Tragedie

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J'entends un bruit déchirant, un coup de feu, sec, brutal, comme un cri qui déchire le silence. Ce son, on le voit dans les films, on l'imagine à peine dans la réalité. Mon corps réagit avant mon esprit, je sursaute, mes paupières se ferment d'elles-mêmes, par pur réflexe, dans un effort désespéré de me protéger de ce que je sais être la pire des choses.

Quand mes yeux se rouvrent, mon cœur se fige. Nate est là, devant moi, mais tout son être vacille. Ses yeux se révulsent, son corps s'effondre, lourd, implacable, et sa tête heurte violemment le rebord du trottoir. Le bruit de l'impact résonne dans mon esprit comme un coup fatal, le monde entier semble basculer avec lui.

Un cri de terreur, de douleur, s'échappe de ma gorge. C'est un cri que je ne me reconnais pas, une plainte déchirante. Je me précipite vers lui, mon Nate, étendu, inerte, son corps si vibrant de vie quelques secondes auparavant est maintenant figé. Ses yeux, si pleins de lumière, se sont éteints. Mon regard se lève alors, dans un effort de comprendre, et je vois Khalil, debout, l'arme encore fumante dans sa main, son visage figé dans un rictus que je ne peux supporter.

Tout devient flou. Je n'entends plus rien, sauf le battement affolé de mon propre cœur. La sécurité de l'hôtel arrive, ils plaquent Khalil au sol, mais je ne peux détourner les yeux de Nate. Sa chemise noire, celle que j'adorais, est maintenant imprégnée de sang. Le rouge se répand, inexorable, et je me jette à genoux près de lui, mes mains tremblantes appuyant désespérément sur la plaie qui déverse son flot de vie.

Les larmes brûlantes coulent sans fin sur mon visage, je suis engloutie par le désespoir. Le sang glisse entre mes doigts, mes mains sont déjà couvertes, mais je continue, incapable d'arrêter. Sous sa tête, une flaque de sang grandit, formée par la violence de sa chute. C'est comme si le sol lui-même était devenu complice de cette horreur.

Je crie, je hurle, j'appelle Nate comme si mon désespoir pouvait le ramener. Nous venons à peine de nous retrouver, cela ne peut pas se terminer ainsi. Je ne peux pas, je ne veux pas, vivre sans lui. Il est tout ce que j'ai, tout ce que je suis.

Les secours arrivent enfin. Ils me disent de m'écarter, mais je ne peux pas. Je reste accrochée à lui, comme si ma présence pouvait suffire à le ramener. Je veux sentir sa chaleur, je veux croire qu'il est encore là, qu'il va ouvrir les yeux. Mais tout ce que je sens, c'est le froid qui s'empare peu à peu de lui.

Ed et Jackson me tirent en arrière, me forcent à les laisser faire. Les filles sont là, elles essayent de me parler, mais je n'entends rien. Je ne suis plus là, je ne suis plus moi-même. Je me débats, je lutte pour rester près de lui. "Laissez-moi rester avec lui, ne me l'enlevez pas !", je hurle, encore et encore, comme un mantra désespéré. La panique s'empare de tout mon être, je n'ai jamais ressenti une terreur aussi viscérale, une douleur aussi absolue.

Je regarde, impuissante, alors que les ambulanciers s'affairent autour de lui. Leurs gestes sont rapides, précis, tout se passe si vite et pourtant chaque seconde semble durer une éternité. Ils tentent de le réanimer, mais je ne vois que l'immobilité de son corps. Quelques minutes plus tard, Nate est sanglé sur le brancard et emporté en courant vers l'ambulance.

Je tremble de tout mon corps, je suis glacée de l'intérieur. Une autre ambulance me prend en charge, mais je ne peux ni bouger, ni parler. Tout en moi s'est figé, comme si j'avais quitté ce monde. Je suis une coquille vide, une silhouette dévastée. Frany est à mes côtés, ses mots d'encouragement ne sont que des bruits lointains, comme des vagues se brisant contre une digue déjà submergée. Elle me parle de Nate, qu'il est fort, qu'il va s'en sortir, mais je ne parviens pas à l'entendre.

Je suis assise, seule dans une chambre d'hôpital, mes mains encore tremblantes, tachées du sang de l'homme que j'aime. Je revis en boucle cet instant terrible. Nate, ses yeux qui se ferment, son corps qui s'écroule, le choc de sa tête contre le sol. Rien ne semble réel, et pourtant tout est si douloureusement tangible.

Plongée dans son regard Où les histoires vivent. Découvrez maintenant