2.2 - Le Prince

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 Je posai la bourse, n'osant pas la fouiller devant lui, et mon regard se porta sur mon camarade. Il me fixait, lui aussi, une lueur malicieuse scintillant dans ses prunelles d'or. Je n'avais jamais vu une créature ressemblant tant à un humain. C'était perturbant de comprendre que certaines pouvaient nous être si semblables.

La patronne vint vers nous, un petit calepin dans la main.

— Salut Zora ! Je ne savais pas que tu étais déjà arrivé !

— On a débarqué il y a quelques jours. Comment s'est passée la route ?

Elle haussa les épaules, semblant se moquer de sa question, et je fus ravi d'apprendre le nom du démon qui m'accompagnait par la même occasion.

— Oh, comme d'habitude ; des voleurs à combattre, la chaleur qui nous donne envie de crever, la mauvaise humeur de Vagor... Un vrai plaisir au quotidien. Et encore, on n'a pas rencontré de bestioles, ricana-t-elle. Qu'est-ce que je te sers ?

Même son rire, cristallin, était sublime.

— Donne-moi ta spécialité.

— Et ton ami ? demanda-t-elle en se tournant vers moi. Quand est-ce que tu as rejoint son clan ? Je t'ai jamais vu avant.

Je souris, embêté.

— Je suis un habitant de l'oasis. En fait, je ne le connais que depuis hier.

Elle haussa un sourcil, amusée, puis jeta un coup d'œil à Zora.

— Dans ce cas, je vais te faire découvrir quelque chose que tu n'as jamais bu. Tu es plutôt sucré ou piquant ?

— Sucré !

— D'accord, j'ai ce qu'il te faut ! Je reviens, messieurs ! En attendant, profitez d'une ambiance agréable !

Tout en parlant, elle lança une poignée d'une fine poussière pailletée qui embauma l'air d'une odeur de nectar, ronde et apaisante.

— Nélie est formidable, pas vrai ?

— Elle est magnifique, dis-je sans vraiment avoir compris sa question.

Je sentais mon esprit se tranquilliser, entrant dans un état de détente intense que je n'avais jamais connu, et mon camarade sourit d'autant plus.

— Le miel nacré possède un puissant pouvoir relaxant. On dirait que tu y es réceptif, jeune Prince.

Ce qualificatif dont il m'affublait me mettait mal à l'aise. D'un côté, j'étais flatté, mais d'un autre j'avais l'impression de faire une bêtise en le laissant me désigner de la sorte.

— Je ne suis pas un prince, j'ai un prénom.

— Tu ne me l'as pas donné, se moqua-t-il avec douceur.

— Vous ne m'avez pas donné le vôtre non plus, répliquai-je.

Nous fûmes coupés par le retour de la démone qui déposa un verre devant chacun de nous.

— Le tien est un mélange d'alcool fait à partir d'un pollen de fleur qu'on ne trouve que dans les grandes forêts de l'Est. Elle est connue pour son parfum délicat, se rapprochant de celui d'un agrume sucré, m'expliqua-t-elle. Dis-moi ce que tu en penses.

Je pris une gorgée sous son attention puis reposai le verre tandis qu'un goût acide s'installait sur ma langue. Il fut suivi d'une fragrance douceâtre, calmant la piqûre de l'acidité, qui s'y maria à merveille.

— C'est vraiment bon ! clamai-je, la bouche encore pleine des saveurs rafraîchissantes de ma goulée.

Elle rit, visiblement satisfaite.

Mirage [MxM] [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant