Je repris la route en direction de l'herboristerie, Jesca m'emboitant le pas. Cirrus ne s'était pas montré, j'avais alors supposé qu'il avait eu une urgence et qu'il n'avait pas pu nous prévenir. Après tout, ce n'était pas comme s'il nous abandonnait en plein chantier naval. Jesca connaissait Sumeru et moi, je n'étais pas complètement retardée. Le chemin du retour n'était pas une épreuve.
Sauf que le trajet jusqu'à la boutique n'était pas ma priorité à ce moment-là.
Mon esprit était resté à la taverne, coincé dans les rouages de ma discussion avec Jesca.
Je ne pouvais tout de même pas avoir de sentiments ambigus envers Ether, je ne la connaissais que depuis quelques semaines. Et c'était une fille. Je n'avais jamais éprouvé une quelconque attirance envers les femmes jusque-là — Envers les hommes non plus, je l'admets.
Je ne m'étais jamais posé ce genre de questions auparavant parce que l'occasion ne s'était jamais présentée. Je la trouvais jolie, c'était vrai. Mais est-ce que c'était suffisant pour arriver à en déduire quoi que ce soit ?
Je jetai un rapide coup d'œil à Jesca. Ses courts cheveux bruns était attachés en queue de cheval et quelques mèches s'échappaient ici et là de son élastique pour glisser autour de son visage. Sa peau était assez claire et en y regardant de plus près, un grain de beauté décorait le coin inférieur droit de sa lèvre. Elle avait aussi de jolis yeux noirs et de longs cils. Elle était elle aussi assez jolie. D'un point de vu purement objectif, c'était vrai qu'Ether était plus belle. Mais beaucoup seraient très certainement d'accord pour dire que cette fille était au-dessus de la moyenne. Après tout, même Cosmo, qu'elle venait de rencontrer, était tombé sous son charme.
Je restai perdue dans mes pensées un moment. Si profondément que je ne remarquai que j'étais passée à côté de la boutique que lorsque Jesca m'empoigna le bras.
Je me tournai vers elle, et son visage blême me fit face. Je fronçai les sourcils en suivant son regard.
C'était le bordel total. Les étagères, autrefois bien rangées, gisaient maintenant par terre, comme si un cyclone avait tout emporté sur son passage. Des pots cassés jonchaient le sol, éparpillant des herbes et des racines partout.
L'odeur qui régnait n'avait plus rien à voir avec les effluves florales qui flottaient plus tôt dans la boutique. C'était plutôt une puanteur de chaos et de dégâts. Les flacons qui trônaient sur le comptoir étaient fracassés, et des papiers déchirés traînaient partout. Les plantes qui pendaient du plafond étaient à moitié déracinées, leurs feuilles accrochées pitoyablement.
Je dépassai Jesca et entrai dans la boutique en faisant attention aux bouts de verre qui trainaient. Il n'y avait personne.
— Ether ? appelai-je.
Aucune réponse.
Je fis le tour du magasin à la recherche d'indices, mais ne trouvai rien de concluant. Il était évident qu'au vu des dégâts, il ne s'agissait pas d'un simple cambriolage. Après tout, j'avais déjà vu Ether à l'œuvre, elle n'aurait pas eu de mal avec de vulgaires squatteurs.
— Ether, tu es là ? appelai-je une seconde fois.
— Jaïna ! fit Jesca. Viens voir ça.
Jesca qui était accroupie se releva pour me montrer un filet de sang humide qui traçait un chemin vers l'une des fenêtres brisées. Elle me regarda avec panique.
— Tu crois que...?
Je serrai les phalanges en me penchant par la fenêtre. Des gouttes de sang s'éloignaient vers le centre ville. J'expirai profondément. Ether était avec Cosmo, ce sang ne lui appartenait donc pas forcément. Ce que je pensais pouvait sembler terrible, mais j'espérais que ce soit lui qui ait été blessé. Ou leurs assaillants tout au mieux.
VOUS LISEZ
T1 Jaïna : Renaissance
ParanormalJaïna est une jeune tueuse à gage, véritable machine à tuer entraînée à Odium, la nation du Feu. Après s'en être prise à un membre des huit familles siégeant à Specter, la nation du Vent, celle-ci se voit piégée, emprisonnée et accusée d'un génocide...