La porte du bureau est légèrement entrouverte, et mon regard ne veut pas se décrocher de la pièce où se trouve ma génitrice, peut-être étais-je en train d'attendre un signe de l'univers pour me dire si je dois y aller ou attendre ?
Pour toute réponse, je me dirige vers celle-ci, respirant un bon coup, elle reste ma mère même si c'était plutôt ma grand-mère qui a joué ce rôle à sa place.

Je ne prends pas la peine de frapper et pénètre dans la pièce, deux étagères classées et rangées par des classeurs me faisaient pratiquement face, celle-ci étaient installée légèrement plus loin de moi, remplisse l'espace sur les deux murs peint d'un gris foncé.
Un vaste bureau professionnel où trône des dossiers et des feuilles éparpillés que ma mère s'empresse d'une main rapide de mettre de l'ordre, elle soupire bruyamment, exaspéré d'avoir fait tomber quelques feuilles sur le sol, prenant cela pour une invitation, je récupère celle-ci et le lui tend.

Elle me gratifie d'un sourire en coin, et sur le coup, je me demande pourquoi je ne suis pas parti lorsqu'elle étaient encore couchées, je me déteste d'avoir de telles pensées surtout pour grand-mère, avec ses yeux d'un bleu limpide éclatants vieillis par son âge avancé, et sa silhouette toute frêle lorsque je la serre fort contre moi.

Toutefois, je ne suis pas très habile pour trouver les bons mots dans cette situation, alors je reste planter là attendant qu'elle finisse sa conversation, quelque minutes plus tard, elle termine l'appel et se dirige vers moi, je la prend dans mes bras et resserre notre étreinte quelque secondes dans le but de lui faire comprendre que le cœur y est.

– J'y vais maman, prend soin de toi et de grand-mère.

Je lui fais un petit signe de la main, avant de rejoindre la porte et d'y sortir.

Et dire que je pars pendant deux mois...

Je récupère mes bagages qui étaient encastrés dans un coin, avant de partir de la maison, je n'ai même pas le temps de souffler que les deux filles étaient déjà face à moi.
Telles deux grandes gamines surexcitées je ne peux même pas en placer une que déjà l'une d'elle, très à cheval sur le programme, me montre l'heure sur son téléphone en disant que j'aurai dû presser le pas. Chose que je peux comprendre, elles attendent ce fameux voyage et séjour depuis de long mois, pendant que moi-même j'étais tout bonnement têtu à ne pas céder à ces deux énergumènes qui me servent d'amis.
Bien que de nature solitaire, je n'étais pas un monstre sans cœur qui allait gâcher leur joie de vivre.

– Amuse-toi bien chéri ! Lance ma mère avec et toujours son téléphone collé à son oreille, sans même me considérer.

Je fais volontairement le sourd, regardant ma GrandMa me sourire avec un air compatissant sur ses fines lèvres.

Nous prenons le chemin de la gare, petit bagage et sac à dos pour moi et Shanelle, et gros valise et bagage pour notre miss Katarina. Elles accélèrent le pas alors que nous sommes en avance d'une heure – enfin c'est plutôt l'une qui entraîne l'autre dans sa course folle –  téléphone à la main et tel une grande organisatrice de voyage d'affaire la grande brune repassent tout le programme de la journée afin que tout soit exactement fait selon ces propres règles et pas un seul pied de travers au risque d'attirer ses foudres. Faut dire que c'est une très belle initiative de sa part, sauf que, Shanelle et moi on se regarde, essayant de faire rentrer dans notre crâne toute ses informations qui, espérons-le, pourront y rester assez longtemps.

Shanelle se met tout d'un coup à courir comme une petite fille, le son des roulettes de son bagage voile quelque peu le son de sa voix :

– Dépêchez-vous la voie 9 3/4 nous attend !

Je laisse un rire échapper à l'unisson de ceux des filles, aucunement surpris par l'audace de notre petite brune aux cheveux courts qui faisait référence à la gare King's cross dans Harry Potter.

C'est grâce à ce jeune garçon aux lunettes rondes à la cicatrice que j'ai rencontré Shanelle, Mais faut croire que le destin en a décidé autrement, parce qu'on n'a toujours pas réussi à initier dans notre bande :  Katarina.
Plus nous nous rapprochons de la gare, plus je me sens un brin oppressé, ma poitrine, prise dans un étau, se resserre. J'ai beau essayer d'y faire abstraction, je suis actuellement en parfaite contradiction avec moi-même, et mon cœur me le fait savoir en voulant me les retranscrire dans ma douleur.

Malgré cela, je ne peux plus me défiler, plus maintenant, lorsque j'aperçois la devanture de la gare qui se présente à nous.
J'inspire un grand coup, et malgré ça, mon corps, mon cœur me crie de courir et de rentrer chez moi pour de bon.
Ma grande bibliothèque de livres va me manquer, les yeux bleus étincelants de GrandMa et sa manière de hausser les épaules avec son sourire si insouciant, aussi.

La prochaine étape consiste à devoir supporter les quelques heures de trajet avant d'atteindre  " le coin de paradis "  décrit par Katarina en personne.

Je suis à même de surmonter ça, après tout, c'était notre dernier instant de liberté avant que chacune d'entre elles ne prennent des chemins totalement différents ainsi que moi-même.

Alors un train rempli de personnes totalement inconnues et que deux filles en sortent du lot, ça ne va pas me rendre si malade non ?

Espérons que non.

Dans le transport, je m'assois toujours côté  fenêtres, j'aime admirer le paysage, et le fait de ne pas être dérangé par qui que ce soit qui veulent passer et qui se risque d'empiéter sur mes pieds trop grand, je trouve plus sécurisant d'être coincé dans un petit espace que d'être au niveau de l'allée avec seulement le vide à côté et ne rien avoir pour s'accrocher, c'est tellement angoissant.

Pour faire court, je n'aime absolument pas le vide qui mène à l'allée du centre, pour me donner bonne conscience, et surtout pour éviter que l'une des filles prenne ma place, je m'installe directement, n'ayant pas été très rapide, shanelle se fait devancer par Katarina qui s'assoit, elle aussi, côté fenêtre.
Elle entreprit de nous jauger d'un air faussement mauvais sur son visage, mais elle ne tient pas longtemps et préfère s'asseoir tout en croisant ses bras.

– Je vous déteste tous les deux.

Je lui souris, nullement affecté par la gentillesse qui émane de sa bouche, et celle-ci ne peut se contenir de vouloir cacher son sourire avec sa main, n'osant même pas regarder l'autre brune à sa gauche qui était en train de lui jeter un de ces fameux regards dont elle avait le secret.







Coucher de soleil en été Où les histoires vivent. Découvrez maintenant