Sans Nation

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"How insufficient is all wisdom without love."

Henry David Thoreau, Journals


            -Son nom est Hélios, c'est bien cela ? me demanda Lysandre, en prenant mon fils dans ses bras.

Ilyana venait de m'amener mon fils, puis elle était repartie sans un mot.

Je souris.

-Oui, Hélios.

Hélios gazouilla doucement, ce qui fit sourire Lysandre.

Ses yeux soulignés de khôl et ombrés de fard à paupières sombre brillaient. Il toucha délicatement le visage d'Hélios. Ce dernier le regardait, ses grands yeux clairs tout à fait éveillés.

-Il n'a pas hérité de nos yeux, fit-il remarquer, presque déçu.

-Non, mais il semble avoir en revanche la couleur des cheveux des Eléazar. Son père... son père les a plus clairs encore.

Quelque chose dans ma voix du interpeller Lysandre, car il détourna les yeux de l'enfant pour les poser sur moi.

-Ayaan Malkam.

Sa voix était douce, calme. Comme toute sa personne. J'avais grandi entouré de gens violents et dangereux. Il m'était étrange de me dire que ce garçon si paisible était de mon sang.

-J'ai fait des choix contestables pour arriver jusqu'ici, murmurai-je.

Il me prit la main.

-Tu n'as pas à t'expliquer. Jamais. À personne.

-J'ai menti toute ma vie, Lysandre. J'aimerais que notre relation soit basée sur la franchise et une confiance totale.

Il ne répondit rien, mais ses yeux violets détaillaient mon visage avec soin.

-Tu dois te demander comment j'ai pu être assez stupide pour me faire avoir, riais-je.

-Je ne pense rien de tel.

-Ma vie était rythmée par les mensonges, les ragots, les complots et les trahisons. J'étais la fille d'Azel Eléazar, cadette de la famille, considérée comme la plus belle femme de la Tour, bonne qu'à épouser un bon parti. Un très bon parti.

Je caressai la tête d'Hélios.

-Galaad et ma mère étaient mes tortionnaires, mon père devait m'aimer, un peu au moins, mais il ne l'a jamais laissé paraitre. Maria m'a élevée (je vis son visage s'illuminer d'intérêt).

-Comment était-elle ?

Il l'avait presque murmuré cette phrase.

Je souris malgré moi. Malgré la colère que je ressentais envers ma véritable mère.

-Maria Eléazar était l'espoir que la Tour attendait depuis longtemps. Intelligente, progressiste, pacifiste, charismatique et juste. Elle m'a apporté l'amour que je n'avais pas au sein de ma famille. Elle m'a conté les légendes d'avant, m'a soufflé l'Histoire avant la Tour, m'a éduquée, m'a transmis ses valeurs les plus chères. Elle m'a appris à me méfier des Malkam. D'Ayaan. Même s'il était le seul à être à peu près gentil avec moi. À l'époque je ne le savais pas, mais les Malkam et ma famille projetaient déjà de m'unir à Ayaan. Lui aussi le savait. Iris, Ayaan et Maria étaient les seuls à se soucier de moi. Chacun à leur façon, chacun pendant le laps temps qu'ils auront eu à mes côtés.

La Tour d'Ivoire - Tome 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant