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Shai passa sa journée dans la maison à explorer, vérifiant chaque fenêtre et chaque porte sans pour autant passer un pas dehors. Elle évaluait seulement ses chances tout en préparant un plan dans sa tête, certain qu'il serait mieux de partir à la nuit tombée lorsqu'il y aurait moins de personnel.

Sa visite n'avait toutefois pas été inutile puisqu'elle avait pu voler un couteau dans la salle à manger. Elle le cachait sous son oreiller pour être un peu en sécurité dans le lieu où elle se sentait le plus vulnérable. Etant rassurée par sa journée active et ayant reçu plusieurs vêtements par Odile, la gouvernante, elle se faufila dans la salle de bain pour se rafraîchir. Elle resta un instant immobile sous le jet d'eau, laissant une bonne fois pour toute ses émotions partir dans les canalisations. Elle n'éteignit que lorsque ses larmes furent sèches et que le courage bomba son coeur. Elle sortit un peu plus sereine, impatiente d'agir cette nuit. Toutefois, cet apaisement soudain fut de courte durée puisque Micah l'attendait de l'autre côté. Il semblait impatient, les bras croisés face à la porte.


« T'avais toute la journée pour utiliser la salle de bain. » Elle se pinça les lèvres pour retenir son sarcasme de s'échapper. Ils avaient surement d'autres salles de bain dans cette maison, pas de doute. « Quand j'arrive, j'ai aucune envie d'attendre de pouvoir seulement me laver. »


Il s'avança dans la salle de bain avant de claquer la porte derrière lui. Elle l'ignora, refusant d'être touchée par le malaise qu'il instaurait constamment. Elle s'allongea dans le lit et se recouvrit de la couette tout en attrapant de sous son oreiller le couteau. Elle était prête à partir, à s'enfuir d'ici.
Micah revint quelques minutes plus tard, une seule serviette autour des hanches protégeant son intimité. Shai ferma les yeux rapidement pour l'éviter mais il s'en moqua et traversa seulement sa chambre pour rejoindre sa penderie et enfiler un caleçon. Elle qui comptait l'ignorer jusqu'à ce qu'il reparte comme le soir dernier fut surprise de sentir le matelas s'enfoncer de l'autre côté. Elle se redressa brutalement pour le regarder.


« Qu'est-ce que tu fais ? » Sa voix était presque étranglée tant elle était surprise. Il avait les yeux clos, face à elle, les bras croisés contre sa poitrine. « Micah, je...refuse de dormir avec toi. »

« Il y a la banquette au pied du lit, vas y. C'est mon lit de base, tu fais ce que tu veux. »

« Est-ce que je peux avoir une autre chambre ? »


Il ouvrit les paupière seulement pour lever les yeux au ciel. Néanmoins, il s'arrêta lorsqu'il vit la lame de couteau dépasser de la couette. Shai n'eut le temps d'agir en le voyant qu'il lui volait des mains. Elle recula, prête à recevoir un coup, voire pire se faire poignarder en punition. Toutefois, il regarda l'arme blanche comme s'il venait de trouver de la dinette. Effectivement, le couteau n'avait rien de dangereux, non seulement par son bout rond que par sa lame peu aiguisée. C'est tout ce qu'elle avait trouvé, les ustensiles étaient tous dans la cuisine, là où tournaient sans cesse des professionnels. Il lui rendit tout en se retenant de faire un commentaire, presque amusé de son innocence. Shai en fut confuse et, elle, ne put se taire.


« Tu me le rends ? »

Il hocha la tête avant de s'étirer et s'installer sur le dos. « A part te faire une tartine, il va pas te servir à grand chose. » Elle voulut tester contre sa paume mais il attrapa son poignet pour l'en empêcher, une teinte d'agacement dans son regard qu'elle ne put percevoir, continuant de le fuir. « C'était pas une invitation à tester, Shai. » Il lui reprit le couteau pour le déposer sur sa table de nuit avant de se rallonger et de fermer les paupières, espérant cette fois pouvoir dormir. Ce fut sans compter sur la jeune femme qui resta assise à le fixer, jaugeant ses possibilités. Lui dans la chambre, jamais elle ne pourrait s'en aller. Micah perdit son calme avant même qu'elle ne choisisse le banquette. Il se redressa brusquement, la faisant sursauter et se protéger de ses bras. « Putain mais prend une décision. Je t'ai déjà dit, qu'ici, tu risquais rien et c'est vrai. Je ne vais pas te toucher et personne d'autre ici n'en a le droit. Et pourtant, je te jure que là, ça me démange et vraiment pas pour te baiser. »

« Désolée. »



Elle sortit du lit et se recroquevilla dans la banquette. Micah se sentit stupide et eut presque envie de lui dire de revenir, la trouvant bien trop frêle pour dormir ici, même dans le plus luxueux des canapés. Toutefois, il refusait de ressentir autre chose que de la colère ou au mieux de l'indifférence envers elle.

Il s'allongea dans son lit et ferma les paupières. Il ne tarda pas à s'endormir, épuisé par les derniers événements et sa nuit blanche. Shai, elle, ne dormit pas et lutta malgré la fatigue. Même si selon lui, elle ne risquait pas d'être violentée, la jeune femme voulait sa liberté. Et elle était prête à en prendre le risque. Elle vérifia qu'il dorme avant de prendre la fuite.

Elle longea les murs et les escaliers, vérifiant à tout moment de ne croiser personne. Elle se retrouva rapidement à courir pour s'éloigner de la maison. Elle ne s'arrêta que lorsqu'elle tomba devant un mur surplombé d'un grillage. Elle regarda brièvement de droite à gauche mais ne vit qu'une étendue de barrières qu'elle ne pouvait dépasser. Elle se mit à le longer tout en trottinant, ses doigts effleurant la pierre à la recherche d'une faille.
Seulement elle n'avait plus aucun moyen de partir, c'était certain et l'ombre fonçant vers elle en fut une énième preuve. Elle n'eut le temps de lever les mains, de crier des excuses qu'elle se faisait plaquer violement. Elle perdit connaissance lorsque sa tête frappa le sol. Un homme s'occupant de la sécurité de la maison, tant sortante que entrante, avait décidé d'agir sur un coup de tête et ne pas suivre les directives de Micah. Il s'en rendit compte en se relevant alors qu'elle restait immobile, inconsciente. Il hésita une seconde à se débarrasser d'elle, certain que si elle reprenait vie, que si elle revenait dans la maison, il se ferait tuer.
Un autre agent arriva à toute vitesse, inquiété par le bruit sourd.  Il attrapa son bras avant qu'il ne lui assène un autre coup de désespoir.


« Qu'est-ce que tu fous ? On ne touche pas à Mademoiselle Monet. »

« Je...j'ai pas fait exprès. Elle essayait de s'enfuir. »

« Il va te tuer. »

Contre l'univers - EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant