- Deux soirées de suite, ça fait pas un peu trop ? Demande mon père en nous regardant par dessus son écran. Faites gaffe à l'indigestion.
- On essaiera de pas se gaver t'inquiète ! S'amuse Sawyer en se servant une canette.
Nous sommes tous rassemblés à la cuisine avant le dîner, mon frère essayant de convaincre notre père qu'il ne faut pas écouter Kate et nous laisse aller à ces soirées.
- Morgan ! S'exclame Kate, en continuant tout de même de touiller son plat. Ce genre de soirée finit mal en général ! Il va y avoir de l'alcool et sûrement de la drogue. Ça peut être très dangereux.
- Chérie, Sawyer est un sportif ... Il doit déjà être dépendant aux amphétamines. Et tu as vu à quel point Sasha est au ralentit, je suis persuadé qu'elle fume en douce, renchérit mon père avec un sérieux pas du tout approprié à ses propos. Je ne pense pas qu'un peu de tequila aggrave leur problème.
Notre belle mère pousse un grognement de frustration, je ne peux empêcher un sourire de se dessiner sur mes lèvres. Mon père pousse un peu trop le sarcasme et la nonchalance parfois. Je dois avouer que j'aurais du mal à supporter ce caractère poussé à l'extrême comme mon père. Mais Sawyer et moi connaissons parfaitement la jeunesse dissolue de nos parents. Avant de nous avoir, nos parents étaient de chaque festival, de chaque fête, de chaque concert et bourrés ou défoncés la plupart du temps. Tomber enceinte à forcer notre mère à devenir responsable, notre père y a trouvé son équilibre et son bonheur, contrairement à elle malheureusement.
- Quand la question se posera pour Heather et Harry, les choses seront différentes ! Se crispe Kate avec un regard noir pour son mari.
- Et bien nous en parlerons quand ce sera le moment. Pour l'instant on parle de mes enfants ! Dit mon père avec autorité.
Un silence lourd s'installe dans la cuisine, même les deux petits comprennent que lorsque notre père arrête de plaisanter, il vaut mieux se taire. Sawyer me lance un regard inquiet. Je sais qu'il pense la même chose que moi. C'est la première fois que notre père ose dire que Kate n'a pas voix au chapitre concernant notre éducation et même si je suis ravie de pouvoir faire ce que je veux, je trouve injuste qu'il lui balance ça sur le nez. Depuis son entrée dans notre vie, Kate nous a pris en charge comme si elle était notre propre mère. Elle n'a jamais fait de différence entre nous et ses propres enfants. Elle a même insisté pour qu'un testament soit fait dans le but que nous recevions la même valeur d'héritage que les plus jeunes en cas de décès de l'un d'eux.
Je sens la petite main d'Heather entourer la mienne. Un regard me suffit pour comprendre qu'elle sent parfaitement la tension qui s'intensifie.
- Pas la peine de vous disputer ! Soupire mon jumeau en se mettant à la hauteur de notre belle mère. Tu sais très bien que Sasha et moi, on n'est pas du genre à abuser. Tu peux nous faire confiance. Tu nous as bien élevé Kate.
En une phrase, mon frère vient de rendre sa juste place à notre belle mère. Elle se détend imperceptiblement et offre un pâle sourire à Sawyer avant de remettre son nez sur les casseroles, en silence. Ne pouvant pas vraiment offrir une défense pleine d'éloquence à Kate, j'attrape l'épaule de mon père et lui ordonne, d'un regard, d'aller s'excuser auprès de sa femme.
- On va se mettre en pyjama les petits.
Je prend mon frère et ma sœur par la main et part vers l'étage, non sans lancer un sourire encourageant à Kate, qui s'est tourné vers nous quand elle m'a entendu parler. Sawyer sur les talons, nous laissons nos parents régler cette querelle en toute tranquillité.J'en suis encore aux choix de ma tenue lorsque Kate entre dans ma chambre, les bras chargés de plusieurs housses de vêtements et d'une caisse qu'elle fait rouler à ses pieds.
- Tout ça était à ta mère, me dit-elle avec une émotion, que je ne parviens pas à deviner, dans la voix. J'avais tout gardé pour toi et il est temps que ça te revienne. Tu trouveras peut être ton bonheur là dedans.
- C'est la première fois.
- De quoi ? Demande-t-elle en relevant la tête vers moi, alors qu'elle ouvrait la caisse.
- Ma mère.
Je vois son regard se voiler de regrets, et d'une pointe de colère même et elle pousse un long soupir. Tendrement, je prends sa main pour lui faire comprendre que je sais ce qu'elle ressent mais encore une fois les mots m'échappent. Voyant ma bouche silencieuse ouverte, elle me dédie un sourire maternel.
- Tout ce que je sais d'elle c'est ce que m'a dit ton père. Elle vous aimait énormément mais elle était très malade et ...
Je la coupe d'un geste de la main. Je ne veux pas me rappeler tout ceci. Je ne veux pas que cette image atroce me revienne en mémoire car je la revois, à chaque fois, comme si j'y étais de nouveau.
- Tu es belle ... et je t'a.. je ... t .. t .. (Le son bloqué sur le « t » et le mot refuse de sortir de mes lèvres, ce qui m'arrache un grognement d'exaspération)
- Je sais Sasha, moi aussi je t'aime, conclut ma belle mère en me serrant contre son cœur. Bien ! D'après ce que j'ai vu, vous faites à peu près la même taille donc je suis persuadé qu'on va trouver de quoi faire de toi la plus jolie fille de la soirée.
Elle tire une robe noire de la caisse et me le tend en me disant de la passer. A peine ai-je enfilé le vêtement que je m'y sens terriblement à l'aise. C'est un tissu un peu épais, très élasthanne, qui épouse parfaitement mes formes rondes. Le col Carmen est assez haut et tombe parfaitement sur les épaules, sur des manches moulantes qui descendent jusqu'aux poignets. De chaque côté, sur les flancs, il y a des petits anneaux en fer qui forment un ligne jusqu'au fond de la robe, qui elle s'arrête au-dessus des genoux. Bien qu'elle est l'air toute simple, cette robe est très sexy.
- Tu es sublime, me dit Kate avec fierté. Une jolie queue de cheval et ton perfecto bordeaux feront parfaitement l'affaire. Les derbies à talons seront super avec.
- Merci.
La laissant s'éclipser discrètement, je reste devant le miroir à étudier mon reflet. Bien que Sawyer et moi ayons eu la même chevelure que notre mère, je suis la seule à avoir gardé les mêmes tâches de rousseurs qu'elle. Elles inondent discrètement ma gorge et mes bras et saupoudrent mon nez et mes pommettes, de manière adorable selon mes grands-parents. Mes yeux bruns clairs sont les mêmes que papa. En regardant de plus près, un souvenir de ma mère portant cette robe me revient en mémoire. C'était deux ans avant sa mort et nous vivions à Valence. Elle était encore une fois sortie avec des amis et était rentrée ivre à cinq heures du matin. J'avais surpris une violente dispute entre elle et mon père et lorsqu'ils m'avaient surpris en train de les épier, ma mère m'avait hurlé de repartir me coucher. En courant vers la chambre, je l'avais entendu dire à papa que même la nuit, il fallait que ces putains de gosses lui pourrissent la vie.
Prise d'un accès de colère, j'arrache la robe de mon corps et la jette sur la caisse avec violence. Je me saisie d'un jean slim noir délavé et d'un top long en dentelle noir et préféré opter pour plus de naturel avec mes rangers. Un ombré noir, un coup de mascara et un rouge à lèvres rouge foncé donne un éclat plus mature à mon visage et s'accordent parfaitement avec le choix de ma tenue. Je fais un chignon, effet mal coiffé, et le bloque avec une baguette de cheveux en métal argenté, laissant s'échapper les mèches de ma frange en dégradée. Ma seule fantaisie revient à ce perfecto bordeaux que m'a offert Kate un an auparavant, et que j'adore. En descendant avec Sawyer, je vois son regard s'illuminer d'une lumière fière et émue. Mon père nous scrute et valide ma tenue avec un hochement de tête.
- Couvre feu à 3h si vous voulez ressortir demain, ajoute-t-il en remettant son nez dans son bouquin.
- Ok, à demain les vieux ! Lance mon frère en m'entraînant derrière lui. Tu rejoins Caden sur place ?
Je hoche la tête en grimpant dans sa mustang, la même que la mienne.
- Tu es avec lui ? Demande Sawyer au bout de plusieurs minutes de route.
- Oui. Ça te dérange ?
Non pas plus que ça, c'est un gars bien, répond le jeune homme, toujours le regard vissé sur la route devant nous. Je veux juste que ça ne finisse pas comme avec le dernier.
