Chapitre 12- Une journée longue et affreuse

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Farid déboule dans ma chambre comme s'il était chez lui. Il est pas 8h00 du matin. Il m'aura foutu la paix en tout et pour tout 24 heures.

- Allez bouge ton cul. Tu vas pas rien branler tous les jours.

- J'ai des hématomes partout. Sur tout le corps.

- Qu'est-ce que que tu crois ? Ils en ont rien à foutre. Les clients, c'est ta chatte qui les intéresse. Allez bouge toi.

- Donne-moi une journée de plus.

Farid se rapproche du lit. Je me recroqueville sous la couette, prête à encaisser un coup. Mais il se contente d'observer mon affolement avec un plaisir pervers.

- Bouge toi. Ne m'oblige pas à insister. Fais-toi des fix plus lourds, ça te motivera.

Il pose un sachet avec l'héroïne à l'intérieur.

Je l'insulte dans ma tête mais je ferme ma gueule, comme d'habitude. Il fait 1m85, soit plus de 30cm que moi. Je sais qu'il n'hésitera pas à m'en coller une, malgré mon état. Il sort de la pièce et je le suis, soumise et misérable. Dans le salon, Lilou et Samira grignotent en regardant des conneries à la télé. Farid va se servir un café en nous annonçant qu'on décolle dans 45 mn pour l'hôtel. Il y a des clients qui arrivent dès 9h. Des mecs du matin...

Je regarde mon téléphone et effectivement, il y a plusieurs messages. Farid gère les annonces, et donne nos numéros quand il s'est mis d'accord avec les clients. Il se fait passer pour nous, et passe sa vie à écrire des sms. Puis il demande à changer de numéro et ça passe en direct avec nous, pour les touches finales. Ca lui permet de contrôler le nombre de mecs qu'on voit et combien on gagne, à peu près. Farid a toujours peur qu'on garde du fric en douce. Et ça lui permet de nous faire bosser au maximum, là où nous aurions tendance à refuser les gros cons. Au milieu de tous ces SMS grossiers et crus, il y a celui de Thomas. Je le relis en me rendant à la salle de bains, même si je le connais par coeur.

"Ok pour ce soir ! J'aime pas les actions manquées. On va se le boire ce verre. Au Café Brun à 21h, ok ? Biz Thomas"

Je lui ai déjà répondu oui. J'ai mal partout, mais il est pas obligé de le savoir.

Farid a changé d'hôtel, mais nous sommes toujours dans une zone pourrie, et discrète. Il me laisse dans la chambre avec ma bouteille d'eau, mes petits-beurre, mon stock de capotes, mon lubrifiant et mes lingettes. Je mets mes mules à talons et ma nuisette transparente de salope.

Je me regarde dans le miroir de la salle de bains. Je me demande comment je peux faire envie à des mecs. Petite crevette maigrichonne aux traces de piqures visibles sur les bras. Mes ecchymoses zèbrent tout mon corps, surtout sur mes cotes et mon sein gauche. Et j'ai le visage légèrement gonflé.

"J'arive dans 15mn ok ?

Oui ok

Parfait jespere ke c bien toi sur les foto jadore les skinny

C moi juré"

Quelques minutes après, il arrive. Il est ravi de ce qu'il voit. Pas un mot sur mes bleus. Il me déballe sa queue et son gros gland violacé et, moyennement dur, s'enfonce dans ma bouche. Je sais que j'ai repris ma journée de pute.

J'enchaine les clients en serrant les dents. La moitié de mon corps est douloureux au toucher. Certains en ont conscience et sont délicats. Un me demande même comment je me suis fait ça. Je mens bien sûr. Cela ne l'empêche pas de me baiser comme les autres. D'autres s'en foutent. Les queues rentrent et sortent par mes trois trous. Farid est sans pitié. Les mecs se succèdent et je me shoote fort car c'est le meilleur des anti-douleurs.

Je regarde l'heure. La journée est interminable et affreuse. Quand à 19h30, le dernier mec gicle sur mes lèvres en me traitant de salope, je sais que le plus dur est passé. Je m'essuie tandis qu'il se rhabille. Il se tait. Il voit bien que je suis défoncée et en mauvais état. Il sait que ce n'est pas normal, son comportement. Ou alors si, c'est normal. Les hommes se comportent comme ça avec les filles comme moi. Je ne sais pas. Je n'ai plus l'esprit clair.

Le mec marmonne un « bye » et se casse sans demander son reste. Je me remets des vêtements confortables et je vais voir Lilou dans la chambre d'à côté. Elle aussi a terminé.

- J'ai la chatte qui me brûle. C'est de la merde, tout ce plastique !

Je suis d'accord avec elle. Elle m'observe et dit, super psychologue.

- T'as une sale gueule, Emmy. T'es certaine de vouloir voir ton type ce soir ?

- Oui carrément. Si je repousse encore c'est mort. Je vais pas me faire un gros fix, je veux pas qu'il me voit à la ramasse.

- Tu m'étonnes. Il doit pas kiffer les toxicos, un mec comme lui.

Samira nous rejoint. Elle est de mauvais poil. Elle a saigné un peu au niveau du cul. Encore le plastique le coupable ! On ne parle plus de Thomas. J'ai demandé à Lilou d'être discrète. Samira est mon amie, mais je ne sais pas ce qu'elle serait capable de faire pour améliorer son quotidien en brossant Farid dans le sens du poil. Je me sens un peu dégueu, de penser ça de Samira. C'est mon amie, et pour l'instant, elle ne m'a jamais trahi.

Farid nous ramène à l'appartement. Il prend sa part de thunes et il dégage. J'ai à peine le temps de me doucher et me préparer que c'est l'heure. Direction, le Café Brun.


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C'est cool de voir que vous lisez. C'est cool si vous m'écrivez, je réponds à tout le monde


Emmy, 19 ans, journal d'une prostituéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant