chapitre un

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Pink Matter - Frank Ocean

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Pink Matter - Frank Ocean

Il était vingt heures. Le soleil avait arrêté de pointer son nez , le froid prenait place et devenait un habitant comme les autres dans les rues de Paris. D'un pas tremblotant et hésitant , je poussais la poignée de la porte d'entrée. A mon arrivée , mes yeux se sont rivés sur les écritures au plafond : c'était du latin , du moins je pense. Après avoir admiré les charactères gravés sur le plafond , je me dirigeais vers la réceptionniste.

Elle était habillée de vert , avec un petit foulard qu'elle avait attaché au cou pour lui donner un air sérieux. Ses cheveux étaient plaqués et avec un sourire elle me lançait un « bonjour » , très enjouée.

- Je peux vous aider ?

Je retirais l'un de mes écouteurs de mes oreilles , et tout en ayant les yeux pris dans le bazar mondain qu'était mon sac. « Je voudrais une chambre pour ce soir , s'il vous plaît. » dis-je rapidement en recherchant la boite rouge de mes écouteurs sans fils.

- Pour deux ?

- Non , seule. rétorquai-je avec un sourire aux lèvres.

Son sourire disparaissait et je me montrais confuse. Est-ce aussi choquant de se procurer une chambre , en tant que femme tout seule , à la tombée de la nuit ? Je me rendais compte du malaise que je venais de créer , je décidais de rire furtivement afin faire tomber le blanc de notre conversation. En vain , elle ne me rendit qu'un très faible sourire de gêne.

Sans plus attendre et ce tout en se raclant la gorge, elle me tendit une sorte de carte avec un numéro dessus , des brochures ainsi qu'une petite pancarte avec l'écrit « Ne pas déranger » dans toutes les langues dont le russe et l'espagnol.

- C'est la chambre 311 , tout au fond du couloir du 2e étage. Vous pourriez ouvrir la porte grâce à la carte que je vous ai donné et si jamais vous ne voulez pas qu'on vous dérange dans vos activités nocturnes , vous pouvez mettre la pancarte « Ne pas déranger » sur votre poignée.

Mes yeux s'écarquillèrent. « Ah mais non , non je... » bégayai-je. Elle me fit un clin d'œil , c'est à ce moment là que je me rendis compte que j'avais malheureusement merdé. Je partais sans rien lui dire et me dirigeais alors vers l'ascenseur. J'étais bien assez gênée comme ça. Le couloir était assez sombre , sauf pour quelques lumières accrochées qui nous éclairaient. Ces lumières étaient jaunâtres et illuminaient mon teint ébène , c'était un petit détail qui me faisait sourire.

Tenant ma valise , j'entrais dans l'ascenseur à présent devant moi. « Activités nocturnes à ce que je vois ? » , une voix résonnait dans l'ascenseur. Nous étions à présent , deux et je ne l'avais même pas remarqué.

- Et vous êtes ? répondais je , toujours les yeux rivés sur l'ascenseur.

C'était une voix masculine , peu grave mais aussi très peu aigue , le parfait milieu et je la reconnaissais et il le savait.
























- Et toi ? Tu veux faire quoi plus tard ?

Nous étions sur un banc. J'étais assise sur la banquette , encore légèrement humide à cause de la pluie de la veille. Il était debout , en face de moi avec les bras croisés. Le soleil avait déjà décidé de s'échapper pour laisser place à la nuit qui envahissait notre environnement. La température était bonne , il ne faisait pas froid , il ne faisait pas chaud non plus , le temps parfait  pour une conversation nocturne dans un parc , l'une de nos nombreuses habitudes.

« A vrai dire , je ne sais pas. » dit-il , il continuait à lancer son pied sur le morceau d'une une canette de Sprite , ce qui produisait un bruit métallique très désagréable et agaçant.

- Arrêtes , Eden , tu vas détruire tes chaussures avec ça.

Il se mit à sourire.

- C'est drôle , tu m'appelles jamais par mon prénom.

Nos regards se croisent , je baisse la tête mais il continuait à me regarder. L'atmosphère commençait à devenir pesante entre nous, il avait conscience de l'influence qu'il avait sur moi. Je regardais devant moi , les voitures continuaient à passer , les oiseaux continuaient de voler et le monde continuait de tourner.

C'était plutôt drôle , je ne pensais pas être capable de m'attacher autant à un humain , qu'un humain me fasse désirer le futur de ce bas monde : mais encore moins à Eden.

Eden Martinez , un prénom venu du jardin des permissibles et interdits et un nom de famille rappelant le périple d'une vie. Ce prénom venant tout droit de la genèse de cette terre , de ces humains , de ces animaux et de tout être vivant. Son accent pouvait vous faire rêver , le souvenir d'une rencontre entre deux personnes : sa mère tout droit venu de l'Italie et de son père , autrefois vivant , venant du Mexique.

Eden avait déménagé en France , à l'âge de douze ans. Son papa était venu pour le « taff » , me disait-il souvent , mais d'après lui c'est parce que ces conquêtes étaient plus accessibles d'ici. Sa maman est une infirmière , à présent à la retraite malgré les droits qu'ils lui ont été retirés par les gouvernements. Dulce , douce comme son prénom était la muse de son fils , de par sa persévérance et sa ténacité.

Avec elle , il a un lien que personne encore n'avait réussi à séparer. Malgré les querelles (qu'ils avaient très souvent) , ils étaient conscients du rôle conducteur que chacun avait dans la vie de l'autre.

- Tu ne me réponds pas ? reprenait-il.

A vrai dire , je n'écoutais pas ses mots. J'étais beaucoup trop concentrée sur son personnage. Je savais d'où il venait mais je ne connaissais pas son histoire. Il refusait de se livrer et ce malgré notre proximité grandissante de jours en jours. Il connaissait tout de moi : de mon livre préféré à mes traumatismes les plus enfouis.

- Je me rends compte que je ne te connais pas tant que ça , Eden.

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