6. Imparfaite à mes yeux

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Je sors de la salle de réparation, la boîte de macarons à la main.
Je vais voir June.
Non pas pour lui raconter qu'on m'a offert des gâteaux, parce que j'en ai fichtrement rien à faire.
Enfin en fait, je sais pas.
Je sais plus.
D'un côté, j'ai envie de lui en vouloir à cause de qu'il il est, de la famille dont il vient, mais d'un autre, j'ai envie de laisser tout ça derrière moi.
De laisser le passé pour une fois.

Mais je n'y arrive pas.
Je n'y arrive jamais.

Et j'avoue que cette petite attention m'a fait plaisir.

Je m'approche de June et lui tends la petite boîte qu'elle ouvre directement.

— Oh, des macarons, mais tu sais que je préfère ceux à la fraise Everly ?
— Je sais, mais ils ne viennent pas de moi.
— Alors de qui ?
— Ne t'en fais pas. C'est pour toi en tout cas.

Un sourire s'affiche sur mon visage lorsque je la vois en train de déguster ces petits gâteaux.
Mais il s'efface immédiatement lorsque je croise le regard de Sean, un peu plus loin.
Il met ses mains dans les poches de son jean et regarde le sol, en partant marcher ailleurs, me tournant ainsi le dos.

Je soupire et retourne la tête vers June.

— Tu as l'air...pensive, me dit-elle.
— Oh, oui, non, enfin ce n'est rien.
— Everly ?
— Non t'inquiètes, je t'assure, c'est juste que je n'ai pas mangé mon repas ce midi, je pense, j'y vais d'ailleurs.
— Mais, et les macarons ?

Je pars en direction de ma voiture pour rentrer chez moi, laissant un silence après sa dernière question.

J'ai dit que j'allais manger.
Mais ce n'est pas vrai.
J'ai encore menti. Et je m’en veux terriblement pour ça.

Pour être honnête, la nourriture et moi ne sommes pas de grandes amies. Nous l’avons certainement été, fus un temps mais plus maintenant.

C’est fou comme de simples paroles peuvent abîmer un corps et voler l’assurance d’une personne.

C’est simple, chaque matin, avant d'aller au collège, je prenais un petit déjeuner assez copieux pour tenir toute la journée.

Un jour où il faisait chaud, j'avais décidé de mettre un débardeur... C'était la pire erreur de ma vie.
Je suis arrivée au collège et Kinsey est venue me voir avec son groupe de moutons.
« Dis donc Everly, je crois que tu as un peu trop mangé ! » m'a-t-elle dit en rigolant.
« T'as de la graisse sale garce ! » « On t'a jamais demandé de te peser ? » avaient dit ses amies.

J'avais alors mis mes bras autour de ma taille pour ne pas qu'on voit mon ventre, j'étais gêné de mon corps. Mon corps.

Le soir, j'avais passé des heures devant le miroir à me regarder.
« Elles ont raison. » « Je suis trop laide. »
Je m'étais dis tout ce qu'un humain ne devrait jamais se dire.

Et puis le lendemain matin, je n'ai pas pris de petit déjeuner, à midi, je n'ai pas mangé, et le soir, mes parents étaient là alors je me suis forcée. Je me disais qu’en me privant de nourriture, je remplirais peut-être leurs critères.
Puis c'était le même scénario tous les matins.
Et au bout d'un certain temps, je suis arrivée au collège et me suis immédiatement rendue aux toilettes, là, j'ai vomi. Je me faisais vomir.
Je n'étais plus là petite fille avec un peu de graisse non, j'étais devenue celle qui n'en n'avais pas assez.

« Taille de guêpe ! » « Eh, t'as la peau sur les os ! » Ces filles trouvaient toujours quelque chose à dire, quelle que soit mon apparence. Quel que soit mon état.

À la maison, j'avais décidé de porter des joggings et des tee-shirts larges pour ne pas que mes parents voient mon corps.
Encore une fois, j'avais honte de moi.

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