— Boss !
Hide ne ralentit pas le rythme. Il continuait d'étouffer mes cris avec sa paume chaude et moite.
— Plus tard ! aboya-t-il.
— C'est les « cochons », boss !
Cette fois, Hide se figea. Rien de tel que la police pour refroidir l'ardeur d'un yakuza.
— Quoi ?
— Un marubô de l'anti-gang ! Uchida ou je sais pas quoi, il dit qu'il vient présenter ses respects. On a pas pu l'empêcher d'entrer, c'est un putain de fouineur, patron !
Hide se retira avec un grognement de frustration.
— Kusô. Il ne manquait plus que lui, souffla-t-il.
Je l'entendis se rhabiller. Tandis que je reprenais mon souffle, étalée sur le bureau, il me lança une boîte de mouchoirs. J'avais l'impression qu'un train venait de me passer dessus.
— Essuie-toi, m'ordonna-t-il sans prendre de gants. T'as le maquillage qu'a coulé, aussi. Je te planquerai bien pendant la visite du dekka, mais la seule porte est là. Faudra que j'y remédie.
Je me relevai tant bien que mal. Hide m'effleura la joue gentiment, y colla un baiser. Un peu de tendresse après ce simili-viol ne faisait pas de mal... en tout cas, cela faisait partie des règles du jeu.
— Tu m'en dois une, Hide, lui rappelai-je en pointant un doigt manucuré sur lui.
— Ouais, je sais. Je te laisserai m'étrangler ce soir. Si ce flic n'a pas trouvé un prétexte pour me coller au gnouf...
— Faudra plus que ça, dis-je en croisant les bras.
J'avais terriblement mal au cul.
— On en reparle ce soir, me promit Hide en allant débloquer la serrure. Pour l'instant, assieds-toi là. Et recoiffe-toi un coup.
Il me lança son peigne en écaille de tortue. Je me le passai dans les cheveux, refis mon chignon. Au moment où je le rangeai dans mon sac, la porte s'ouvrit. Deux yeux intelligents se posèrent sur moi, puis sur Hide. Le type était grand, mince, avec de larges épaules et un costume aussi noir que celui d'un yakuza. Il avait visiblement l'âge de Hide, peut-être un peu plus. Surtout, il avait les cheveux ébouriffés, comme des pics de hérisson : une coiffure plutôt inhabituelle pour un flic, à fortiori Japonais... Derrière, Yûji levait la tête comme une tortue hors de l'eau, tentant d'attraper l'attention de son patron.
Hide, qui s'était calé contre son bureau, croisa les bras.
— Que me vaut cet honneur, inspecteur ?
L'autre le toisa, un demi-sourire aux lèvres.
— Je voulais voir comment tu étais installé.
Il avait une voix éraillée de fumeur, pas aussi grave que celle d'Hide, mais dans le même ordre d'idée. Et il s'exprimait comme un truand.
— Plutôt bien, comme vous pouvez le voir.
D'après le ton d'Hide, un mélange étrange de registre familier et très formel, les deux se connaissaient. Très bien, même.
— J'ai également appris que tu t'étais marié... fit le flic en laissant traîner son regard perçant sur moi. Et tu ne m'as même pas invité !
— Juste administrativement. J'allais justement faire partir les cartons d'invitation aujourd'hui : ils sont en bas, tout prêts. Yûji, qu'est-ce que tu fous ? Apporte à boire à l'inspecteur Uchida.
Le jeune Yûji, qui était toujours à la porte, se précipita pour déposer la limonade et le café qu'il avait ramenés. Il y avait aussi une pastèque entière.
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FEMME DE YAKUZA (sous contrat d'édition chez BLACK INK)
Romance"Elle pourrait être le plus beau joyau d'un homme, la plus prisée de ses possessions. Et une arme, également, contre ses ennemis." Je m'appelle Lola. Je vais peut-être devenir la première occidentale à épouser un parrain de la mafia japonaise... Ôka...