Chapitre 5 (réécrit)

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5 février 1943

Les Allemands sont très nerveux et de plus en plus désagréables mais cela, ce n'est pas nouveau, ils l'ont toujours été...

J'ai remarqué que la fréquence des patrouilles dans le village et aux alentours a sensiblement augmenté : même la nuit désormais je peux deviner le claquement des bottes sur la route qui mène à notre ferme.

Je suis convaincue que tout ceci a un lien avec un petit évènement qui s'est produit il y a trois jours : les Allemands ont perdu une importante bataille en Russie et ils ont été forcé de capituler face à l'Armée Rouge. Cette bonne nouvelle me permet de reprendre petit à petit espoir car l'Allemagne ne me semble plus si invincible qu'il y a trois ans.

Après presque un an de négociation, mon père m'a finalement confié une petite tâche en lien avec les activités de son réseau : depuis un mois je rédige des messages codés, en changeant systématiquement ma façon d'écrire, que mon père se charge de transmettre lui-même. Mais bientôt, très bientôt, cette tâche me sera dévolue : je vais devenir un messager de la Résistance et j'en suis très fière. Je sais qu'il s'agit d'une mission risquée et dangereuse mais enfin je vais pouvoir me rendre réellement utile : je vais devoir déposer soit un papier contenant une phrase codée soit un objet quelconque mais lui aussi significatif pour la Résistance dans des endroits précis. Je profiterai de mes allées et venues au village pour remplir ma mission.

Pour me faciliter la tâche, mon père a déniché une vieille bicyclette avec un panier sur le devant du guidon : ainsi la route jusqu'au village me semblera moins pénible et surtout elle me prendra nettement moins de temps.

Pour ma propre sécurité, je ne pourrais connaître la signification des messages que je vais transporter et mon père tient à ce que je ne sache absolument rien de ses activités. Naturellement lorsque j'apprends qu'un pont sur l'Aure inférieure ou sur le Véret a été détruit ou encore qu'une partie de la ligne de chemin de fer à Caen a été vandalisée je sais parfaitement qu'il s'agit d'actions menées par la Résistance

Bien entendu, ma mère a protesté et elle tenté de négocier avec mon père afin que je ne participe pas à ces activités particulièrement dangereuses mais le groupe de mon père a besoin d'un messager et moi, j'en ai assez de me morfondre à la maison.

Je me demande quand même si j'ai bien fait de marteler pendant des jours et des jours que moi aussi je voulais faire partie du réseau de mon père : si je connais parfaitement les risques vis-à-vis des Allemands, je ne me doutais pas que le Gouvernement de Vichy allait singulièrement compliquer la vie des résistants. En effet, avec l'accord du Maréchal Pétain, une sorte de Gestapo française a vu le jour afin d'intensifier la lutte contre la Résistance. Cette organisation politique et paramilitaire a été baptisée la Milice française. Comme chez les nazis, il se murmure déjà que les méthodes de cette police particulière seront...brutales.

Lorsque nous avons appris cette nouvelle je me suis une nouvelle fois disputée avec ma mère : je sais bien qu'elle me trouve trop jeune mais j'en ai assez d'être une écolière modèle et je peste sans cesse d'être une fille car je suis certaine qu'elle aurait nettement moins protesté si j'avais été un garçon.

15 mars 1943

Voilà maintenant presque un mois que je remplis mon rôle de messager : mon père et moi nous sommes certains que les Allemands ne se doutent de rien car je n'ai absolument rien changé à mes habitudes afin de ne pas attirer l'attention sur moi.

Je profite toujours de mes allées et venues au village pour déposer un message aux endroits convenus : parfois je le fais avant la classe, parfois après mes achats à l'épicerie ou mes visites chez ma cousine.

Les larmes d'Auschwitz {Tome 1 et 2 publiés  chez Poussière de Lune Édition }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant