Annabeth Chase x Lecteur (Reader) - Le héros perdu - Livre 6

La mère de tous les sales types

Y/N rêva qu'il était sur le toit du monde.

En fait, il se tenait au sommet d'une falaise de glace – ce qui était presque la même chose. Il était venu de nombreuses fois ici, en songe. Ce rêve était si routinier qu'il ne se rendait plus toujours compte qu'il le faisait. Cette fois-ci, pourtant, il s'en rendit compte.

Une centaine de mètres en contrebas, la mer s'étendait jusqu'à l'horizon, parcourue çà et là de morceau de glace flottant à la surface. Au bord de son champ de vision, Y/N pouvait voir les ruines d'un village. On aurait pu croire que les maisons dataient de plusieurs siècles. C'était peut-être le cas. Tout était calme, mais du calme qui précède la tempête.

L'instant qui suivit parut durer bien plus longtemps qu'un simple instant. Derrière lui, Y/N entendit la neige crisser sous le poids d'une lourde charge. Ses sens s'étendirent ; ce fut comme si le vent devenait une extension de ses membres. Deux autres choses le prévinrent du danger : la formation de son épée dans la paume de sa main et le son du sifflement d'un serpent. Il fit volte-face, et se retrouva nez à nez avec un monstre : l'Amphisbène.

Petit rappel mythologique : l'Amphisbène est un très grand à deux têtes, chacune à une des deux extrémités de son corps. Ses écailles sont vertes, ses bouches gigantesques, et ses crocs produisent une poison corrosif si puissant qu'Y/N en avait toujours la marque sur les mains suite à sa précédente rencontre avec la bête, plus de trois ans auparavant.

En ce moment, le gigantesque serpent acculait Y/N en faisant une forme de U avec son corps, ses deux têtes l'empêchant de fuir d'un côté comme de l'autre sous peine de se faire gober un bras ou une jambe.

Puisqu'il ne pouvait aller ni tout droit, ni à gauche, ni à droite, Y/N recula. Mais derrière lui l'attendait une chute de cent mètres. Il perdit l'équilibre. L'Amphisbène bondit dans sa direction. Ensemble, ils dégringolèrent droit vers la surface givrée de l'océan, qui ne manquerait pas d'être aussi dure que du béton à l'impact.

Mais l'impact n'arriva jamais. Maintenant, Y/N était de nouveau sur ses pieds. Mauvaise nouvelle : tout autour de lui, le sol s'effondrait. Il se mit à courir, ou du moins tenta-t-il de courir. D-s le premier pas, sans qu'il ne sache pourquoi, il comprit que la marche était le mieux qu'il pût faire. Il essaya d'accélérer, en vain. Quelque chose le retenait, comme s'il était très affaibli. Pendant ce temps, le monde s'écroulait. 

Il ne voulait pas tomber. Il ne pouvait pas se le permettre. Il avait l'intuition que s'il tombait dans la fosse dans son dos, il n'en sortirait jamais. Vaguement, il sentait à quel point la peur le prenait à la gorge, à quel point il était terrifié. Faire bouger ses jambes était une bataille de chaque instant. Mais il devait atteindre la terre ferme, où qu'elle soit.

Seulement, ce rêve avait un scénario tout fait, duquel on ne pouvait s'échapper. La partie du sol sur laquelle se tenait Y/N se décrocha. Puisant dans ses dernières réserves d'énergie – pourquoi était-il si épuisé ? – il sauta en avant. L'espace d'un instant, suspendu en l'air, les bras et les jambes s'agitant en quête d'une prise, il crut échapper à son destin. Raté. Il chuta, et sa chute ne connut pas de fin.

Alors, son rêve changea une fois de plus. Cette fois-ci, il fit face à Ethan. Ce fut bref. Il ne reconnut rien, la scène était plongée dans la brume. Mais Ethan tenait sa lance près de lui, comme s'il s'apprêtait à se battre. Il regardait tout autour, comme si le danger pouvait venir de n'importe où. Puis il s'enfonça dans la brume et disparut.

Le rêve passa à sa dernière partie. La plus terrifiante.

Plongé dans les ténèbres, il ne parvenait même pas à voir le bout de son nez. L'intégralité de ses muscles le faisait souffrir, coincé comme il était, la tête entre les genoux. Il ne pouvait pas bouger d'un centimètre, même le bout de son doigt, et il n'aurait pas pu respirer s'il n'y avait pas eu un tout petit espace entre sa poitrine et ses jambes.