BY-PASS Alpha

Chapitre 11 : Monde Fermé - Acte 3

La nuit avait été longue mais fructueuse. A peine Graal en eut-il fini avec ses obligations que sa première pensée fut pour son personnage. Il vérifia son statut et fut profondément soulagé de se savoir toujours en vie. Il put alors prendre sereinement son petit déjeuner qui avait été livré dans la matinée.

Le travail informatique réalisé à domicile lui assurait logement, nourriture, et un accès illimité au Gloc et à internet. Cette formule, où tout était calculé pour qu'il puisse rester tranquillement à la maison, était idéalement adaptée. En posant sa bouche sur le lave-dents, sa petite escapade à l'extérieur lui revint en mémoire, et cela lui valut son premier sourire de la journée. Son aventure extra-ordinaire, la puissance des sensations éprouvées, sa rencontre avec les policiers... Il pensa aussitôt à Eden et jubila à l'idée de lui raconter tout ça. La Voix lui annonça qu'elle était connectée, ce qui lui valut son deuxième sourire de la journée. Décidément, cette journée débutait bien. Il enclencha immédiatement la synchronisation et Eden ne tarda pas à répondre. Et hop, troisième sourire.

— Salut ma belle !

— Hey, Graal ! T'as l'air en forme cette fois-ci.

— Ça va.

— Ça s'est arrangé ton problème dans Alpha ?

— Pas vraiment, mais l'espoir est revenu. T'étais où hier, impossible de te joindre ?

— Ah ça tu vois, c'est un secret que je vais utiliser pour « garder une part de mystèrrre » fit-elle d'une voix étrange.

— C'est bon, pas de ça entre nous... Tiens, moi aussi j'ai un secret pour toi. Je suis sorti hier.

— Où ça ?

— Ben, dehors !

Au silence qui suivit sa réponse, Graal sut immédiatement qu'il avait touché juste. Il fut aussitôt submergé par un sentiment enivrant de satisfaction. Sentiment qu'il se garda bien de dévoiler, supposant habilement qu'une humilité apparente démultiplierait les congratulations.

— J'avoue être agréablement surprise, je ne pensais pas que tu le ferais. Tu n'as pas eu de problème ?

— Non. Tu sais, je ne suis pas du genre à me laisser faire par de vulgaires voyous.

— Je... parlais plutôt de la police.

— La police ? C'est elle qui m'a protégé, et m'a ramené chez moi.

Eden éclata de rire.

— Qui t'a ré-enfermé chez toi, tu veux dire ! Quel aventurier naïf.

L'euphorie de Graal fit place à un arrière-goût amer.

— Tu sous-entends qu'il n'y a aucun danger à l'extérieur ?

— Ah si, il y a bien un danger, celui que tu as justement rencontré.

La pilule était difficile à avaler. Pourquoi Eden ne pouvait-elle se contenter d'une réaction admirative comme l'aurait fait n'importe qui d'autre ? C'était quoi cette sale manie qu'elle avait de devoir jouer l'originale à tout prix ?

— Eden, si tu allais sur le net, tu verrais de nombreuses expériences de personnes qui se sont faites agressées. C'est prouvé. Pourquoi t'obstiner à toujours penser différemment ? Ça ne te donne pas forcément l'air plus intelligente, tu sais.

— Tu as cru à des récits aussi grotesques ! Ne me dis pas qu'il n'y a rien qui t'a gêné dans tout ça ?

Maintenant qu'elle le soulignait... Evidemment que certains récits étaient grotesques. Mais pas de quoi se résoudre à passer d'un statut de demi-dieu à celui de nigaud.