Le lendemain, à peine dans l'escalier qui menait au salon, je fus renvoyé au lit par mon épouse, furieuse. Deux secondes plus tôt, elle avait eu la peur de sa vie en me voyant tanguer sur les marches jusqu'à être sur le point de le dégringoler sur les fesses ou sur la tête, suivant dans quel sens je serais tombé.
Elle vint nous servir, à Shenzi et moi, le petit déjeuner au lit, puis me somma de me recoucher une fois rassasié. Elle m'avertit qu'elle préviendrait Tekka de mon absence puis elle quitta la chambre en nous souhaitant une bonne sieste.
— J'espère que tu sais qu'on a de la chance d'avoir Lya avec nous, glissai-je à Shenzi en même temps que la porte se fermait.
Elle mâchonna avec entrain, grommelant pour valider mes propos. Après avoir vidé le plateau, je me recouchai. Je dormis comme un loir, d'un sommeil profond, en à peine quelques secondes. En me réveillant, je restai étendu un long moment, prenant plaisir à écouter les bruits environnant ma maison. Je me sentais encore faible et même si je n'avais plus mal, une gêne, latente, persistait. Je ne comprenais vraiment pas que qui s'était déroulé au temple et je devais bien avouer que la perspective d'y retourner m'inquiétait un peu. Après cette réflexion, je priai Elysia de m'accorder sa clémence.
Quand je trouvai le courage de sortir du lit, le soleil descendait vers l'horizon, le teintant d'un orange flamboyant. Je filai à la douche, puis avalai un sandwich le temps que Shenzi dévore son morceau de viande. Une heure plus tard, nous étions dehors. Même si nous avions dû batailler avec Lya, nous y étions parvenus !
J'avais pris les vêtements de chez Kyro. Les tenues, dissimulées dans le sac de toile, ne pesaient presque rien, pourtant un véritable poids était palpable sur mes épaules. En chemin vers le marché, je perdis mon sourire. J'avais oublié la raison principale de cette rencontre. Mon ventre se contracta sous la peine naissante que je ressentais. J'allais le retrouver pour l'abandonner. Lui dire que tout ce que nous vivions, aussi revivifiant soit-il, devait cesser.
L'idylle que je connaissais ces dernières semaines était à peine croyable. Mais très bientôt, il s'en irait et tous mes espoirs grandissants de fuite s'écrouleraient en même temps. Je ne savais pas si j'étais en mesure de le supporter sans m'effondrer. Parce qu'après son départ, je serai seul. Seul avec ma femme, ma peine de cœur et un bébé qui débarquerait tôt ou tard. Si je ne stoppais pas maintenant, j'étais au fait qu'une destinée semblable à celle de Flicka m'attendait.
Ce qui me faisait le plus peur, c'était que je possédais déjà un plan. Il se révélait si simple, c'en était risible. Il faudrait dissimuler le tout sous un accident ; une soirée arrosée où je « boirai » trop et une chute mortelle du haut des escaliers de la tour. De cette manière, l'avenir de Lya et de l'enfant serait préservé. En tant que veuve, elle serait choyée et traitée comme une femme de haute famille. Elle pourrait aussi reprendre un mari si elle le souhaitait. C'était parfait. Pour tout le monde.
Même Shenzi y gagnerait. Elle pourrait trouver un autre partenaire. Ils pourraient alors sillonner la planète sans aucune restriction et lui donner la vie qu'elle méritait. Oui, c'était ça ; elles méritaient toutes les deux quelqu'un de mieux que moi.
Je ralentis l'allure, moins pressé à présent, et en arrivant au stand, je n'en menais pas large. Plus loin, Zora discutait avec une cliente et ce fut Vali qui me héla en premier. Je m'approchai et la saluai.
— Comment ça va ? me lança-t-elle en croquant dans une brochette de viande épicée. Ça fait un moment qu'on t'a pas vu !
Je me forçai à sourire de manière convenable.
— Désolé, j'ai été vraiment occupé ces derniers jours, je n'avais pas la force de venir.
En soi, je ne mentais pas.
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Mirage [MxM] [Terminé]
FantasiaLes humains sont en voie d'extinction. Dans le désert de Nahari, Syriel mène une vie simple, soumis aux mesures de préservation de sa race. Contraint par un mariage arrangé et la surveillance accrue pour qu'il procrée, il n'a qu'une envie : s'enfui...