Je déglutit péniblement mais préfère ne pas répondre pour éviter de relancer mon jumeau sur ce sujet.
En arrivant devant la grande maison d'Amber, je saisis immédiatement la différence entre les autres filles et moi. Elles portent toutes des robes plus belles les unes que les autres. Sawyer salue tout le monde tandis que je le suis en silence. Nous entrons dans un salon si grand qu'on pourrait y mettre notre ancienne maison en entière et mon regard se pose directement sur Caden, installé devant la cheminée, un gobelet à la main, entouré de Noah, et de deux filles. Il dédie un large sourire à l'une d'elle. Mes poings se crispent tandis que je sens la jalousie m'envahir. Sawyer m'attrape le poignet et me tire vers lui.
- Tu es toute aussi belle que ces filles Sasha, murmure-t-il à mon oreille. Tu es brillante, drôle et adorable. Tu es sa copine, contrairement à elles.
Sans lâcher Caden du regard, je me rends compte que mon buste et ma tête se sont relevés. C'est vrai, c'est avec moi que Caden est en couple. Je n'ai pas à me sentir inférieure à ces filles sous prétexte que je ne m'habille pas aussi sexy ou que je ne suis pas capable d'aligner plus de deux mots. Bien cachés derrière mes yeux sombres et ma mine froide, j'ai des atouts avec les mecs qu'elles ne pourraient jamais soupçonner.
Je fonce droit sur lui, un air de guerrière sur le visage. S'il a tenu à ce que je sois là, c'est pour être avec moi. Je me sens directement regonflée d'orgueil dès qu'il pose les yeux sur moi. Son regard brille d'une flamme intense et un sourire de bonheur se dessine sur ses lèvres. Il me tend le bras pour que je m'approche et dès que je suis près de lui, il m'attrape par la taille pour poser un baiser langoureux sur mes lèvres.
Mon corps tout entier vibre sous l'effet de sa langue qui joue avec la mienne pendant que sa large main glisse sur ma hanche. Je ne résiste pas à l'envie de me fondre un peu plus contre lui, me mettant sur la pointe des pieds pour intensifier notre baiser.
- Doucement, rit-il entre ses dents, sa bouche toujours contre la mienne.
Ma main trouve naturellement la sienne et je glisse mes doigts dans les siens en me tournant vers ses amis, un sourire assuré sur le visage.
- Salut.
J'aurais voulu que le ton de ma voix insuffle beaucoup plus de cette assurance qui est instinctivement la mienne. Hélas, j'ai appris à ne transmettre aucune émotion dans mes paroles pour réussir à ne plus autant bégayer.
- Je ne savais pas que vous étiez ensemble, grésille la voix insupportable de Jenna, avec une grimace amère sur le visage.
- C'est tout neuf ! S'exclame Noah avec un sourire lumineux.
- Je savais pas que ça, commence-t-elle en me désignant de la tête, c'était ton genre de fille. J'aurais dû tester les fringues de pute avant.
Je frémis sous l'insulte mais c'est Noah qui vient immédiatement à ma rescousse.
- Je crois que les putes portent plus des jupes ras le cul comme toi que des jeans, s'exclame t-il en riant. Notez bien que je n'en ai jamais vu personnellement.
- Je peux confirmer, crisse la voix métallique de Caden, jetant un regard dur à Jenna. J'ai baisé une pute qui portait la même jupe que toi.
Son ton est tranchant comme l'acier, son corps tendu à l'extrême derrière moi, je le sens prêt à lui sauter dessus pour lui arracher la tête. Le visage de Jenna se transforme en une grimace outrée, elle tourne les talons avec un sifflement de vipère, sa copine juste derrière. Je lance un regard à Noah.
- Merci.
- C'est rien ! Sourit le jeune homme. Moi je suis désolée, je n'aurais jamais dû agir comme ça avec toi. Toutes mes excuses.
- Merci.
- T'es vraiment pas bavarde. Je sais pas comment tu fais Caden, rit Noah. Mais peut être que tu es plus ouverte avec lui.
- Hum...
- T'inquiète pas pour moi vieux, ricane Caden dans mon dos en me serrant un peu plus contre lui. J'ai pas besoin qu'elle parle pour comprendre ce qu'elle a a dire.
Je me tourne doucement vers lui, mon bassin trouvant naturellement sa place contre le haut de sa cuisse.
Alors que la fête bat son plein, l'alcool coulant à flot, je me retrouve seule dans le fond du jardin, cherchant un peu d'air et de solitude. Je n'avais pas saisi qu'avoir une relation avec le mec le plus populaire de l'école voulait dire que je devais supporter les bavardages de tout le monde. En y réfléchissant bien, je trouve que Caden n'a rien de naturel quand ils parlent avec toutes ces personnes. Il a l'air vraiment heureux quand il est avec les mecs de l'équipe de crosse.
Respirant profondément l'air frais de la nuit, je m'affale contre un arbre et lève les yeux au ciel.
Quand j'y pense, je trouve ça extrêmement drôle de me retrouver dans une fête avec l'élite d'un lycée. A Monroe, les clans étaient encore plus scindés. Il y avait les autres et nous. Il y avait mon frère, ses amis et moi et les miens. Bien sûr je ne dis pas que j'ai fait les bons choix en allant vers eux mais il était avec eux, et j'étais attiré par lui comme un papillon par une flamme. Je me suis brûlée mais je m'en fichais car j'ai aimé la blessure de la brûlure.
C'est quand même bizarre qu'ici, tout le monde ait cru que j'étais une petite fille timide. C'est vrai que j'ai beaucoup de mal à ne pas bafouiller devant Caden mais les émotions fortes accentuent mon trouble du langage et Caden est une émotion forte à lui tout seul. Mon téléphone vibre dans la poche arrière de mon jean. J'ai plusieurs messages de Key et Lolye qui veulent savoir comment se passe la fête la plus en vue de l'année. Je prends quelques secondes pour répondre et range mon portable. Il vibre à nouveau, déclenchant un rire chez moi car je les imagine plaqués sur l'écran de leur téléphone comme deux concierges à la recherche de potins. En déverrouillant l'écran, je tombe sur un message de quelqu'un dont j'imaginais ne plus jamais avoir de nouvelles : « Tu vas finir par revenir un jour ». Le message aurait pu tout simplement être une question mais venant de lui, je sais que c'est une affirmation, presque un ordre. Sentant un frisson remonter le long de mon dos, j'efface immédiatement le message et repars le plus vite possible dans la foule, cherchant Caden ou mon frère pour penser à autre chose.
En fonçant vers la cuisine, ou j'ai laissé mon copain, je percute de plein de fouet, le mec qui était dans les bois avec nous, lorsque j'ai mis une raclée à Noah. Si mes souvenirs sont bons, il s'appelle Isaac.
- Désolée.
- Ça va ? Me demande-t-il en baissant la tête pour me regarder dans les yeux. Tu n'a pas l'air dans ton assiette. Quelqu'un t'a encore fait chier ?
- Non ! J'ai juste vu un fantôme.
Mon sourire de façade ne semble pas le rassurer pourtant il sourit lui aussi et se redresse. Il a l'air plus petit que Caden, pas aussi musclé, plutôt fin même mais athlétique tout de même. Ses cheveux bouclés chatains clair, ses yeux étincelants bleu et ses lèvres rouges lui donnent un air angélique, pourtant je sens au fond de son regard qu'il y a beaucoup de fêlure dans l'âme de ce garçon.
- Sûrement un ex, déclare Isaac avec un regard sérieux. Il n'y a que les ex qui nous font froncer les sourcils de cette manière.
- Et qui fronce les tiens ?
C'est un secret ... mais je suis sûr que tu gardes très bien les secrets vu que tu en as beaucoup, bien caché derrière ton joli visage innocent.
Mes yeux s'agrandissent sous la surprise d'être si facilement démasquée. Il se penche de nouveau à mon oreille et murmure un nom, me laissant la bouche grande ouverte. Je tourne un regard ébahi sur lui. Il hausse les épaules pour évacuer la moindre de mes questions.
- Et toi ?
- Un mauvais garçon.
- Tu as un faible pour les mauvais garçons apparemment, rit-il avec douceur.
- Caden est loin d'être aussi mauvais. Crois moi.
- Alors c'était vraiment pas un mec bien ?
- J'étais amoureuse ... et stupide.
- Ça va souvent de pair, soupire soudain Isaac en comprenant parfaitement à quel point c'est facile de manipuler une personne qui est amoureuse.
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Vices & Délices
Novela JuvenilQuand les délices deviennent des vices et que les vices deviennent des délices. Caden et Sasha ont a peine dix sept ans et pourtant ils ne peuvent pas résister à l'attraction qu'ils ont l'un sur l'autre. Il est beau et populaire, inaccessible pour...