Eve Princesse Révolutionnaire S3

Épisode 15 : Comédie musicale

« Un cadeau que m'offre la septième princesse ? »

Lorsqu'elle avait fini par réaliser de quoi il retournait, Sedella s'était précipitée au palais. Elle ne pouvait laisser les choses en l'état... Cependant Eve et Mikael étaient déjà partis pour la Forêt Ilimone. En attendant leur retour, elle était retournée « chez elle » et s'était soumise à contre-cœur aux soins diligents de ses nouvelles servantes.

Mais dès la fin du congé, elle s'était hâtée de reprendre son travail, dans les appartements de la princesse.

« V... Votre Altesse...

— Sedella ? Pourquoi est-ce que tu pleures ? Quelqu'un t'a contrariée ?

— C'est... C'est vous, V... Votre Altesse... »

Sedella avait oublié ce qu'elle voulait dire, à l'instant même où Eve était apparue dans son champ de vision. Le visage en larmes, elle s'était mise à sangloter et hoqueter, dans les bras de la princesse. C'était la toute première fois qu'elle perdait ainsi son sang-froid, elle qui avait toujours été le modèle de la camériste consciencieuse et pondérée.

« Tu... tu n'as pas aimé mon cadeau ?

— B... bien au c... contraire... »

Ne jouissant que d'un vieux château et d'une parcelle de terre aride situés dans une zone rurale peu fertile, la Maison Arpel n'avait de noble que son nom. La question de posséder une demeure en ville ne s'était jamais posée. En fait, sa famille n'avait même pas de quoi se payer un trajet jusqu'à la capitale, et y emménager aurait été tout bonnement impensable.

Cette pauvreté avait brisé les rêves romantiques de Sedella, qui ne pouvait qu'imaginer les merveilleux bals de débutantes, auxquels elle aurait tant voulu participer. D'ailleurs, plutôt que de la choyer comme leur précieuse fille, ses parents la considérait davantage comme une source stable de revenus, et ce n'est qu'après avoir été envoyée à la capitale comme domestique, qu'elle avait pu, pour la première fois, poser le pied au palais impérial.

Après avoir rencontré Eve, et être devenue sa camériste personnelle, elle avait accepté la vie de pauvreté que le destin s'évertuait à dérouler devant elle. La septième princesse avait si peu d'argent, que Sedella s'était vue dans l'obligation de prendre en charge, en plus de son travail normal, de nombreuses tâches normalement réservées à des servantes plus ordinaires. Mais elle s'était prise de sympathie pour sa jeune maîtresse, et participer à l'évolution de la fillette qu'elle était encore à la mort de sa mère, la voir mûrir malgré l'étiquette de paria qu'on lui avait collée, lui procurait beaucoup de joie. Et même si, Sedella devait l'admettre, Eve était parfois un peu trop inflexible à son goût, elle lui trouvait un bon fond et elle s'était dit que ce ne serait pas si mal, que de passer sa vie auprès d'elle. 

Elle s'était donc imaginée prendre soin, pour le restant de sa vie, de cette princesse qui occupait toutes ses journées, noyée dans ses recherches alchimiques. Et puis un beau matin, sans crier gare, le centre d'intérêt d'Eve avait basculé, et les changements drastiques qui en avaient résulté, avaient abouti à ce jour incroyable, où elle lui avait offert une maison dans la capitale. Et pas n'importe laquelle. Un hôtel particulier situé au sud de la rivière Ravello, un quartier bien connu pour les prix exorbitants de son parc immobilier.

Si un présent sincère pouvait réchauffer le cœur de celui qui le recevait, l'effet en était décuplé lorsque sa valeur atteignait ces sommets, et Sedella avait été submergée par la joie et la gratitude, lorsqu'Eve lui avait fait don de cette magnifique demeure.

« Sedella ?

— Oh... Oui, Votre Altesse !

— Eh bien, dis-donc... Il m'a fallu t'appeler trois fois, s'étonna Eve. Dans quelles pensées étais-tu plongée ?