29 : Regarde la dans les yeux

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Amandine est sur le point de vomir de peur et de stress. Elle se précipite dans sa penderie pour y récupérer un pull et l'enfiler aussitôt.

— Tu as une explication à me fournir avant que j'aille voir la police ? questionne Victor.

— Tu ne ferais pas ça, répond Amandine.

Victor se dirige vers la porte, mais Amandine le retient.

— Tu as lu ces pages ? demande-t-elle.

— Pas encore.

— Si tu les lis... Promets-moi de ne rien dire... S'il te plaît.

— Bordel, tu crois que je vais rester là à te couvrir alors que tu es peut-être coupable d'un meurtre ! Je te croyais plus maline que ça, Amandine !

— Victor, ça n'a rien à voir avec Billie. Je te le jure.

Victor regarde Amandine. Il pense qu'elle ment, mais plus les secondes passent, plus il doute. Qu'est-ce qu'il peut bien y avoir d'écrit sur ces pages pour qu'Amandine les vole ? Sa fameuse relation avec cet inconnu marié ? Victor prend une des feuilles, la déplie sous le regard abattu d'Amandine.

— Ne me juge pas, je t'en prie. Ne dis rien à la police, continue faiblement Amandine.

Victor lui fait signe de se taire avec agacement. Il pose ses yeux sur les premières lignes, il lit enfin ce qu'il a manqué dans sa lecture, le fameux passage, la fameuse pièce manquante du puzzle.

***

2 octobre

J'étais dans les couloirs du lycée durant la pause du midi. J'ai toqué à la porte de la salle des profs avec une assurance que j'ai trouvé fort étonnante. Une charmante prof m'a ouvert en me souriant avec une tasse de café noir dans la main.

— Bonjour... Je cherche Monsieur Morana, ai-je prononcé d'une voix tremblante.

— Il n'est pas là. Il doit être dans sa salle de classe.

J'ai remercié la prof qui a refermé aussitôt la porte, puis j'ai filé en direction de la salle de classe. Je tenais dans mes mains un début de DM, je n'étais pas sûr de ma réflexion alors je voulais l'avis du prof pour commencer à rédiger. Je suis montée au troisième étage et j'ai parcouru le couloir vide, silencieux, et plongé dans la pénombre.

Je suis arrivée devant la salle de classe, j'ai voulu toquer à la porte quand j'ai remarqué qu'elle était entrouverte. J'ai posé mon oreille contre celle-ci et j'ai entendu ce qui semblait des soupirs d'extases, je ne savais pas exactement ce que c'était. Je discernais deux voix distinctes, une voix de femme, et celle d'un homme. Monsieur Morana s'envoyait en l'air avec une autre prof, me suis-je dit.

Je m'apprêtais à repartir quand j'ai entendu la femme ou plutôt la fille parler, prononcer le prénom de Monsieur Morana, Léo, diminutif de Léonard.

Je connaissais cette voix. J'ai fermé les yeux en me disant que je l'avais imaginé, mais quand je l'ai entendu à nouveau, j'ai serré les poings, ça ne pouvait pas être elle.

J'ai voulu en avoir le cœur net, alors j'ai regardé par la petite fenêtre sur la porte. J'ai vu Monsieur Morana allonger Amandine sur son bureau et glisser une main sous sa jupe. Amandine s'est courbé, il l'a embrassée. Il a poursuivi ses baisers le long de son cou. Amandine a tourné la tête vers la porte et a croisé mon regard.

Cette pétasse m'a souri.

Monsieur Morana a défait la boucle de sa ceinture et je ne voulais pas rester voir ça. Je suis partie avant qu'ils ne passent à l'acte. J'en avais déjà assez vu. J'ai regardé mon DM en rejoignant la cage d'escalier puis je l'ai froissé entre mes mains. Je n'en croyais pas mes yeux et mes oreilles.

Voilà pourquoi Amandine a de bonnes notes en littérature alors qu'elle a le QI d'une huître.

***

Victor relève la tête, il a du mal à croire ce qu'il vient de lire. L'homme marié en question, c'est Monsieur Morana. Il a alterné son regard entre la feuille qu'il tient dans sa main tremblante et le regard désarçonné d'Amandine.

— C'est vrai ces conneries ? demande Victor.

— Oui, répond Amandine en hochant faiblement la tête.

— Bordel ! Mais c'est un prof ! Il est marié !

— Je le sais ! dit Amandine au bord des larmes.

— T'as quoi dans le crâne ? Bon sang, Amandine !

— C'est pour ça que j'ai volé ces pages... Je ne voulais pas que tu lises ça... Tu n'as plus qu'à aller voir la police et nous dénoncer... Léo va aller en prison et je serai cataloguée comme la salope de service...

— Je ne vais pas aller voir les flics. Tu m'as pris pour qui ?

— T'étais à deux doigts d'y aller tout à l'heure.

— Pour aller dénoncer un meurtre, oui ! Pas pour t'attirer des ennuis délibérément !

— Je n'ai rien à voir avec la mort de Billie... Vraiment, répond Amandine en se laissant tomber sur son lit.

Victor peine à la croire, ce qu'il tient dans ses mains l'empêche de faire confiance à Amandine. C'est une menteuse, elle a bien caché son jeu, car personne ne la soupçonnait de coucher avec Monsieur Morana.

— Je l'aime vraiment, avoue Amandine.

— C'est un homme marié, Amandine ! Bon sang, réveille-toi ! Tu t'entends parler ?

Amandine semble vexée, car elle regarde Victor d'un œil plein de rancœur. Celui-ci vient s'asseoir à côté de son amie en passant sa main sur son épaule.

— Je vais avoir des soucis, dit Amandine en mettant ses mains sur ses yeux.

— Pas si je ne dis rien, ces pages resteront entre nous, je te le promets. Mais toi, promets-moi autre chose en retour... Prends soin de toi.

— On s'est quittés, avoue Amandine. Tout s'est arrêté, j'avais trop peur que quelqu'un le devine. Billie le savait, c'était suffisant. Et Barb, elle s'en doute, c'est pour ça que j'évitais de lui parler pendant un moment, elle est trop intelligente cette fille.

— Je suis sûr que Billie t'as promis de ne rien dire ? Sache qu'elle a gardé ton secret, il est mort avec elle.

Amandine redresse la tête, elle regarde Victor et pose sa tête sur son épaule en pleurant à chaudes larmes. Victor range la feuille dans sa poche. Il se racle la gorge et tente de consoler Amandine.

— Ton bras ? Il va bien ? Tu n'as pas eu le temps de voir de qui il s'agissait ?

— Non... J'ai... Je n'ai eu le temps de ne rien voir.

— C'est sans doute le même qui est tombé sur Billie.

Amandine commence à suffoquer. Victor ne sait pas quoi faire, elle s'apprête à faire une crise d'angoisse. Elle pose sa main sur sa poitrine et tente de respirer calmement. Elle compte jusqu'à dix plusieurs fois jusqu'à sentir la pression redescendre. La boule qui grossit dans sa poitrine l'empêche de respirer, mais elle la combat avec force et ténacité.

— Très bien. Repose-toi, lui dit Victor.

Barbara entre dans la chambre sans frapper. Elle regarde Victor étrangement et lui demande ce qu'il fabrique. Innocemment, il explique qu'il est venu voir si Amandine allait bien au moment où elle a descendu les escaliers. Ce mensonge fait son effet, Barbara ne se pose pas plus de questions. Elle s'approche de son amie et pose une main sur son épaule.

— Respire, Amandine, respire, lui dit-elle avec bienveillance. Tu veux que je fasse partir tout le monde ? Sachant qu'il y a visiblement un putain de psychopathe qui rôde.

— Non, je n'ai pas encore eu mes cadeaux...

— Sacré Amandine... Tu ne perds pas le nord, répond Victor en se levant du lit. 

Dead Girl's DiaryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant