Un sentiment d'abattement m'accabla dès mon éveil. Ces derniers jours se ressemblaient ; je perdais connaissance et me réveillais dans un lit. En tant que « compagnon d'un démon », je n'avais pas fière allure.
Autour de moi, tout était calme. Je ne percevais rien, pas de vie dans les pièces adjacentes, même pas la respiration de Shenzi. Pourtant, elle approcha à pas de loup. Je tendis la main en dehors du lit et elle y déposa sa truffe, me partageant la joie de me voir éveillé, teintée d'une crainte encore puissante.
— Je suis désolé, chuchotai-je.
Tandis qu'elle couinait, des bruits de pas me firent relever les yeux. Arath se tenait là, les bras croisés sur son buste. Nous nous jaugeâmes quelques instants. L'attention un peu déplacée qu'il me portait, à me fixer sans ciller, sans que j'en comprenne la raison, me dérangeait.
— Bhalzora, ton humain est réveillé, cria-t-il derrière lui.
Une seconde plus tard, il fut tiré en arrière avec tant de violence qu'il en perdit l'équilibre. Il disparut dans un fracas tonitruant en même temps que Zora entrait. Ce dernier vint jusqu'au lit dans lequel j'étais encore allongé, saisit mon visage entre ses mains et plongea ses yeux d'or dans les miens.
— Tu vas bien ?
Son inquiétude était palpable et, à vrai dire, je n'étais pas réellement capable de dire comment je me portais. Avant que je ne puisse répondre, il me relâcha et entreprit de vérifier lui-même. Il tira la couverture d'un geste ample qui me découvrit puis voulut de soulever mon haut. J'attrapai sa main afin de le stopper.
— Je... je préférerais m'en assurer moi-même, si tu n'y vois pas d'inconvénient...
Il s'écarta et s'assit au sol, déçu. Je ne savais pas pourquoi, mais je n'avais pas envie qu'il me touche. Pas maintenant, pas tout de suite.
Dire que j'avais peur serait un mensonge, pourtant, je ne me sentais pas à l'aise en sa présence. Cette chose qui était sortie de lui et qui semblait posséder sa propre conscience n'augurait rien de bon. Je n'avais jamais entendu parler d'un être qui gardait deux entités dans un seul corps.
Il demeurait le démon qui faisait battre mon cœur, mais cette autre facette m'effrayait. Je me recroquevillai sur le matelas, m'éloignant de lui par la même occasion, et il s'attrista.
— Je suis désolé que tu aies été confronté à ça..., débuta-t-il d'un ton morne. Je voulais t'expliquer, mais pas maintenant... il y a encore des d'incertitudes...
Il se montrait honnête et pourtant, je ne savais toujours pas ce que je devais penser de cette situation. Certes, Elysia nous considérait comme mariés, mais à bien y réfléchir, je ne connaissais pas Zora. J'avais appris à aimer ce qu'il m'autorisait à entrevoir, mais il omettait trop d'éléments pour que je parvienne à le cerner.
De plus, maintenant qu'ils m'avaient sorti de la réappropriation, je doutais de recouvrer mon droit de vivre à l'oasis. Mais cette solution me convenait ; si j'étais prié de partir, découvrir le monde ne me serait plus interdit.
Par contre, Siora me manquait. Jonas, intransigeant, s'était montré très clair quant à mon appartenance à cette famille. Les concernant, mes parents et lui, ça ne changeait pas grand-chose à mes habitudes ; nous n'avions jamais été proches. Mais ma petite sœur...
Mon cœur se serra. Je ne voulais pas la laisser dans cette ville qui nous traitait comme des animaux onéreux et nous réprimandait si nous n'étions pas assez rentables...
— Syriel ?
La voix de Zora me ramena dans cette réalité au ciel rougeoyant. Shenzi, calme jusque-là, grogna lorsqu'il avança la main vers moi. Il se releva, l'air soucieux puis sorti de la pièce sans que j'essaie de le retenir. La fennec s'allongea contre moi en couinant et je soupirai, perdu.
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Mirage [MxM] [Terminé]
FantasiLes humains sont en voie d'extinction. Dans le désert de Nahari, Syriel mène une vie simple, soumis aux mesures de préservation de sa race. Contraint par un mariage arrangé et la surveillance accrue pour qu'il procrée, il n'a qu'une envie : s'enfui...