— C'est sûrement le courant d'air, répondit le prince qui perdait visiblement toute son assurance. Le vent en altitude provoque des sons bizarres. Rien d'inquiétant, croyez-moi.
Le noble garçon était devenu livide et lançait des œillades crispées vers Loucetta. La chambrière n'était pas plus apaisée que lui. Elle se tut et serrait les lèvres appréhendant ce qui allait suivre.
Léopoldine regarda Any qui fit un hochement de tête. Elle sauta à son épaule et chuchota à sa maîtresse :
— Je pourrais m'y rendre facilement, Léo ! En quelques battements d'ailes, je peux fouiller les étages supérieurs.
— Je suis sûre que tu en serais capable, Any, mais tu ne peux pas voler ici tant qu'on ne sait pas si les bastets sont acceptés à Castelbouchon. Pas devant le prince et la domestique.
Any se lamenta dans un miaulement long. Puis, la magicienne traversa la pièce, ouvrit la porte par où ils étaient arrivés en évitant soigneusement leurs hôtes. Elle quitta la chambre sous le regard médusé de ces derniers.
— Non, vous ne pouvez pas vous promener comme ça !
Le prince sortit également avec Loucetta pour empêcher Léopoldine de monter les étages de la Conservatour. Justinien profita alors du moment : il ordonna à Merle, Izak et Ruben de suivre Léopoldine jusqu'au son du luth. Pendant ce temps, il faisait semblant de reprendre le pouls du roi.
En quelques secondes, la pièce se vida de ses occupants. Une fois seul avec son patient, le docteur se hâta d'approcher une chaise du lit. Il attendit encore un peu que le vacarme à l'extérieur s'éloigne puis s'éclaircit la voix et sortit enfin la lettre récupérée à Rivade :
— Mon cher Barth... commença le médecin en lisant les mots de Meloric écrits 50 ans plus tôt.
Le roi ouvrit les yeux et se tourna lentement vers Justinien. C'était le premier geste qu'il avait fait depuis leur arrivée. Justinien était très fier de son petit effet.
***
Léopoldine perçut les claquements que le jeune prince faisait en s'activant derrière elle, et décida alors de presser le pas. Puis de courir quand elle entendit clairement le pincement d'une autre corde à quelques étages plus haut ! Meloguste, bien engoncé dans ses beaux vêtements, n'arrivait pas à rattraper la magicienne. Pire, il était, avec Loucetta, talonné par le reste des arpenteurs.
— Loucetta, empêchez ces gens de monter !
— Mais, Votre Altesse, je ne pourrais jamais les retenir ! Ils sont trop nombreux !
— C'est une question de vie ou de mort ! pressa Meloguste.
Léopoldine parvint au bout de l'allée. Il n'y avait pas d'autre porte. Pourtant, les notes de musique étaient encore plus évidentes. Elles venaient du sommet de la tour. Malheureusement, il n'y avait rien de plus : pas de pièce, pas de passage, ou bien trop bien caché pour le trouver dans la pénombre de plus en plus pesante. Et puis le prince Meloguste arrivait ! Elle hésita à user de sa magie pour éclairer l'endroit.
— Par ici, Léo ! lança Any en s'élançant sur les marches d'un escalier dérobé dans un recoin.
Ses petits yeux de félins distinguaient sans problème le discret corridor dans ce qui semblait être une simple alcôve. Léopoldine suivit à l'aveugle les miaulements de son amie. Manquant de se rater sur un degré abrupt, la bramane finit par monter quasiment à quatre pattes. Elle était sûre qu'un musicien était en train de jouer au dernier étage du bâtiment, là, derrière cette trappe en bois. « Arrêtez-vous, au nom de Castelbouchon », répéta en vain la voix du poursuivant sur les talons de Léopoldine.
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Le Cycle des Ramures - Tome 1 : Les Musicéens de Castelbouchon [Terminé]
FantasyDepuis toujours, Izak écoute avec attention les récits des étrangers de passage dans son village. Il a soif d'aventure, quelque chose le pousse à quitter son nid pour vivre sa propre vie. Justement, lorsqu'un groupe d'arpenteurs se forme devant ses...