« Tu vas trouver ça très étrange mais honnêtement t'es beau...
— ... Quoi ?
— Je veux dire, objectivement tu... tu es beau. Mais sans arrières pensées hein ! »
Ses joues prennent peu à peu une teinte écarlate. J'ai du mal à trouver mes mots. A-t-on le droit de dire cela entre garçons ? Après tout, c'est un compliment comme un autre.
L'atmosphère est pesante et je regrette d'avoir prononcé ces mots. Tout sera perturbé à cause de moi. Je tente alors de rétablir la vérité.
« Ecoute, je ne voulais pas regarder et je ne sais pas comment c'est arrivé mais je t'assure que je ne l'ai pas fait exprès.
— Non c'est pas ça qui me dérange. C'est juste que tu l'as remarqué seulement maintenant.
— Pardon ?
— Ma beauté légendaire. »
Il est fier de lui. Je lui lance un regard désabusé. Au moins il a réussi à sauver la situation.
Cette scène se joue dans ma tête depuis hier soir. Sur le chemin du retour nous avons fait comme si de rien était. J'ai été stupide de lui dire ça. Je ne peux pas dire ce genre de chose.
On est des garçons.
J'hésite plusieurs fois à changer de chemin pour ne pas croiser Daichi ce matin. Mais il est trop tard : je le vois m'attendre, au même endroit, comme si rien ne s'était passé. On se salue. On parle. Puis :
« Au fait, pour hier... »
Un rictus inquiet apparait sur mon visage. Je me suis préparé à toute éventualité.
« Ce que tu m'as dit, ça m'a vraiment fait plaisir... »
Ses joues se colorent. C'était la situation la moins probable. A tel point que je l'avais écartée de tous les scénarios possibles. Les mots se bousculent dans ma bouche.
« O-oh... je pensais que trouvais ça bizarre.
— Non, pas du tout !
— Très bien alors. »
Tout est rentré dans l'ordre on dirait. A moins qu'il dise cela pour ne pas que je me sente mal à l'aise, ce serait bien son style. Notre discussion est alors écourtée par l'arrivée d'Asahi.
A partir de là, les jours se sont écoulés lentement, se ressemblant les uns les autres. La scène du vestiaire n'est restée qu'un souvenir embarrassant, le genre qui rejoue dans votre tête avant de dormir. Les entrainements étaient longs et notre progression, pénible. Nous faisions du sur-place, nous n'avions pas l'impression d'avancer.
Dans un grand bruit, la porte du gymnase s'ouvre. Monsieur Takeda, accroché à l'encadrement de celle-ci, secouant un papier illisible sous notre nez. Des mots incompréhensibles sortent de sa bouche tandis qu'il essaie de reprendre son souffle.
« Tokyo-... Nous allons à Tokyo... Je vous ai arrangé un camp d'entrainement avec Nekoma ! »
Pardon ? A-t-il vraiment dit ce que je pense ? Un camp d'entrainement avec Nekoma ? Le message prend du temps à être traité par toute l'équipe. C'était inespéré. Comme pour un éclair : le son arrive après la lumière et nos cris de joie ont alors retenti dans tout le gymnase. Les visages de chacun sont illuminés par de grands sourires.
Une chance s'offrait à nous. Depuis ses nombreuses défaites, Karasuno s'était isolée des autres écoles, nous excluant ainsi des camps d'entrainements. Nous avons donc la chance de nous mesurer à bien plus que Nekoma, d'autres écoles seront présentes.
Le visage des autres terminales rayonne de mille feux, leurs yeux pétillent. Nous avons enfin une chance d'avancer et de réaliser notre rêve. Même Shimizu affiche un sourire discret. L'équipe semble ravivée. Asahi et Daichi me sortent de mes pensées, m'ajoutant à leur accolade. Leur rire est contagieux. Leurs bras me rassurent.
Le soleil brûlant de la journée laisse place à un ciel nocturne. Dans les vestiaires nous contemplons les articles sur Oikawa et Ushijima. Les stars du tournoi inter-lycée. Il ne peut y avoir qu'un seul lycée pour représenter Miyagi. Si nous voulons aller au tournoi national, il nous faut les battre.
Nous allons devoir nous surpasser. Chacun va devoir montrer le meilleur de lui-même, notamment pour les examens qui approchent... Après cette annonce motivante, la réalité nous frappe de plein fouet. Il nous faut au moins la moyenne à chaque matière. Pour la majorité de l'équipe, cela ne sera pas un problème. Seulement, ce n'est pas le cas de tous...
En tant que capitaine, Daichi se sent obligé de motiver les quatre cancres de l'équipe – j'ai nommé Hinata, Kageyama, Tanaka et Nishinoya. Cependant, au vu de leur visage, l'échec est total. D'une voix tremblante, Hinata demande :
« J'ai jamais eu au dessus de 9 à un contrôle, tu crois que je peux y arriver ? »
Je prends une grande inspiration, plante mon regard dans le sien. Et comme pour annoncer un décès :
« Non. Non Hinata, pas sans travailler. »
Une larme perle sur sa joue. Un son aigu s'échappe de sa bouche. On se croirait dans un film.
Nos quatre individus vont devoir s'organiser et trouver de l'aide pour leurs révisions. Je serai déjà trop occupé avec les miennes pour prendre ce rôle.
A travers tout ce chaos, Daichi me prend à part. Il a le regard fuyant et ses doigts se livrent encore à une guerre sans merci. Il se tourne vers moi.
« Je sais que tu préfères réviser seul mais il y a une partie en maths où j'ai du mal. Ça te dit qu'on travaille ensemble un jour ?
— Même le capitaine a ses faiblesses alors ? J'y croit pas, dis-je d'un air amusé.
— T'es cruel. »
Je finis par accepter. Après tout, lui expliquer me permettra de mieux comprendre. Je ne perdrai pas trop de temps sur mes révisions.

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My sweet poison
FanfictionAprès leur match contre Aobajosai, les joueurs de Karasuno sont plus déterminés que jamais. Ils doivent aller au tournoi national. Cependant, comme affecté par un poison, Sugawara découvre des sentiments complexes envers un ami proche. Qui plus est...