Chapitre 9

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ATTENTION: Ce chapitre contient une scène de viol et pourrait choquer certaines personnes.

Chapitre 9.

Accroupi sur la terre morne, Danaé toujours entre ses bras, Astarion s'efforçait de calmer la tempête qui déchaînait ses pensées. Malgré le fait qu'elle avait cessé ses pleurs depuis un certain temps, la femme se refusait encore à bouger, comme si l'étreinte dans laquelle il la tenait était la seule chose qui lui importait vraiment. Comment avait-elle pu songer qu'il aurait voulu l'abandonner alors qu'elle avait maintenant plus que jamais besoin de lui ?

Bien qu'il se doutait depuis un bon moment déjà que les sombres pulsions de la mage finiraient par la mener un jour ou l'autre à intenter à sa vie, il faut cependant avouer qu'Astarion n'était pas vraiment préparé à vivre la somme des émotions qui l'accablaient pour l'heure. C'est que, le temps d'un instant, il avait été à nouveau prisonnier de ses chaînes, le corps douloureux, ensanglanté... et le visage sanguinaire de son ancien maître était revenu le hanter.

Les échos de ses traumatismes qui l'avaient envahi, certes, mais aussi cet étrange sentiment qui lui terrassait la poitrine suite à la détresse de la femme. Au moment où il avait croisé les yeux vitreux de Danaé, il y avait entraperçu cette lueur de combativité qu'elle avait toujours dans le regard, et de la commotion qui l'affligeait avait surgi l'espoir. Lui qui, du plus loin qu'il puisse se souvenir, avait perdu l'habitude de l'empathie, le voilà qui était à présent accablé par le mal-être de cette créature qui avait tenté de l'assassiner, celle qu'il chérissait tout de même plus que sa propre personne. Malgré cette atroce douleur qui s'était emparée de son corps et de son âme à l'instant où elle l'avait torturé, jamais il n'avait senti son cœur ainsi dévoué à un autre individu. Curieusement, ce n'était pas sa peau qu'il avait voulu protéger alors qu'elle l'avait mutilée, mais plutôt cette intégrité que Danaé peinait à préserver jour après jour de tout son être.

Il faut aussi dire que la mage lui rappelait beaucoup l'esclave qu'il avait été, mais en beaucoup plus forte. Face à l'ampleur de la puissance qui la possédait, à aucun moment elle n'avait cessé de combattre. Bien évidemment qu'elle lui avait fait très mal, tant sur le plan physique qu'émotionnel, mais elle lui avait en outre épargné des souffrances qui auraient pu être encore plus atroces. En comparaison à ce qu'il avait été habitué de voir lors de ses autres crises, ce qu'elle lui avait fait subir n'était pas grand-chose. Et c'était surtout pour cette raison que les émotions qui envahissaient Astarion étaient aussi contradictoires : malgré le fait qu'elle l'avait replongé dans ses pires traumatismes, il avait une énorme admiration pour la force avec laquelle elle avait tenté de résister aux pulsions qui contrôlaient son corps et son esprit. Pas une fois en deux cents ans, il n'avait pour sa part été capable d'un tel exploit avec Cazador. Et contre toute attente, cela avait eu pour conséquence de renforcer davantage les sentiments qu'il éprouvait pour elle...

La proximité qui enlace peine et bonheur est à la fois malédiction et joie de vivre : le problème, c'est que la puissance des sensations est elle aussi enchevêtrée dans cette union, et l'élégie qui s'en dégage, cette grande plainte qui nous afflige devant cette absurdité de l'existence est si forte qu'elle nous terrasse d'une urgence de vivre. La chaleur n'a ainsi de sens que lorsqu'elle est portée par la matière, mais c'est la beauté du mystère qui repose derrière la vie organique qui rend la brûlure si vivement ressentie. Seulement, il n'y a pas que le feu ardent qui consume puisque, passé le point de congélation, le froid peut aussi brûler d'une intensité tout aussi dévastatrice...

Le grandiose de la chose, c'est qu'à chaque fois qu'Astarion avait l'impression d'avoir atteint l'un des plus hauts degrés de cette roue qui tournait sans relâche, toujours la chaleur de la femme parvenait à le rattraper pour lui faire oublier tout le reste. Était-ce cela que l'amour ?

UN LONG ET DIFFICILE CHEMIN POUR SORTIR DE L'ENFER.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant