Chapitre 23 : Cette pitié que tu détestes

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Malgré la fraîcheur de l'extérieur, Senku est sorti de la voiture comme tous ses amis. Après avoir roulé une bonne heure à cause de tous les détours qu'ils ont fait, ils se sont arrêtés sur une aire d'autoroute pour se dégourdir les jambes. Il est sorti, s'est étiré puis s'est mis à marcher. Mais malgré lui ses yeux se posent vers le bicolore qui, après être sorti de la voiture, est parti s'asseoir plus loin. Les genoux ramenés contre lui, le regard dans le vide, il ne parle pas, ne dit rien. Il se contente de rester ainsi sans bouger, laissant ses yeux vagabonder vers le lointain. 

Jusqu'à présent Senku n'avait pas vraiment fait attention, mais Gen est très peu couvert. Habillé d'un sweat et d'un jogging, il n'a pas de manteau, pas d'écharpe, ni même de chaussures. Senku s'approche donc de la voiture, attrapant dans le coffre un plaid qui traînait là. Il sait qu'il y en a un car c'est lui qui l'a mis dans le coffre de la voiture. En partant, il avait envisagé l'éventualité d'un départ en catastrophe. Mais à cause de l'adrénaline, il n'a pas réalisé tout de suite que les vêtements de Gen étaient bien trop légers pour la saison. 

Doucement, il s'approche de Gen qui, malgré le froid dehors, ne bouge pas. Son corps ne semble même pas ressentir le froid qui, pourtant, secoue les corps de frissons désagréables. Il déplie la couverture avant de la poser doucement sur ses épaules. Ce contact fait sursauter le bicolore qui a un mouvement de recul. Mais quand il croise le regard carmin de Senku, son corps se détend aussitôt. 

— C'est moi, se contente-il d'ajouter pour calmer sa peur. 

Gen se sent idiot d'avoir réagi comme ça. Une gêne désagréable s'empare de lui, suivie d'une honte qu'il peine à dissimuler. Comme pour fuir, il enfouit son visage dans ses genoux, ne voulant pas affronter ses propres réactions. 

Il sent Senku s'asseoir juste à côté de lui. Il ne parle pas, laissant Gen s'habituer à sa présence. Avec ce qu'il vient de vivre, le brusquer serait la pire chose à faire. 

Après de longues minutes de silence, le visage de Gen sort enfin de sa cachette. Réchauffé par la couverture, il se sent mieux que tout à l'heure. Et maintenant que le plaid est sur ses épaules, il se rend compte qu'il avait atrocement froid. 

Gen a de nombreuses questions qui lui brûlent les lèvres. Il a envie de savoir certaines choses et, en même temps, les réponses à ses questions pourraient bien le briser davantage. 

— Comment...

Du coin de l'oeil il voit Senku se tourner vers lui. Gen ne le regarde pas, se contentant de fixer l'horizon face à lui. Il ne veut pas voir ce qu'il y a dans ses yeux. 

— Comment vous m'avez retrouvé ? 

Sous la couverture, sa main se met à trembler. Une part de lui a déjà la réponse à cette question. Mais une autre part de lui espère que Senku n'a pas vu ce qu'il a cherché à lui cacher depuis tout ce temps.

— J'ai...

Comment formuler sa réponse ? Quoi qu'il dise, il sait que Gen s'effondrera. Et pourtant il ne peut pas lui mentir. Il s'y refuse. 

— J'ai dû briser la règle qu'on s'était imposée, reprend-il. 

Il laisse quelques secondes s'écouler avant de reprendre. Ses yeux cherchent à capter ceux de Gen, voulant à tout prix y lire ce qui s'y passe, et aussi pour que Gen ne s'échappe pas encore une fois.

— Je suis allé chez toi une semaine après qu'on ait rompu. J'ai trouvé ton appartement ouvert et... ton téléphone sur le canapé. 

Les yeux de Gen se ferment, comme si cela allait l'aider à digérer ces informations. Il sent son cœur s'accélérer tandis que le souffle lui manque. Encore une fois, il a l'impression que son monde est en train de s'écrouler. 

Après toi... (Sengen)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant