𝖢𝗁𝖺𝗉𝗂𝗍𝗋𝖾 𝗍𝗋𝖾𝗇𝗍𝖾-𝗌𝖾𝗉𝗍 : 𝖭𝖾 𝗆'𝗈𝗎𝖻𝗅𝗂𝖾 𝗉𝖺𝗌.

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Le vent soufflait doucement, faisant danser les feuilles des arbres et emportant avec lui les derniers vestiges de la nuit. Je regardais par la fenêtre, la fraîcheur me caressait le visage et je repensais à ce moment mémorable avec Kenan.

Je me blottissais contre lui, la tête posée sur sa poitrine, écoutant son cœur battre régulièrement. Nous regardâmes ensemble les étoiles scintiller dans le ciel nocturne, et j'ai su que je ne voulais jamais partir de cet endroit. A ses côtés, c'était meilleur, c'était frais, c'était là gaité.
Nous avons parlé pendant des heures, partageant nos rêves, nos aspirations et nos peurs les plus profondes. Nous avons ri, nous avons pleuré, et nous avons échangé des regards passionnés qui ont duré une éternité. C'était une nuit de juillet que je n'oublierai jamais.

Retour à la réalité.

Je voudrais revenir en arrière, à l'époque où je pensais être sienne à jamais. Demain, je repars à Paris, et j'ai l'impression de ne pas être assez bien pour lui. J'ai essayé de tout faire pour qu'il se souvienne de notre passé commun, mais il ne faisait aucun effort. Il ne voulait pas changer, et je me suis rendue compte que l'humain est égoïste. J'ai l'impression d'avoir tout donné, mais cela n'a pas été suffisant. Je me sens triste et seule, sachant que notre amour est destiné à être un souvenir lointain.

Je me suis laissé partir mais sache que si je l'ai abandonné ce n'est pas parce que je ne l'aime plus mais tout simplement parce qu'il m'a fait comprendre que ça ne servait à rien de croire que tout redeviendrait comme avant un jour. Il avait refait sa vie depuis deux ans déjà et c'était une mauvaise idée de venir le voir et espérer retracer notre histoire. J'avais promis de ne jamais abandonner mon amour pour lui et de garder ce livre, mais ce jour-là, j'ai dû le fermer avec le cœur lourd.

Le vent soufflait doucement, séchant mes larmes qui coulaient sans fin. Lorsque je me suis retourné, il se tenait devant moi. Son visage était sans expression, sans amour. Il m'a tendu une assiette qu'il avait préparée avec soin.

- Prends ça avant que ça ne refroidisse. Ne t'inquiète pas, il n'y a pas de viande.

Alors que je prenais l'assiette, j'ai vu la détresse dans ses yeux.
Il se servit une grande portion et commença à engloutir son repas, concentré dans son assiette. Je le regardais, mais je savais que je ne pouvais plus garder le silence plus longtemps.

- Kenan, il faut qu'on parle...

- Quoi, tu n'aimes pas ?

- Non, ce n'est pas ça... Écoute, tu as été si gentil avec moi pendant ces quelques jours. Je t'en suis entièrement reconnaissante pour cet accueil chaleureux. Mais je ne crois pas que ça puisse remarcher entre nous. Tu n'es plus le même, et je ne me sens pas aussi à l'aise avec toi qu'avant. C'est différent maintenant.

Je ne pouvais pas retenir mes larmes. Quand j'ai prononcé ces mots, ma voix tremblait et je ne pouvais m'empêcher de pleurer. Autrefois je ne prenais que des décisions avec mon cœur parce que j'étais dans l'optique que ce dernier prenait toujours les meilleures décisions mais je ne savais pas que je risquais mon âme pour ça, je risquais ma paix. Ce jour là, me tenant devant Kenan je lui avouait ce que je n'aurai jamais pensé confesser, je parlais à conscience ouverte et c'est alors que je me rendais compte que mon cœur saignait et que mes larmes montraient cette douleur extérieurement.

