Chapitre 13 Zoé

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— Qu’est-ce que tu fais là, Cole ?
— Je suis venu récupérer ma femme ! Je me suis rendu compte que je m’étais trompé et que… je t’aime.
— C’est moi ou mon argent que tu aimes ?
Il m’a toujours pris pour une fille naïve. Oui, je faisais semblant de fermer les yeux parce que je pensais que je l’aimais, mais j’avais tort, je voulais juste quelqu’un dans ma vie. Je ne l’aimais pas vraiment, sinon je n’aurais pas pu l’oublier dans les bras d’un autre aussi facilement. D’ailleurs, je sens encore l’odeur de Wayatt sur moi et j’ai l’impression de sentir ses mains. Tout était parfait avant que cet homme-là, qui fait partie de mon passé, ne débarque. Alors oui, bien évidemment, nous n’avons pas d’avenir ensemble et je n’ai pas envie d’être avec un homme qui vit loin de tout et qui en aime une autre, mais j’aurais voulu vivre encore plus intensément, comme il me l’a proposé, le moment présent. J’en ai des frissons tellement il m’a donné du plaisir. Je me suis trompée… Moi qui pensais, la première fois, que la taille ne faisait pas la performance, il m’a prouvé que les deux combinés peuvent te faire monter au septième ciel. Wayatt est le meilleur amant que j’ai eu, il a une telle performance, je…
— Reviens, Zoé ! Tu me manques tellement, je n’arrive plus à vivre sans toi.
— Je suis passée à autre chose, comme tu l’as vu.
— Oui, mais tu as commis une erreur ! J’en ai fait une aussi. On se pardonne et on recommence.
— Combien de temps ?
— Combien de temps quoi ?
— Depuis combien de temps es-tu avec elle aussi ?
— Ne parle pas de ça ! Ce qui compte, c’est qu’aujourd’hui, je ne le suis plus et que je ne veux que toi.
— Tu veux que je revienne, alors dis-moi depuis combien de temps vous vous foutez de moi.
— Tout de suite, les grands mots ! Tu travaillais tout le temps aussi, tu comprends ? Tu n’avais jamais de temps pour moi, et je suis un homme, je ne peux pas rester sans sexe pendant des jours. C’était juste ça avec elle, du sexe.
J’ai envie de m’approcher de lui et de le frapper, mais je veux d’abord qu’il réponde à mes questions.
— Combien de temps ?
— Quelques années.
Je n’arrive plus à respirer. Il a dit « années » ? J’ai bien entendu ? Je reste calme et posée parce que si je m’énerve maintenant, je n’en saurai pas plus.
— Quand est-ce arrivé la première fois ?
— Tu veux vraiment savoir ça ?
— Oui, pour repartir sur de bonnes bases, je pense que le mieux, c’est de mettre tout à plat.
— C’était à ton anniversaire, pour tes vingt et un ans, je crois. Tu étais occupée avec les invités, j’étais parti aux toilettes, elle m’a suivi, m’a poussé dedans et m’a enlevé mon pantalon avant que je ne dise ouf.
Bien sûr, le fameux accident dont il parlait… Comme d’habitude, ce n’est pas sa faute.
— Elle t’a donc violé ?
— Non, bien sûr que non ! Mais comment dire non à une bouche chaude autour de son sexe ? Je ne suis qu’un homme, après tout.
Bien sûr, ce n’est qu’un homme, voyons.
— Et donc ça a continué ?
— Écoute, on ne va pas parler que de ça, d’accord ? J’ai fauté, oui. Allez, on s’embrasse et on n’en parle plus.
Je m’approche de lui et lui touche le torse.
— Et ta secrétaire, ton assistante ? Tu en as eu d’autres aussi ?
— Oui, bien sûr, il a bien fallu que j’enlève la frustration sexuelle que tu m’as imposée.
Ça y est, j’en ai marre ! Je pense que je vais prendre le vase que je vois sur le côté et lui casser sur la tête. C’est donc ma faute ? Mais il plaisante ou quoi ? Je me recule et le regarde comme je regardais Wayatt tout à l’heure, puis je commence à enlever mon haut. Je n’ai pas mis de soutien-gorge, alors c’est bien plus pratique. Je retire ma culotte et je le scrute.
— Tu es magnifique, ma chérie.
Quand Wayatt m’a dit ces mots toute la nuit, ça m’a fait plaisir et je me suis sentie belle et désirée entre ses bras. Quand c’est Cole qui dit exactement les mêmes, je n’ai qu’une seule envie, c’est de vomir. Il m’a menti, trompé et arnaqué pendant des années. Je le savais déjà, mais, avoir tous les détails, ça fait mal. Non, je ne dirais pas que ça fait mal, ça vexe plutôt. Je prends mon doigt et le passe sur tout mon corps. Je vois une bosse se former dans son pantalon, alors je m’approche de lui, comme une féline prête à lui faire du bien toute la journée, et je le prends dans mes bras avant de placer ma jambe et, de toutes mes forces, je remonte mon genou dans ses testicules. Je recule pour qu’il ne me mette pas un coup.
— Ahhh, mon Dieu, mais tu es malade !
Il se plie en deux et se tient les parties intimes. Je remets ma culotte et mon haut.
— Espèce de malade ! Tu penses vraiment que je vais revenir avec toi après ce que tu m’as fait ? Jamais de la vie ! Je préfère finir vieille fille avec des chats plutôt que retourner avec un homme comme toi.
Je passe à côté de lui et ouvre la porte.
— Ne reviens plus jamais m’importuner. Si tu ne l’avais pas compris avant, toi et moi, c’est fini et je ne veux plus avoir de contact avec toi.
Je le pousse dehors. Juste après avoir passé la porte, il s’écroule par terre, en pleurs cette fois.
— Tu vas me le payer, salope, je peux te jurer que tu vas le regretter et…
Je n’écoute pas la suite, ferme la porte et vais dans mon lit pour être le plus loin possible de lui. Quand je repense à toutes ces années où je pensais que c’était le bonheur, je me suis complètement trompée, j’étais aveuglée par ce qu’il me faisait croire.
Quand il me disait qu’il rentrerait tard, car il avait une réunion…
Quand il me disait qu’il partait en voyage d’affaires et pour lequel il s’arrangeait tout le temps pour que ça soit au moment où j’avais un gros mariage à organiser et que je ne pouvais pas l’accompagner…
Dans tous ces cas-là, il était avec une autre.
Dire que j’ai fait l’amour avec cet homme… Heureusement, on a toujours mis un préservatif, car je ne voulais pas tomber enceinte et que je suis allergique à la pilule. Quand je pense à la protection, je regarde mes cuisses. On ne s’est pas protégés avec Wayatt, à aucun moment. Je ne pense pas qu’en quelques fois, comme ça, je pourrais tomber enceinte, mais je devrais tout de même vérifier mes prochaines règles, voir si notre inconscience n’a pas de conséquence. Alors là, si je tombais enceinte d’un homme que je connais à peine, en ce moment, ça serait le pompon, je pense qu’il n’y aurait pas pire… Je suis seule, presque sans emploi, le père se marie avec une autre… Non, non, il ne faut pas que je pense à ça. Il n’y a que très peu de chance que ça arrive, non ? Je me relève pour prendre une douche, il faut que je retourne à Jacksonville expliquer tout ça à Wayatt. Il faut qu’on ait enfin une vraie conversation, on ne peut pas continuer comme ça.
Je ne sais même pas quoi penser de tout ça.
Il faut que je le voie…
En plus, il doit s’imaginer des choses en ce moment.
Je prépare mes affaires et finis de m’habiller. Je pense que je ne devrais plus m’échapper tant que l’on n’a pas réglé tout ça, ou qu’il soit marié et que je reparte. J’ai, d’un coup, mal au ventre en le pensant marié… Lui et moi, nous n’étions qu’une attraction mutuelle pendant un instant, il l’a dit lui-même, je ne suis qu’une pute, un démon auquel il ne peut pas résister. Non, en fin de compte, je ne vais pas aller le voir, je sais déjà ce qu’il pense de moi, comme tous les hommes, comme mon ex. Je ne suis pas mieux que mon ex-meilleure amie, j’ai couché avec un homme en couple. Toute la réalité de la situation me revient en pleine face, je suis la fille qui couche avec un homme presque marié. Un sentiment de dégoût, à mon encontre, me prend, je suis cette fille, cette salope. Ça arrive même à me faire dire des gros mots, cette histoire.
Je m’allonge sur mon lit et je pleure. Comment j’ai pu finir aussi bas ? Je ne suis pas ce genre de fille normalement, je suis quelqu’un de bien, de gentil et voilà où ça me mène.
Je passe les trois jours suivants dans un état pire que quand les journaux ont révélé la tromperie de Cole. J’ai eu mes parents au téléphone et j’ai dû mentir en leur disant que tout allait bien alors que pas du tout. Je suis au fond du trou et je ne sais pas exactement pourquoi, je pense que c’est une accumulation de tout. J’en ai marre de cette vie où je n’ai jamais de chance, où je passe pour une conne. Et voilà encore un autre gros mot.
Mon téléphone se met à sonner, je tends mon bras pour l’attraper… Mince, c’est la future mariée ! Je ne pensais même plus à elle, juste à son futur époux. Les larmes se remettent à couler, mais il faut que je lui réponde. Même si j’ai honte, il faut que je le fasse.
— Allô ?
— Bonjour, madame Clarks, c’était pour vous prévenir que j’étais rentrée, donc je serais disponible dans les jours qui suivent pour un essayage et tout ce que vous voudrez.
— Euh… d’accord. Je peux essayer d’organiser ça ce week-end, si cela vous convient.
— Ah non, ce week-end, ce n’est pas possible, c’est la fête à Jacksonville. C’est tous les ans phénoménal et je ne compte pas louper ça.
— D’accord…
— Et j’espère que vous serez là aussi, avec moi. Vous allez pouvoir découvrir tout ce que notre ville offre.
— Je ne suis pas sûre de pouvoir être disponible.
— Vous venez de me proposer de prendre des rendez-vous ce week-end, donc c’est que vous êtes libre, non ?
Elle m’a bien eue ! Je veux juste éviter de croiser son fiancé, c’est encore trop dur pour moi de le voir et je crains de craquer. Encore la voir, elle, j’aurais pu survivre, la honte, je peux la surmonter, mais pas ce que je ressens pour lui.
— C’est donc réglé, on se voit samedi.
Et elle raccroche.
Elle ne me donne absolument pas le choix. Je reste un moment, hébétée, à regarder mon téléphone. Elle est culottée, cette femme ! Je n’ai pas envie d’y aller à cette fête de village, bon sang !
Je me recouche, beaucoup plus énervée que je ne l’étais avant.
Quand le samedi arrive, j’hésite longuement, mais j’ai décidé d’arrêter de faire l’enfant et de me comporter comme une adulte responsable. D’accord, j’ai eu un moment d’égarement, mais c’est fini et je prépare mes affaires pour partir. Je compte prendre un hôtel là-bas, je veux bien être courageuse, mais j’ai mes limites, dormir sous le même toit, c’est trop pour moi. Une fois prête, je passe à l’accueil pour régler ce que je dois et me voilà partie pour retourner dans cette contrée maudite.
Une fois arrivée près du centre-ville, je constate que c’est impossible de passer, tout est bloqué, il y a des barrières partout et beaucoup de gens. C’est vraiment la fête. Je décide donc de laisser ma voiture sur le côté et de finir à pied, de braver tout ce monde. J’entends de la musique country et, au détour d’une rue, je constate qu’il y a une fête foraine. Tout le monde rit, mais moi, je n’ai pas envie de rire avec tous ces gens, j’ai juste envie de me cacher dans un trou et d’attendre que ça passe. Pourquoi suis-je venue là, déjà ? Je ne sais plus mes motivations.
Je continue à avancer, je suis intriguée par ce qui me paraît être un concours de mangeurs de saucisses. Je m’approche doucement et, quand je les vois avaler tout ça, je me dis qu’au bout de la troisième, je serais déjà en train de vomir, moi. Je regarde jusqu’à la fin et, à l’inverse de ce que j’aurais pensé, ce n’est pas le plus en chair qui gagne, mais un homme assez maigre. Mais où peut-il mettre tout ça ?
Je continue ma marche jusqu’à ce que je voie un concours de lasso. Waouh, je n’avais jamais vu ça en vrai ! Plusieurs cowboys sont dans la place et, avec leurs lassos, ils doivent attraper le petit cochon. C’est aussi cruel qu’intrigant. Pauvre bête, ils n’ont pas une vie facile, eux non plus. Je regarde les hommes se battre pour gagner, jusqu’à ce que je le reconnaisse, lui… Je n’aurais jamais pensé que c’était ce genre d’homme et, pourtant, il est là et il m’a vue. À travers toute la foule, il ne me quitte pas des yeux et arrête de jouer avec les autres. Je ne peux plus le voir ni le regarder, je préfère m’enfuir en courant et je me cogne sur le torse d’un inconnu.
— Hé, ma jolie ! On s’est perdue ?
Il sent l’alcool à plein nez, c’est une horreur.
— Non. Je suis désolée de vous avoir bousculé.
Je commence à passer à côté de lui, mais il me retient. Je regarde sa main qui me tient prisonnière, il me serre de plus en plus et me fait mal.
— Lâchez-moi !
— Non, ma jolie, pas tant que tu ne m’auras pas dit ton prénom.
J’essaie de me dégager, mais impossible, il est trop fort. J’essaie d’attirer l’attention des gens autour, mais tout le monde s’en fiche.
— Vous me faites mal !
Il me comprime tellement fort que la douleur devient insupportable et que je commence à pleurer. D’un coup, je vois le type tomber au sol, je regarde autour de moi pour comprendre ce qui se passe et je rencontre les yeux de Wayatt. Il est rouge de colère.
— Tu la touches encore une fois, Busney, et je te jure que je te tue !
— Je ne savais pas que tu la connaissais.
— Que je la connaisse ou pas, ça n’a pas d’importance ! On ne traite pas les femmes comme ça !
Je touche l’endroit où il m’a attrapée et remarque que j’ai la trace de ses doigts. Wayatt aussi les voit, il avance la main pour les toucher, mais se retient à temps.
— Fais plus attention à toi, fille des villes, ils sentent la prostituée à des kilomètres, ici.
Je n’ai plus le cœur à lui parler, je suis encore plus lasse. Tout le monde nous regarde en plus. Je pars en courant, en pleurant. Je savais que je n’aurais pas dû venir, voilà ce que c’est d’insister. J’espère au plus vite m’éloigner de lui et, cette fois, je ne reviendrai pas. Tant pis pour ce mariage, je n’ai plus la force de rien. Je pense que je vais prendre l’avion et partir dans un autre pays, tout quitter, et vivre enfin une vie où personne ne me connaît. D’un coup, je suis stoppée dans ma course et serrée contre un corps qui me ceinture. Je me débats, j’ai peur maintenant avec ce qui s’est passé tout à l’heure.
— C’est moi, mon tournesol.
C’est quoi encore ce surnom sorti de nulle part ? En tout cas, je me débats moins, même si je ne veux pas rester aussi proche de cet homme qui ne fait que me blesser. Il finit par me lâcher, me prendre la main, et me tirer dans la foule. Je le suis comme une automate, je n’ai qu’une seule hâte, c’est qu’il me lâche pour lui en coller une. Je ne suis plus blessée, comme il y a une minute, mais en colère et je ne vais pas me laisser faire cette fois-ci.

Le Ranch Mac Bryant Où les histoires vivent. Découvrez maintenant