

— C'était super, vraiment. Et quel plaisir de travailler avec toi sur ce projet...

Je lui réponds de mon plus beau sourire. Je commence à peine à réaliser que je suis diplômée.

— Merci à toi, Lucie. Je ne pouvais pas rêver meilleure directrice de thèse !

Elle m'enlace et je sens à nouveau l'émotion me gagner. Je balaye quelques larmes en papillonnant des cils. Mes parents ne disent rien mais je sens qu'ils sont très fiers. Ma cheffe s'éloigne un instant pour discuter avec le Pr Delaunay tandis qu'Eric arrive à notre hauteur.

— Félicitations, chérie.

Il pose sa main au creux de mon dos et je sens le reste de tension de la journée se dissiper enfin.

— Vous devez être Eric, s'exclame mon père. Enfin, je vous rencontre !

— Enchanté, Monsieur Duval.

— Appelez-moi Jean-Pierre.

Les deux hommes se serrent la main. Ma mère ne rate pas une miette du spectacle. Elle regarde Eric avec des yeux ronds et a du mal à dissimuler son excitation.

— Et moi, vous pouvez m'appeler Claire, s'empresse-t-elle d'ajouter en lui serrant également la main.

— C'est un plaisir, Claire.

— Plaisir partagé.

Ma mère lève un sourcil dans ma direction et je comprends qu'elle est très favorablement impressionnée. Il faut dire que mon fiancé fait vraiment figure de genre idéal, avec sa prestance naturelle, sa chemise blanche immaculée et ses manières de gentleman. Je ne doutais pas qu'il plairait tout de suite à mes parents.

— Je comprends mieux pourquoi ma fille avait tellement hâte de se marier avec vous ! déclare ma mère.

Je serre les dents et lui donne un coup de coude. Elle lève les yeux au ciel en riant. En réalité, elle est bien loin de se douter du tournant inattendu qu'a pris ma vie. Entre cette grossesse surprise et ces histoires de malédiction, cette frénésie de mariage est loin du cliché romantique qu'elle imagine.

— Je dois vous dire, Eric, que cet empressement à vous marier nous a beaucoup étonnés. Tiens mon poussin.

Mon père me tend une coupe de champagne que je prends, sachant pertinemment que je ne peux pas la boire.

À toi, corps et âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant