Chapitre 31 - Décisions

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Le cœur de Carmina battait vite et fort. Trop fort. Les images retransmises à la télévision ressemblait à un de ses nombreux cauchemars de ces dernières semaines. Ses oreilles bourdonnaient comme si elle avait pu entendre l'explosion du bateau et sa vue brûlait comme si elle regardait les flammes de trop près. Une seule phrase s'échappait en boucle de son esprit : "faites que Nevada ne soit pas là-dedans !"

La main sur son bras gauche la tira de ses pensées. Louthiern la poussa à s'assoir sur un des fauteuils du salon. Laritza occupait le second, le visage pâle et les yeux écarquillés. Elle venait de perdre sa sœur cadette, elle devait mourir d'angoisse à l'idée de perdre son frère le même jour. Elle saisit l'une de ses mains et la pressa.

Toutes deux reportèrent leur attention sur la télévision. La caméra passait d'un corps à l'autre, heureusement tous recouverts de draps ou de couvertures de survie.

Son esprit se déchirait en deux. Une part d'elle se demandait s'il ne valait pas mieux qu'ils trouvent le petit corps de sa fille pour qu'ils fassent leur deuil au lieu de tourner en ronds à la chercher et mettre des vies en danger.

Elle se haït de penser de cette façon, de baisser les bras. L'angoisse grappilla du terrain sur sa raison.

La mère dévorée par l'inquiétude se tourna vers Ivan qui passa un bras autour de ses épaules.

- On va la retrouver !

Carmina voulait le croire. Elle s'accrocha à son regard plein d'assurances et tenta de s'y noyer.

Elle regarda autour d'elle pour voir tant de mines dures.

Le souvenir de son départ de Calabre remonta dans sa mémoire. Cette nuit-là, tandis que les Fabro dormaient à point fermé, si peu soucieux de leur sécurité, elle aurait dû se glisser dans leurs chambres et tous les abattre. Elle y avait songé très sérieusement. Sa foutue conscience l'empêcha de mener son idée à bien.

Il fallait que sa princesse soit en danger de mort pour qu'elle dépasse cette croyance stupide du Paradis et de l'Enfer. Plus rien n'avait d'importance à part la retrouver et la ramener en sécurité. Son âme pouvait brûler pour l'éternité, elle s'en fichait.

J'aurais dû les tuer !

Ses yeux tombèrent sur le visage noirci et fatigué d'Eduardo. Elle sauta de son siège pour aller à sa rencontre. Nevada le talonnait, la fureur flamboyait dans ses yeux.

L'Angelito se posta devant elle. Son visage habituellement avenant était dur.

- Niñita n'était pas là mais on a Reinier.

Le soulagement fut double : sa fille ne brûlait pas dans un bateau et Reinier était entre leurs mains. Il devait savoir où se trouvait Pietro Fabro et avec lui, sa petite. Ils se rapprochaient.

- Va te soigner avant que je t'achève à coups de pieds !

Nevada donna une claque à l'arrière de la tête de son Angelito. Celui-ci baissa la tête, contrit. Un hoquet d'horreur lui échappa en voyant son dos brûlé. La chemise pendait par endroits et à d'autres, elle semblait cousue à même la chair à vif.

- Ed...

- C'est plus mauvais que ça en a l'air, se défendit-il.

Carmina secoua la tête tout en le suivant vers le bureau. Elle saisit la trousse de secours dans la salle de douche attenante pour la déposer sur le bureau.

Avec des gestes mesurés, elle aida Eduardo à enlever sa chemise sans trop ouvrir les blessures fraiches. La pince à épiler lui servit à ôter quelques morceaux fondus dans la chair ou intégrés à une plaie. Le sang et des morceaux sombres recouvrirent les draps que Kenrick avait placés sous son ami. Eduardo bougea à peine pendant qu'elle le soignait. Elle n'y était pas obligée, le médecin la guidait à quelques centimètres, mais elle le devait.

El Cuco - Série FaidaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant