8. La réplique de Pemberley

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Perséphone

Les sorties scolaires, c'est ce que je préférais. Et avec le Pays de Galle, j'étais servie en ce qui concerne les châteaux à visiter. Tout cela constituait pour moi une pré-visite avant d'habiter à Paris. Paris... Amir... Je ne devais pas y penser. C'est ce que je me répétais de plus en plus ces derniers temps.

Habibi... Habibi... Habibi

C'était tout nouveau pour moi, tout ça. Et tout ça, allait se terminer rapidement. Comme un rêve dont on avait l'impression qu'il s'était déroulé pendant une bonne journée alors qu'il n'avait duré qu'une trentaine de minutes. Le Printemps venait à peine d'arriver et on devait déjà se dire au revoir. Pourquoi ne nous étions pas connus plus tôt ? On aurait pu passer
beaucoup plus de temps ensemble à discuter, s'asseoir à la même table pour manger, faire nos devoirs à la bibliothèque, s'asseoir dans les gradins du terrain de l'école en discutant sans nous concentrer sur le match qui se jouait devant nous. Profiter des soirées organisées par
l'internat pour nous rapprocher.

Tandis que le bus scolaire traversait doucement la plaine verdoyante de la région, je me laissais plonger dans ce paysage qui était le plus romantique qu'il m'ait été donné de voir. Je
m'imaginais dans un de ces livres de Jane Austen.

Le bus arrivait devant l'imposant manoir de Braewood Castle voisin de notre école. Ceux qui étaient friands de sieste dans le bus devaient sortir de leur longue léthargie. Et ceux qui étaient déjà bien agités dans le transport devaient à présent se calmer sous le regard menaçant de nos trois professeurs accompagnateurs.

Tous les élèves de year thirteen devaient visiter le domaine avant la fin de l'année scolaire. Amir m'avait dit que sa classe le visiterait également aujourd'hui, mais dans l'amas des élèves en uniforme, je ne le distinguais pas dans la masse. Ni parmi les élèves qui descendaient des deux autres bus garés dans la cour du château.

Je n'eus pas le temps de contempler davantage le paysage ou de guetter la grande silhouette d'Amir que déjà les professeurs nous attiraient à l'intérieur pour commencer la visite.

Je n'en étais pas à mon premier château, mais celui-ci avait un je-ne-sais-quoi qui me poussait à m'évader encore et encore. La lecture avait toujours été pour moi l'évasion par excellence. C'était ma passion, sans pour autant oublier la vie réelle. C'est grâce aux livres que j'avais voyagé, compris le cœur de l'Homme, était tombée amoureuse pour la première fois... Enfin... l'idée qu'on se faisait de l'amour parce qu'avec Amir c'était loin d'être de la fiction.

Dans ce château datant du dix-huitième, j'étais dans mon élément. Carnet en main, tentant de
respecter scrupuleusement les consignes de mes professeurs. Nous étions par petit groupe en train de noter tout ce qui était important lors de notre visite. Je me surprenais à plus admirer ce qui m'entourait qu'à réellement prendre au sérieux ce devoir.

— On a fini pour ce couloir, lança alerte Alice, la meneuse de notre groupe de travail. On passe à la galerie des sculptures.

Sur des pas pressés, mais mesurés, nous rejoignîmes l'aile du château correspondante, croisant certains de nos camarades reconnaissables à leurs uniformes similaires aux nôtres. Pendant qu'Alice, Patty, Gloria et Jade descendaient les escaliers en trombe comme si leur avenir scolaire dépendait uniquement de cette visite,
moi, sans les perdre de vue, je flânais.

Je n'étais plus Perséphone Klolé, l'élève de dernière année de l'internat de Rosenward School. Non... J'étais Perséphone Klolé, certes, mais dans
une toute autre version. Cette nouvelle version de moi se superposait au personnage
d'Elizabeth Bennet. Je n'étais pas à Braewood, mais à Pemberley, découvrant la maison familiale du distant, froid et si déroutant Mr Darcy.

Un temps pour t'aimerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant