👑 CHAPITRE 17 👑

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Une fois que le Prince eut regagné à son tour ses appartements, il se surprit à s'arrêter devant la table sur laquelle reposait les caisses contenant la correspondance de la Princesse. Il n'avait guère eut le temps, ni le loisir de s'attarder dessus dernièrement et pourtant, ce n'était pas la curiosité qui lui manquait que de découvrir ce que ces précieuses lettres pouvaient bien renfermer comme secrets. Une seule conversation avec Myriam l'avait éreinté et il se demanda alors comme Méryl avait pu, pendant toutes ces années, entretenir de telles relations sociales. Cela l'épuisait-elle autant ou était-elle juste dotée d'une nature plus sociable que lui ? Car oui, il l'apprenait encore, mais la conversation était effectivement un art dont certains codes lui échappaient encore complètement. Pourtant et à sa grande surprise, il estimait que ses divers entretiens avec la future Duchesse ne furent pas entièrement des catastrophes et que le pire avait sans doute été évité à plusieurs reprises, et ce, très certainement grâce à la franchise toute particulièrement bienvenue de son interlocutrice.

Myriam ne faisait pas dans la demie mesure et elle semblait dire sans crainte tout ce qui lui traversait l'esprit, un trait bien heureux que James appréciait chez elle. Il n'y avait ni sous-entendus gênants, ni détours, ni malentendus qui pourraient rendre la compréhension difficile, non, il n'y avait rien de tout cela. C'était juste un enchaînement de mots dont certains pouvaient se montrer particulièrement blessants tant ils étaient bruts mais c'était la seule chose que James pouvait espérer recevoir présentement.

Plus loin sur sa table de chevet traînaient encore les livres empilés par Romain. Du moins, une sélection car s'il l'avait écouté, celui-ci lui aurait ramené l'intégralité de la bibliothèque royale dans sa chambre, or la place manquait cruellement. Il les avaient feuilletés, mais ne les avaient pas encore lus. Pas tous. Il n'avait pas pu. Une fois encore, il aurait bien accusé le manque de temps, mais c'était simplement le manque d'envie tout court. Tout ça, la romance, les grandes déclarations, le soin dans les détails, ce n'était pas son univers à lui.

C'était son univers à elle. Rien qu'à elle. Et en s'y mêlant maintenant, il avait l'impression de le lui voler.

Qu'est-ce qu'il ne lui avait pas déjà prit ? Méryl réclamait l'amour avec un grand A et il n'avait pas su lui offrir. Son amitié était arrivée bien tardivement et quand enfin, à bout de nerfs, lassée de se battre pour des choses qu'elle méritait amplement, elle lui avait demandé sa liberté, il n'avait pas pu se résoudre à la lui concéder. Pourquoi ? Parce qu'accepter la seule et unique requête qu'elle lui avait demandée signifiait aussi faire face à l'échec qui le hanterait toute sa vie durant et cela, pour James, ce n'était pas possible.

Oh bien sûr que ses divers tuteurs, lors de son éducation de jeune homme, l'avait mit en garde sur la dureté de la tâche et sur le côté périlleux du mariage, mais à ce moment-là, à quinze ans, James empli d'orgueil, de fierté, de confiance, se voyait déjà champion. Qu'est-ce qui pouvait bien être difficile dans le fait d'épouser une femme, de lui faire un enfant afin qu'un héritier naisse et de vivre chacun au chevet de son propre bonheur ? S'il pouvait remonter le temps, il se giflerait lui-même. L'arrogance l'avait perdu bien avant qu'il ne franchisse les portes du palais royal et ce ne fut que bien plus tard qu'il réalisa son idiotie.

A présent, plusieurs choix s'offraient à lui : Continuer d'enquêter sur le décès de feu la Reine et les soudains piques de maladie de la Princesse. Reprendre là où Méryl s'en était arrêtée dans son affaire. Découvrir si Lola était réellement au palais cette nuit-là et si elle était mêlée de près ou de loin à son empoisonnement et enfin...Divertir sa principale invitée. De toute évidence, James ne pouvait être sur tous les fronts et mener toutes les batailles, mais il lui était encore possible de faire un choix et de sélectionner lesquelles il voulait mener.

- Vous avez demandé à me voir, Votre Altesse ?

Comme à son habitude, Romain était entré discrètement dans la chambre, tel un chat se faufilant ici et là, à sa guise. Il se tenait sur le pallier de la porte, les bras croisés dans le dos, presque au garde à vous et ce n'est qu'en le voyant là que James eut de nouveau en mémoire la conversation qu'il avait eu plus tôt dans la journée avec Madeleine Berneby. Romain lui cachait-il réellement la venue de sa cousine au palais ? Si oui, que pouvait-il lui cacher d'autres ?

- J'aimerais simplement savoir si tu avais été mis au fait des changements apportés concernant mon emploi du temps de demain ?

Non. Ce n'était pas la question qui lui brûlait les lèvres.

- J'ai cru comprendre que vous alliez déjeuner avec Mademoiselle Niver, oui. Des préparations spéciales doivent être faites ? Avez-vous des besoins particuliers dont je devrais m'occuper pour le déjeuner ?

- Non, à moins que tu puisses m'assurer une météo clémente étant donné que je compte installer le déjeuner dans les jardins, sous le patio, peut-être ?

- Sous le patio, Votre Altesse ? répéta l'assistant visiblement surprit, N'était-ce pas l'endroit préféré de Son Altesse Royale la Princesse ?

- Et donc ? Parce que mon épouse avait de l'affection pour certains endroits du palais je devrais éviter ces derniers et ne plus y mettre les pieds ?

- Ce n'est pas ce que je voulais sous-entendre et je m'excuse sincèrement si mes propos vous ont blessés, cela m'étonne, c'est tout. Jusqu'à présent et peut-être que vous le faisiez inconsciemment, mais vous ne vous rendiez pas dans ce genre d'endroits. Le patio, les jardins, la serre, l'aile du palais dédié à la Princesse...

- Eh bien peut-être est-il temps que tout cela change, non ? Je ne peux pas continuer à faire comme si certains endroits du palais étaient hantés par son fantôme. Certes, je ne peux pas nier le fait que j'ai parfois l'impression de sentir sa presence ou bien d'entendre son rire dans les couloirs, mais Méryl a fait ses...Méryl a fait ses choix et il est grand temps que je fasse le mien à présent.

- Puis-je savoir ce qui vous a soudainement décidé ?

Tout et puis rien en même temps. Peut-être étai-ce la dernière lettre reçue qui l'avait motivé ou peut-être était-ce une prise de conscience aussi brusque que soudaine. Il ne saurait le dire.

Il n'y avait, depuis un certain temps maintenant, ma plus grande amie pour James que cette incertitude constante.

- Je veux simplement pouvoir enfin faire les choses comme je l'entends. Toute ma vie durant, j'ai eu quelqu'un au dessus de moi : Mon père, divers tuteurs, ma mère quand ce dernier fut décédé et enfin le Roi. Toute ma vie, des gens étrangers à ma façon de pensée m'ont dicté quoi faire de ma vie et j'entends bien récupérer celle-ci, répondit le Prince, Donc tu excuseras sans doute le côté soudain de mes prises de décisions mais à mon tour, je désire être libre.

«Libre». Ce mot prenait enfin toute son importance. Autant James ne comprenait pas les prises de positions de Méryl, autant aujourd'hui il les réalisa. C'était sans doute trop tard pour changer quoique ce soit, mais il pouvait encore faire une chose pour lui-même : Aller de l'avant.

D'ailleurs, il ne le lui restait plus que cela. 

Prince Ascète - Tome 2 (PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant