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Micah retrouva Shai quelques minutes plus tard comme ils en avaient convenu. Lorsqu'il revint, elle ne pleurait plus mais ses yeux continuaient de montrer tout son désespoir. Il tendit la main en sa direction qu'elle prit, cherchant un quelconque réconfort, même chez celui qui en était une des raisons. Elle se laissa guider jusqu'à l'ascenseur, continuant de fixer leur lien comme s'il était étrange, comme si elle n'en faisait pas partie. Elle se demanda même si elle ne devenait pas complètement folle, si ce n'était pas ça, le syndrome de Stockolm. Alors, lorsque les portes de l'ascenseur se fermèrent sur eux, elle se détacha de lui avant de se replier au fond. Lui, resta près des portes, fixant le métal face à lui. Il cherchait au fond de lui-même ce Lui impassible, sans réaction, ce Lui qui n'existait qu'en l'absence de Shai. Néanmoins, il n'eut le temps puisque l'ascenseur s'arrêta brusquement avant que les lumières ne coupent, ne laissant que celle de secours. Il se précipita vers Shai pour la protéger de son corps d'une quelconque balle perdue.


« Micah.. » Elle n'eut le temps de le questionner qu'il lui demandait de se taire. Il avait besoin de se concentrer, d'entendre les bruits extérieurs. Il n'y avait aucun coup de feu, aucun cri. Tout était trop calme pour qu'il en soit serein.

« Reste dans le coin, baisse toi. » Il attendit qu'elle s'exécute, se recroquevillant dans une minuscule petit forme qu'il trouva trop frêle et innocente. Il ne s'y attarda pas, se promettant seulement de lui apprendre à se défendre. Il était prêt à prendre le risque qu'elle file et détruise son honneur plutôt qu'elle termine morte entre ses bras.

« Il y a un bouton d'urgence. »

« Je sais. » Il sortit son téléphone. Il avait suffisamment de réseau pour se renseigner. « J'ai besoin de savoir ce qu'il se passe avant que cette porte ne s'ouvre sur nous. » Il appela un de ses hommes qui répondit sans attendre. « Qu'est-ce qu'il se passe ? » Shai voulut se rapprocher pour entendre la conversation mais Micah lui lança un regard clair, elle devait rester protégée, à sa place. Elle se renfrogna alors sur elle même, tendant l'oreille. « Mon père ? » Il n'y avait qu'une coupure de courant, rien de plus pour le moment. Personne n'avait essayé d'entrer. Le patriarche avait néanmoins été escorté vers l'extérieur. « Parfait. Vérifié qu'il n'y a vraiment rien. Aidé les gens à partir. Profitons d'en faire un peu de politique. Je suis avec Shai. On est bloqué dans l'ascenseur qui mène au parking.  Sortez nous de là quand tout sera clair. » La brune ne put retenir un grognement de frustration à l'idée de rester encore longtemps ici. Il l'ignora, lui-même peu envieux de l'enfermement dans une boîte de métal. « Merci. Faites attention. On sait pas ce qui se passe vraiment. »


Il raccrocha, peu rassuré par les événements. Shai put le sentir mais elle ne se redressa pas, respectant sa demande de rester dans le coin de l'ascenseur. Elle put le voir se tendre au fur et à mesure qu'il essayait d'inspirer, sa cage thoracique se bloquant au fur et à mesure du temps. Il détestait les lieux clos et minuscules depuis toujours. Il se souvenait de tous les entraînements réalisés dès son plus jeune âge. Il s'était battu contre toutes ses peurs de petit garçon et les avait presque toutes eu. Toutefois, il gardait l'enchainement et l'enfermement comme des fragilités indomptables. Malgré tout, à part une humeur un peu plus mauvaise, rien n'était perceptible, à part pour la jeune femme qui passait son temps à analyser son attitude.


« Où est ton père ? »

« Il a été escorté jusqu'à la maison. »

« Tant mieux. » Il fronça le nez, incertain de sa sincérité. « Est-ce que tu crois que c'est lié à la première fusillade ? »

Il se retourna pour lui faire enfin face. Il s'appuya contre les portes de l'ascenseur, gardant sa hauteur pour la regarder. Shai baissa immédiatement les yeux. « Lié à ton père, tu veux dire ? Je sais pas. On pourrait être surpris. »

« Je pensais pas que c'était...un..» Monstre. Elle ne termina pas sa phrase, refusant d'injurier son propre père. « Il y a beaucoup d'innocents ici... »Il laissa un flottement. « Tu sais que personne ne m'a dit la vérité pour l'instant. » Il se laissa glisser contre la paroi tout en regardant son téléphone, les forces de l'ordre ainsi que les pompiers étaient en route. Ses hommes leurs donnaient trente minutes avant de se charger eux-mêmes de la libération de leur supérieur. Il étendit ses jambes, à quelques centimètres de celles de Shai repliées contre elle-même. Chaque contact, chaque proximité étaient analysés dans sa tête comme s'il se devait de calculer et garder une distance protectrice. Pourtant, il la trouvait belle ce soir, même sous la lumière orangée de secours. Il n'essaya pas de s'en cacher, longeant de son regard ses formes. « Micah, dis-moi. »

« Est-ce que tu profites vraiment de notre enfermement pour me cuisiner ? » Son ton fut bien plus taquin que ce qu'il ne voulait mais il n'eut aucun regret en voyant les joues de Shai rougir. « C'est pas vraiment le moment mais une prochaine fois, d'accord ? »

« Pourquoi est-ce qu'il a voulu me tuer en même temps que vous ? »

« Je sais pas, Shai. » Il secoua la tête tout en haussant les épaules. Il aurait aimé savoir et comprendre mais c'était tout bonnement impossible puisque son père semblait agir sans raison. « Je l'ai jamais compris. Il est...imprévisible, sans valeur, sans loi. »

« J'ai une dernière question. » Il resta silencieux, acceptant par celui-ci. « Pourquoi me garder ? Pourquoi ne pas me libérer ou même...ou même me tuer pour vous venger ? »

« On a aucun intérêt à te tuer. » Et même s'il en trouvait un, il refusait d'en arriver jusque là. « Mon père veut quand même te garder parce que pour les personnes extérieures, que tu sois dans notre famille et plus celle des Monet, ça a un poids. »

« C'est complètement...dingue. »

« Je sais. » Il tapa son pied avec le sien lentement, lui faisant enfin relever le nez. « Allez, Shai, c'est pas si mal. Tu pourrais...qu'est-ce que t'avais prévu cet été ? Courir des milliers de kilomètres ? La torture. »

« A la place je suis enfermée dans un ascenseur avec mon...soit disant futur mari, espérant ne pas me faire tuer par mon propre père ? » 

Il inclina la tête tout en grimaçant avant de se redresser. « Dis comme ça, pas faux mais ça pourrait être pire. »

« Je vais m'y habituer, c'est ça ? »

« Il est temps que mes gars défoncent ce putain d'ascenseur. »

Contre l'univers - EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant