« La vérité est là, évidente. Inavouable. »
| 15 février 1977 - 6h |
Mon cœur semblait vouloir sortir de sa cage. La douleur était si forte que je pouvais ressentir chaque parcelle de mon corps. Mes organes étaient irradiés. J'avais l'impression qu'ils allaient fondre, dévorés par un acide mortel. La vue de la mort dans son regard implorant répandait en moi le désespoir. La cruauté de mes ennemis n'avait donc aucune limite. Ils avaient châtié notre amour naissant, nous séparant de la pire des manières. Quand son regard se voila, je ressentis un effondrement au plus profond de mon âme alors que son corps se relâchait dans mes bras tremblants. La sensation de vide était insupportable. J'aurais préféré mourir. Il m'aurait été facile d'y remédier... de mettre un terme à cette souffrance. Mais tout mon être lutta contre mon esprit poignardé, en puisant dans l'unique force vive qu'il me restait. La haine. Je ne me donnerai pas la mort. Du moins, pas avant d'avoir exterminé tous mes ennemis. C'était mon fardeau. Le prix de mon insupportable survie.
Une licorne m'arracha à mon passé. Je pouvais encore ressentir la douleur de ce souvenir terrible, avant que ma funeste résolution noircisse mon âme, et emplisse mon cœur de haine. Je m'accrochai à la vue de la licorne, si belle, si douce. Elle s'approcha de l'eau prudemment. Cachée dans les ténèbres, je restai parfaitement immobile. J'espérai que sa présence m'aide à apaiser mon esprit. Il m'était pénible de reprendre le dessus sur mes émotions.
Le désir que j'avais vu dans les yeux de Remus continuait à me troubler. Pour ma mission, la situation était idéale. Lier une relation aussi étroite me donnerait une place privilégiée au sein des Maraudeurs. Ce serait un moyen imparable de manipuler toute la bande, en faisant partie de leur vie au quotidien, même après l'école. Si j'étais une Mangemort, conquérir le cœur de l'une de mes cibles serait une formidable victoire. Mais je n'étais pas une Mangemort. Jouer avec le cœur de Remus était la dernière chose que j'avais envie de faire. La perspective de trahir un être aussi pur m'accablait.
La licorne abaissa sa tête, et frôla la surface de l'eau pour s'abreuver. La crainte ne me quittait plus depuis l'embuscade des Serpentard. Un nœud s'était formé dans mes entrailles. Je me sentais oppressée, comme si un étau me comprimait la cage thoracique. L'évidence des faits me frappait durement. La vue de Remus en train de souffrir, proie d'un Serpentard, m'avait complètement fait dégoupiller. J'avais haï mon ennemi aussi fort qu'un criminel. J'avais désiré sa souffrance. Si nous n'avions pas été devant témoins, peut-être même que je l'aurais tué. D'ailleurs, il n'était pas exclu que je m'occupe de son cas. La louve en moi réclamait toujours vengeance.
La licorne redressa la tête subitement dans ma direction, intriguée. Par Merlin, je faisais partie des prédateurs les plus redoutables de ce pays... ce soir, j'avais l'impression d'être une proie. La licorne traversa le ruisseau, me cherchant toujours avec méfiance. Je reportai mon attention sur elle, trouvant son comportement des plus étranges. Le vent s'était levé doucement, trahissant ma présence. Je repris forme humaine pour ne pas exposer davantage mon odeur lupine. Elle marcha prudemment dans ma direction, indécise. Je me redressai lentement pour me révéler, sans pour autant sortir de l'obscurité. Elle s'immobilisa à ma vue, et m'observa attentivement. Elle me voyait aussi nettement que si j'étais à la lueur de la lune. J'avais l'impression qu'elle me sondait. Pouvait-elle sentir l'ampleur de mon trouble ?
Je me sentais condamnée, prisonnière dans une cage à la porte grande ouverte. Choisir d'y rester ou de me libérer m'appartenait, et c'était là mon châtiment. Quel que soit mon choix, j'y perdrai. Comme toujours. Je ne sortais jamais vraiment vainqueur. Jamais. Et après quelques années de répit, la vie m'opposait un nouveau choix. Qu'allais-je sacrifier cette fois ? La licorne poussa un hennissement doux, tout en amorçant un pas vers moi. Je reculai, fébrile. La crainte qui me rongeait en sourdine amplifia sans que je parvienne à la contrôler. Je me métamorphosai à nouveau et pris la fuite.
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L'amor ne prévient pas avant de frapper
FanfictionPrudence Jedusor. Un nom peu ordinaire n'est-ce pas ? Vous connaissez sûrement tout de mon père, Lord Voldemort, mais vous ne pouvez rien savoir de moi. Je suis une ombre insoupçonnée des Aurors, une légende pour les criminels nommée Tracker. Aucune...