1 : L'espoir en un futur meilleur

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Yatu – Washington, la deuxième face de la grande ville de Yatu, semblait calme mais ne l'était pas. Les couleurs ténébreuses de la nuit s'étaient répandues sur le secteur, et le vent dans les arbres chantonnait une sinistre symphonie. Dans les ruelles souvent mal éclairées, de jeunes délinquants agressaient un pauvre homme ayant eu le malheur de rentrer trop tardivement. L'un d'entre ces jeunes, un enfant d'à peine treize ans, jura dans un argot incompréhensible par l'homme et fit pénétrer la larme de son arme blanche dans sa cuisse. Un autre, qui semblait être le meneur du groupe, les incita à s'éloigner de l'homme. Ils se rabattirent tous de l'autre côté de la voie, tandis que la victime se dépêchait tant bien que mal de fuir. D'un autre côté du secteur, un groupe de jeunes ramassaient tout ce qu'ils pouvaient trouver dans une boutique qu'ils venaient de vandaliser. Dans un autre endroit, précisément un fumoir, des hommes fumaient et s'injectaient quelques doses de drogue, tous types confondus, et au bout de cette partie de la ville, près d'un grand lac qui était presque devenu un dépotoir, dormaient des enfants de la rue. Mais de l'autre côté, à Yatu – Golden (qui se composait du quartier résidentiel Cadria et des zones administrative et industrielle), l'on pouvait aussi apercevoir des ressortissants du premier secteur. Des filles arrêtées sur le trottoir à des employés surexploités rentrant chez eux, en passant par la même veine d'enfants criminels. Cependant, la richesse des populations avait plus d'intensité. L'on y contemplait de grosses bagnoles, des duplex, des infrastructures encore sur pied et surtout des voiries praticables, une salubrité palpable. Tout le contraire du Washington, dénommé ainsi par forte ironie, où l'on ne voyait que des brouettes, des pousse-pousse, un gigantesque bidonville, des chemins de terre et des dépotoirs d'ordure.

Enedia vivait à la deuxième zone depuis sa naissance. Elle n'avait jamais rien connu d'autre et rêvait d'une meilleure situation. Grâce à son activité de commerçante ambulante, elle se promenait dans les rues de Cadria pour vendre son beurre de karité ou ses fruits de saison. Voir ces riches rire et se sentir bien lui refilaient une certaine douleur au cœur. Elle avait souvent du mal à se l'avouer, mais elle n'aimait pas les gens aisés. Ils semblaient profiter d'une vie à laquelle elle ne pouvait pas encore prétendre, sans même penser à ce qu'elle vivait, elle, dans son bidonville natal.

Néanmoins, ce n'était pas une situation qui devait durer. Il était hors de question qu'elle fonde elle aussi sa famille dans un environnement pareil, qu'elle fasse le même boulot peu rémunérateur de ses parents et qu'elle ne puisse pas satisfaire ses besoins. Enedia voyait très grand et avait tout un sac d'ambition derrière elle.

Cette nuit du dix août, elle eut du mal à se rendormir lorsqu'elle surprit la discussion de ses parents, assis à l'extérieur de leur bicoque familiale. Enedia savait depuis longtemps que son père avait accumulé plusieurs dettes pour subvenir aux besoins de leur famille. Cependant, la voix avec laquelle son père remettait cette histoire sur le tapis lui filait des frissons. L'échéance de remboursement était presque arrivée et il n'avait pas les moyens de rembourser. En plus, c'était à un margouillat que son père devait, ces gens qui prêtent à des taux d'intérêt faramineux, de près de deux cents pour cent en deux mois.

Enedia en avait assez de ces histoires. Pourtant, contrairement à beaucoup de jeunes dans sa situation, elle ne comptait pas recourir à des moyens frauduleux.

Ceux qui font plus de bruits que les vaguesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant