30. Septième ciel

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Mayce

- Qu'est-ce que tu fais là ? la voix d'Arwan me fait sursauter.

Depuis que nous sommes rentrés, entre guillemets, puisque nous nous trouvons dans la deuxième résidence des jumeaux, je fuis l'ambiance étouffante qui règne à l'intérieur de la bâtisse.
Neiya a failli perdre Wyatt mais il n'est pas tiré d'affaires pour autant. Elle lui a donné son sang, c'était censé le remettre sur pied en un clin d'oeil. Pourtant, les traumatismes en ont décidés autrement. Ils lui rendent son retour parmis nous plus compliqué que prévu.

- Tu lances des malédictions à tous ceux qui ont le malheur de croiser ta route ?

Je décide de l'ignorer, continuant de fixer l'eau qui ruisselle entre les cailloux. La rivière qui s'étend à mes pieds, traverse la forêt dans un agréable clapotis. La nature a toujours eu le don de m'apaiser, éclaircissant mes pensées des ombres du passé. Et c'est précisément ce que je suis venue chercher, un coin de paix.

- Je suis très triste pour l'écureuil qui va finir en brochette grillée. Oh ! Et ce pauvre petit chat sauvage, s'exclame-t-il horrifié, pointant du doigt un félin au pelage tigré qui chasse entre les troncs d'arbres. Neiya l'aimait beaucoup, je vais devoir lui annoncer la triste nouvelle.

Je rigole intérieurement, n'arrivant pas à résister à son petit cinéma. Ce qui me surprend. Depuis quand sa présence me donne envie de sourire ? Je me creuse la tête, revoyant tous nos moments. Impossible de déterminer celui qui a fait basculer notre relation de haine réciproque à ça.

Le malaise me gagne, je le dévisage. Je ne ressens plus qu'une douce chaleur mais aucune haine ne vient embraser mes veines. Je ne peux pas l'apprécier, si ? On a passé beaucoup de temps à devoir se supporter, on s'est sûrement habitué l'un à l'autre. Oui, ça doit être ça.
Peut-être que tu l'apprécies plus que tu ne le crois.

Notre relation a changé. Ce simple constat me terrifie, je décide donc de continuer de faire ce que je fais le mieux en ce moment ; faire semblant.

- Non, ne t'inquiètes pas pour eux, dis-je avec tout le sérieux du monde. Ma cible de prédilection possède des ailes. En tout cas, pour l'instant.

Il me détaille avec méfiance, semblant peser la véracité de mes propos. Quand il estime que rien n'est sur le point de lui tomber dessus, il prend place à côté de moi, allongeant ses jambes sur un tapis de feuilles mortes.

- Ta magie est revenue, pourquoi tu broyes du noir au lieu de l'utiliser ? demande-t-il, en me voyant continuer de déchirer une feuille morte du bout des doigts.

- D'où tu sors ce genre d'inquiétude ? Ça doit bien t'arranger que je ne l'utilise pas, soufflé-je.

Je n'oublie pas ce que sont les sorcières pour lui. Le silence qui s'est fait après mes dernières paroles est pesant. Arwan me fixe d'une drôle de façon, comme une génie ayant eu une idée folle. Son regard me déstabilise, je l'évite en me concentrant de nouveau sur ma feuille. Quand il n'en reste qu'un minuscule morceau, je la laisse tomber avant d'attraper ma prochaine victime. Je plonge la main dans le tas qui m'entoure, j'en ressors une immense feuille d'érable.
Comme c'est amusant !

Les feuilles de cet arbre symbolise l'amour et la loyauté. L'univers a un drôle de sens de l'humour...

- J'ai remarqué que tu ne contrôlais pas ton pouvoir de destruction. Les autres non plus, je me trompes ?

Qu'est-ce qui lui prend ? Depuis quand il s'intéresse à la magie ?

- Je n'en ai pas d'autres, répondis-je laconiquement.

- C'est ridicule.

- Je ne te permets pas de m'insulter ! m'emporté-je, vexée.

- Ce n'est pas ce que je voulais dire. Viens, m'intime-t-il en me tendant la main.

Il est étrange. Plus que d'habitude, en tout cas. Méfiante, je me relève quand même. La curiosité me pousse à comprendre ce qu'il a derrière la tête.

- Tes pouvoirs fonctionnent avec tes émotions, tu dois juste apprendre à les libérer. Que ressens-tu, là maintenant ? me demande-t-il en me sondant du regard.

- Un ennui profond, repondé-je avec toute l'honnêteté du monde.

Il m'arrache la feuille des mains pour l'envoyer valser dans les airs.

- Et maintenant ? insiste-t-il.

- De l'agacement, dis-je en le fusillant du regard tout en croisant les bras.

- Mmmh, je vois, dit-il simplement.

D'un coup d'épaule, ses ailes se déploient. Belles et majestueuses. Je suis époustouflée comme à chaque fois que je les vois. Elles m'inspirent une pointe de jalousie. Je m'imagine voler, arpenter le monde sans m'arrêter. Personne ne pourrait plus jamais m'enfermer, je serais libre. Pour toujours.

- Et maintenant ?

- De l'envie.

Agacé, il claque sa langue contre son palais.

- C'est de la peur que tu devrais ressentir.

Hein ? Dubitative, mes sourcils se froncent d'eux-mêmes.

- Personne n'a peur des belles choses, expliqué-je.

Il me fonce dessus, je m'attends à être percutée et plaquée au sol mais je décolle. L'impact me coupe le souffle, je reprends une inspiration au dessus de la cime des arbres. C'est époustouflant.

- Que ressens-tu ?

Il me dévisage alors qu'un sourire arbore mes lèvres.

- Du plaisir.

Il secoue la tête de droite à gauche, il est consterné par ma réponse sans que je ne comprenne pourquoi.

Le froid me frappe le visage alors qu'on continue de monter dans les airs. On atteint une hauteur vertigineuse, tout est splendide vu d'ici. Je tends la main vers les nuages, elle passe à travers. Je m'étends pour essayer d'en croquer un, j'y suis presque. Je vais réaliser le rêve de tous les enfants ! Ma bouche est sur le point de se refermer quand je bascule dans le vide. Un cri me déchire la gorge.

Arwan flotte sur place, ignorant ma détresse. Il a recommencé ! Ne le voyant pas bouger, la peur me submerge.
Il me semblait bien qu'il était trop gentil, j'aurais dû me méfier.

Il faut que je trouve où il veut en venir, le sol se rapproche dangereusement dans mon dos. Mes cheveux me cachent partiellement la silhouette d'Arwan qui flotte très loin au dessus de moi.
Il parlait d'émotions. Faire sortir mes émotions, c'est ça. Il voulait que j'éprouve de la peur et que je la libére pour débloquer ma magie. Une autre version de ma magie qui ne serait pas des flammes destructrices. Je n'en ai pas d'autres, justement. Je n'ai que ces flammes...
Je suis foutue !

Un cri s'échappe de ma gorge alors que l'impact est imminent. J'hurle son prénom de toutes mes forces, un choc m'arrête net.

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Le 17/01/2024

Hey !
Voilà enfin le trentième chapitre :)
Il m'a donné beaucoup de mal car j'ai voulu y introduire des éléments qui montrent clairement que Mayce est une sorcière. C'était pas si facile que ça au départ puis, petit à petit ça m'a semblé évident ☺️

Qu'est-ce que vous pensez qu'il se passe à la fin de ce chapitre ?

Love contrat Où les histoires vivent. Découvrez maintenant