Je suis toujours amoureuse de mon mari, mais pas de l'homme qui se tenait devant moi. J'aimais sa spontanéité dans les petites choses de la vie, sa gentillesse envers les autres, la lueur brillante dans ses yeux, ses « ma dulcinée », son estime de soi immense qui était souvent tournée en dérision depuis que nous nous étions rencontrés. Mais j'aimais ça, j'aimais notre humour décalé. C'était notre jardin secret, notre façon de nous connecter.
Aujourd'hui, tout est poussière... mais j'avais gardé espoir en nous. Pourquoi ? Est ce que l'espoir conduit véritablement au rêve ? On ne cesse jamais de rêver, ni d'aimer, ni d'espérer.
Si j'écoute mon coeur, mon âme en souffre.
Si j'écoute ma conscience, mon âme en souffre.
Non, on ne cesse jamais de souffrir parce qu'on refuse d'arrêter de rêver, d'aimer et d'espérer.
C'est une roue qui ne s'arrête pas.
C'est la roue de ma vie.
Peut être, dirais-je, infinie.

Il y avait un silence pesant entre nous. Je fixais le sol, essayant d'éviter son regard, mais je pouvais sentir ses yeux sur moi, ce qui me mettait mal à l'aise. Soudain, sans prévenir, il m'a pris dans ses bras. Je me suis dit qu'il pouvait peut-être ressentir ma douleur, pour une fois, depuis mon arrivée. Il n'était pas indifférent, pas comme un cœur de pierre. Il tolérait mon amour.

Je me suis effondré en sanglots dans ses bras après ce geste, tout comme la fois où il m'avait dit temporairement au revoir à tout ce que nous avions vécu. Mais cette fois, c'était un vrai adieu, comme on l'entend. Adieu à l'amour, adieu à Kenan. Tout ce qu'il restera sera nos souvenirs dans ma conscience et nos écrits.

- Mais est-ce que c'est la meilleure chose à faire? murmura-t-il.

- Je suis sûre que oui, rétorquai-je.

Il acquiesça en hochant sa tête. Et c'est ainsi que je me suis volontairement retirée de sa vie, de son histoire à jamais. Mes yeux se remplissent de manière incontrôlable de larmes alors que je prononçais ces mots : - Juste une dernière chose, ne m'oublie jamais, car je ne pourrai jamais t'oublier. Si tu ne le fais pas pour moi, fais-le au moins pour ton fils. Si tu ne le fais pas pour lui, alors ne le fait pas. Mais sache que je t'ai aimé, inlassablement. Je te le dis même si ça n'a plus d'importance mais je te le dis tant que c'est encore possible. On sait jamais si une voiture te renverse, si tu décide de tout quitter... On sait jamais si tu décides de te foutre en l'air. Tu sais la vie est remplie d'imprévus. D'ailleurs c'est ce qui me fait flipper...Les imprévus... bref, je te le dis maintenant et peu importe ta réponse. Je t'ai aimé et je crois que je ne te le dirais jamais assez.

Quelques heures plus tard...
Je tenais la main de mon fils et ma valise, prête à franchir cette porte, celle du désespoir et de l'amour perdu. Je ne me suis pas retourné comme je l'avais toujours fait dans ma vie. Quoi qu'il en soit c'était Kenan, toujours lui. Je ne voulais plus me retourné, en tout cas pas vers lui, pas vers la source de mes malheurs comme le disait Zakarya. Cette fois, j'étais déterminée à avancer et à faire les meilleurs choix. Avec le coeur et la conscience.
Nous, les amoureux, sommes prêts à tout par amour. Je suis soulagée d'avoir fait ce voyage et d'avoir enfin découvert la vérité. Dans le taxi, j'observais le paysage, je pensais, je méditais. Il y a des amours qui résistent même aux tempêtes, mais le fait qu'il ne soit plus le même était un ouragan. J'aimais l'ancien Kenan, celui qui ressentait ma joie et qui me faisait encore plus sourire. Celui qui sentait mes ondes de tristesse et qui savait trouver les mots justes pour me rassurer. Celui que j'ai détesté pour finalement l'aimer, celui pour qui j'aurais pu mourir pour son malheur et vivre pour son bonheur. Celui, que j'ai aimé inconditionnellement n'était plus là, il était bel et bien mort.

Perdu à jamais.

Al Djihad Of LayalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant