13: un, deux, trois, travail.

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Une semaine. C'était le temps qu'il avait fallu à Hakeya et Armel pour se détester profondément comme les gaulois et les romains.
Cette semaine avait été la plus longue et la plus harassante de toute la vie du jeune homme. La jeune patronne lui avait fait des coups bas tous plus infantiles à chaque fois. Il y avait eu le fameux coup du café sur la chemise, les envies de manger des plats qu'on ne trouve qu'au bout de la ville et surtout, les rédactions incessantes de rapports. On aurait presque cru que l'assistant n'avait été embauché que pour cela et cette situation énervait Armel qui adorait les travaux compliqués. C'est un peu fou à dire, mais il aimait se casser la tête en mille morceaux pour un projet, il adorait pousser ses réflexions le plus loin possible et le fait qu'on lui fasse faire des choses aussi banales, il le percevait comme une insulte.

Heureusement, la fin de la semaine était arrivée–avec son lot de travail bien sûr–et comme elle coïncidait aussi avec la fin du mois, il était allé chez sa mère pour le repas de famille comme à chaque fin de mois.
En effet, les enfants adultes et n'ayant plus le temps de rester avec elle tel qu'au paravent, Claire, la mère des fils Enkhozi, avait instauré une nouvelle tradition dans leur quotidien: le repas familial mensuel. Au cours de ces quelques heures les membres de la famille avaient l'opportunité de se voir, de discuter pleinement et donc de ne tarir aucun lien.
Alors en ce week-end, Armel se retrouvait chez sa mère avec son frère, Iraan, sa belle-sœur et sa nièce adorée.
Il manquait évidemment quelqu'un à l'appel mais disons que son absence avait fini par être comprise. Joachim avait choisi d'avoir ces responsabilités et il se devait de les assumer, même s'il devait être absent dans certains moments.

Pendant que les femmes préparait le dîner, assistées par le meilleur des commis, Ayana, Iraan et Armel étaient censés s'occuper des boissons. Cependant, les opérations de ce côté là prenait du retard car le cadet de la fratrie était scotché à son ordinateur. Iraan aimait énormément son petit frère, seulement, il trouvait qu'il en faisait beaucoup trop pour son âge. Armel avait toujours voulu être l'enfant parfait et c'était ce qu'il était même avant d'avoir prononcé ses premiers mots. Il réussissait brillamment tout ce qu'il entreprenait et ce, sans se soucier des conséquences de son acharnement. Petit, le cadet pleurait lorsqu'il obtenait un neuf sur dix, il hurlait de mécontentement lorsqu'on lui disait que telle ou telle chose était impossible d'être réalisé par ses mains et au final, il démontrait clairement qu'il était capable de tout faire, même l'inimaginable, tout en se privant de sommeil et adoptant un régime plus que bancal.

_Ça fait combien de temps que tu n'as pas dormi? Demanda Iraan en voyant les énormes poches sous les yeux de son frère.

Dormir? Il n'en avait pas le temps. Il devait être parfait, parfaitement assisté sa patronne alors si cela devait lui coûter quelques heures de sommeil, soit.

_Je dors très bien Iraan, répondit nonchalamment le cadet en restant rivé sur son ordinateur.

_Armel Baptiste Enkhozi, l'appela son frère.

Il se décida enfin à porter sur son frère un regard, un regard curieux. Iraan n'avait pas pour habitude de l'appeler par son nom entier mais lorsqu'il le faisait, la suite n'était que reproches et réprimandes.

_Ne me mens pas, je hais le mensonge, il dit le regard sévère, Ça se voit à des kilomètres que tu ne dors pas assez et tu me mens de la manière la plus idiote qui soit. Oh et on en parle de tes kilos en moins? On dirait un prisonnier d'Alcatraz, il ajouta en exprimant clairement son énervement.

_Je rejoins ton frère sur ce point, on dirait que tu n'es plus mon fils, dit une voix dont le cadet aurait pu se passer pour ce débat.

Il se détacha une seconde fois de son écran pour fixer tour à tour son frère et sa mère. Il ne dormait pas assez, c'était une évidence et ne se nourrir que de biscuits et de barres chocolatées avec juste un peu d'eau ne devait pas constituer une alimentation très saine. Pourtant, malgré tout cela, il ne pouvait pas se laisser faire et abandonner, il ne pouvait pas laisser la "pourrie gâtée" gagné la guerre. Jamais! Et pour couronner le tout, il avait besoin de cet argent.

_Je me surmene, c'est évident mais vous savez mieux que quiconque à quel point j'aime travailler et à quel point cet argent me sera utile, soupira-t-il, en réalité j'ai l'impression de jouer à un, deux, trois, soleil mais la version pour les salariés, il ajoute en baissant les yeux, fatigué.

_Tu joue à un, deux, trois, travail? Demanda la voix fine de Marcie.

_Exact.

Les membres de la famille se regardèrent, inquiets. Ils connaissaient l'importance que le cadet accordait au travail et le bénéfice de son salaire. Mais ils savaient aussi que s'il venait à quitter ce monde, la douleur serait létale.

_Je n'ai pas envie de perdre mon enfant, qu'importe la finalité, rugit Claire, désapprobatrice.

_Tu te souviens de Daniela? Demanda Iraan avant qu'il n'eût le temps de répliquer.

_La gabonaise? Questionna Marcie.

_Non, la congolaise.

_La claire ou la sombre? Demanda Armel.

_La sombre.

_Comment l'oublier, elle ne partageait pas! Dit Claire ce qui fit rire tout le monde.

_Selon les explications de son amie, chaque tribu en RDC a son comportement. Comme chez nous, les zulu sont des tueurs et cetera et chez eux, sa tribu est celle des radins.

_Tu veux dire que je suis radin? Le cadet s'empressa de demander.

_Non, en réalité, ils sont comme toi. C'est-à-dire que lorsqu'ils ont un projet en tête, il ne se soucient que très peu des autres ou d'eux-mêmes, exactement tel que toi en ce moment, il termine son monologue.

Ses reproches poussaient à réfléchir et pendant que le cadet examinait ses actes, une petite tête pleine de cheveux ondulés vint déposer un léger baiser sur la joue de son oncle et elle se mit à lui masser le coin des yeux comme lui le faisait pour l'endormir.

_Tu es beau quand tu dors, elle dit de sa voix fluette ce qui fit rire Armel.

Il referma son ordinateur et alla le déposer sur une étagère, loin de petites mains curieuses.
Il se chaussa alors pour accompagner son frère acheter les boissons pour la suite du repas, cependant, avant de partir sa mère le retint.

_Ton patron te donne trop de travail, n'est-ce pas?

Patronne, voulu-t-il corriger.

Pourtant il ne dit rien, il affirma juste que ce n'était pas grave et qu'il allait aller mieux.

_Têtu comme son père, maugréa-t-elle en retournant aux fourneaux, mécontente.

Armel ne tenu pas compte de ses paroles et suivi son frère pour aller chez l'épicier du coin, Oncle Rufus. Il avait toujours été là, depuis la plus petite enfance des garçons, les cachant de temps à autre lorsqu'ils fuyaient la fureur de leur maman. Il avait fourni à Iraan sa première bière et il avait aidé Joachim à trouver un bon bijoutier pour la bague de fiançailles de son épouse; il était aussi ouvert pour parler de tout et de rien avec chacun d'eux, il était presque devenu une figure paternelle.

_Armel, l'appela une voix et l'intéressé se tourna vivement vers celle-ci.

Son visage n'avait pas changé. Elle avait toujours les mêmes petits yeux tirés comme ceux des asiatiques, son nez était le même petit nez retroussé qu'elle avait enfant, son sourire laissait apparaître ses belles fossettes et sa peau sombre restait éclatante. Okoye, la nièce de l'oncle Rufus et une grande amie d'Armel–disons sa seule véritable amie–était assise sur le comptoir comme elle aimait tant le faire.

_La valkyrie, il souffla en venant l'embrasser.

_Je crois que je vais m'éclipser, dit Iraan en voyant les retrouvailles et silencieusement, Armel le remercia.

_L'intello. Ça faisait longtemps, soupira-t-elle en se détachant de son vieil ami.

_sept ans. Ça fait sept ans, Okoye, dit le jeune homme, sa voix se voulant neutre mais voilée par des reproches.

La valkyrie et L'intello, le retour des grands amis.
























































Amis? Amis?! Même moi l'auteur, je ne saurais dire s'ils sont amis ou non, en tout cas, il ne finiront pas ensemble. Jamais!

En attendant la suite, Kiss sur vous <3.


Un Soupçon d'amour Où les histoires vivent. Découvrez maintenant