CHAPITRE 2

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C'est le tonnerre qui réveilla Eva ce matin. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il pleuve autant cette nuit. Elle n'appréciait pas vraiment ce genre de temps. Cela lui rappelait de mauvais souvenir de son enfance. Elle avait passé beaucoup de temps seule étant donné que ses parents ne pensaient qu'au travail. Elle regrettait parfois d'avoir quitté le domicile familiale mais quand des nuits de tonnerre comme celle-ci avaient lieu elle se rappelait que c'était la meilleure solution qu'elle aurait pu prendre dans sa vie. Aujourd'hui elle était heureusement, seule oui, mais épanouie. 

 Elle décida alors qu'il était temps de quitter son lit et fit quelques étirements histoire de ne pas se plaindre toute la journée. Elle avait beau être réservée, personne ne pouvait l'empêcher de se plaindre quand elle le souhaitait. Elle quitta sa chambre, se rendit dans la cuisine et se prépara un chocolat viennois pour bien débuter sa journée. Elle travaillait dans un café pour payer ses études et elle utilisait ses acquis pour se faire également plaisir. Autant manier l'utile à l'agréable. 

Une fois sa boisson prête, elle se dirigea vers le salon en faisant attention à ne rien renverser. Elle était assez méticuleuse dans tous ce qu'elle entreprenait. Et ça allait jusqu'à ne pas faire tomber son chocolat sous peine de devoir faire toute une gymnastique inutile qui pourrait nuire à son emploi du temps parfaitement structuré.

Mais elle ralentit soudainement alertée par un petit papier qui avait visiblement été glissée sous la porte d'entrée. Elle ne recevait presque jamais de lettre si ce n'était les factures et elle les avait déjà payé ce mois-ci. Son cœur commença à battre la chamade en priant pour que ce ne soit pas un avis d'expulsion. Elle savait qu'elle payait bien comme il le fallait mais ça l'intriguait. 

Elle posa sa tasse sur le rebord de la table et se dirigea vers la porte d'entrée. Elle ramassa la carte et fut surprise par la qualité du papier, et l' encre noire élégante et soignée qui était posée sous forme de mot. En tant qu'étudiante en art elle savait que la personne qui était à l'origine de cette lettre n'avait pas choisit n'importe quel type de papier. Et d'après l'écriture, c'était quelqu'un qui maitrisait la calligraphie. Dès la première lettre, Eva fut captivée par la beauté des mots et par l'émotion qui s'en dégageait.

Comme une toile de maître, tu m'ensorcelles, 
Chaque trait, chaque couleur, une histoire nouvelle. 
Et dans ce tableau mouvant, je me perds avec délice, 
Enchanté par l'aura magnétique qui émane de toi, délice.
Que ce poème égrène les notes de mon cœur, 
Où chaque vers est une promesse, une douce ardeur. 

Eva, toi l'énigme, toi la beauté, 
Je te choisirai, pour l'éternité.

L'écriture était fluide et élégante mais la lettre restait tout de même des plus déconcertante. Eva regarda encore l'écriture, certainement réalisé à la plume et replia la lettre qu'elle posa sur son meuble d'entrée. C'était bien la première fois qu'elle recevait une lettre de déclaration. A vrai dire c'était la première fois qu'elle recevait une lettre autre que celle des impôts.

Elle ne voulait pas se mettre de faux espoirs en tête. Et de toutes les manières, quel espoir devrait-elle placer dans une stupide lettre? Elle ne cherchait pas de relation alors cette lettre pouvait bien dire ce qu'elle voulait elle n'allait pas se laisser déstabiliser par un petit bout de papier.

Elle retourna à son chocolat viennois et resta un instant à le souffler pour qu'il puisse refroidir. Elle aimait être seule, quoique parfois elle adorait la présence de Julia à ses côtés. Mais la rousse avait une vie, un mari et même une petite fille dont elle devait s'occuper après les cours alors elle ne pouvait pas la déranger plus que nécessaire. Elle savait que, au moindre problème, Julia accourrait pour la serrer dans ses bras mais elle n'allait tout de même pas la déranger parce qu'une stupide lettre de déclaration était arrivée chez elle. 

Ce qui l'embêtait vraiment dans cette histoire, c'est qu'elle aurait pu nier le fait que la lettre soit pour elle. Cependant, son prénom y était marqué. Elle se rappela alors de cet homme qu'elle avait rencontré la veille. Il semblait un tantinet barjot sur les bords posant des questions plutôt farfelu. Mais selon ce que Julia lui avait fait comprendre il s'agissait d'un mécène. Il aurait été difficile que quelqu'un d'aussi haut placé se livre à ce genre d'activité plus que puérile.

Elle finit par souffler et se diriger de nouveau vers l'entrée. Là, elle récupéra la lettre et se dirigea vers la cuisine où elle prit un briquet et commença à brûler le morceau de papier. Elle n'avait pas de temps à perdre avec ces futilités. Ça, elle l'avait déjà dit. 

Une fois que tous le papier fut brulé, elle lâcha les restes dans l'évier en un soupir. Elle aimait se débarrasser de ses inquiétudes. C'était libérateur. Enfin c'est ce qu'elle se disait pour se sentir déchargée de toutes sortes de poids. Et ça fonctionnait, vraiment bien en plus. Ça elle l'avait bien comprit depuis la tendre enfance. Vivre sans problème était la meilleure solution pour se sentir apaiser. 


L'après-midi s'annonçait un peu plus ensoleillé. Et Eva avait prévu de sortir se dégourdir un peu les jambes. Elle avait enfilé sa tenue de sport et venait de récupérer ses basket dans le meuble d'entrée. Elle les enfila, attacha ses cheveux en queue de cheval et prit une veste légère pour se protéger de l'humidité. Une fois dehors, elle sentit l'air frais caresser son visage, apportant une agréable sensation de liberté. Elle démarra sa course à un rythme modéré, laissant ses jambes la guider à travers les allées tranquilles du parc.

Au fur et à mesure qu'elle courait, ses pensées se clarifiaient. Elle se laissa emporter par la beauté de la nature qui s'éveillait autour d'elle. Le calme du parc lui permettait de se vider la tête, de mettre de côté les doutes et les interrogations qui l'avaient tourmentée depuis l'arrivée de la lettre. 

Elle accéléra le rythme, laissant l'adrénaline envahir son corps. Ses pas résonnaient sur le sol, donnant l'impression qu'elle volait à travers le parc parfois entrecoupés par le son que produisaient ses chaussures quand elle marchait dans une flaque d'eau. Elle se sentait libre, libre de tout souci, de toute attente. Le sentiment de liberté qui l'envahissait était libérateur, comme si elle pouvait tout laisser derrière elle.

Eva n'avait pas de destination précise en tête. Elle se laissait guider par l'instinct, par l'envie de courir plus loin, plus vite. Ses poumons se remplissaient d'air frais, et elle ressentait chaque battement de son cœur comme une symphonie palpitante.

Au détour d'un chemin, elle croisa un petit étang, reflétant les couleurs du ciel qui commençait à se teinter de rose. Elle s'arrêta un instant pour contempler le paysage, se laissant envahir par la quiétude du lieu. Les canards glissaient sur l'eau calme, et le silence de l'après pluie apportait une sérénité bienvenue.

Après quelques instants de pause, Eva reprit sa course, mais cette fois-ci à un rythme plus lent, presque méditatif. Elle prenait le temps de savourer chaque instant, de sentir le sol sous ses pieds, de respirer l'air pur.

Elle finit sa course au pied de son immeuble où elle finit par quelques étirements pour soulager ses muscles de la courses folle qu'elle venait d'entreprendre. La voisine du dessus se pencha à son balcon et lui sourit. 

"Toujours aussi sportive à ce que je vois. 

— On essaye de maintenir la forme. souria-t-elle."

Eva se sentait revigorée. Le footing solitaire avait été une véritable thérapie pour son esprit tourmenté. Elle se sentait plus confiante, plus ancrée dans le moment présent. Du moins jusqu'à ce que son voisin de palier lui annonce dans le hall, qu'il venait tout juste de déposer un colis qu'un jeune homme habillé étrangement venait de livrer. 

Forbidden obsessionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant