Instinct [Maxime&Djilsi]

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— Mais comment c'est possible ?!

— Eh ! Déjà t'es pas obligé d'me juger, j'te dis que j'aime pas ça !

— Mais bien sûr que j'te juge, comment ça t'aime pas ? C'est littéralement notre plus gros avantage !

— T'appelles ça un avantage toi ?

— À quel moment c'est pas un avantage d'être jamais malade et de guérir une fracture en même pas deux jours ?

— Ah bah ouais, c'est sûr, c'est tellement discret en plus... Nan et puis c'est trop mal fichu, tu sens quand même la douleur ! Et imagine tu t'fais planter et tu retires pas l'truc, tu guérirais en boucle en te vidant de ton sang, trop pratique !

— Wah ! Mais c'est fou d'être aigris là-dessus !

— C'est toi qu'est dans le déni mon gars, c'est une fausse bonne idée ce bail de guérison ! Et laisse-moi goûter s'te plait, j'ai pas testé celle-là...

Le ton taquin de Maxime s'adoucit brusquement et son buste se penche en avant, délaissant son plateau encore bien garni pour s'intéresser à celui qui ne lui appartient pas. Sidjil s'esclaffe sans s'en cacher, n'ayant aucune peine à laisser couler le débat précédent pour se reconcentrer sur la bataille qu'il est en train de gagner.

Le petit restaurant dans lequel ils sont attablés est légèrement trop étroit, un peu trop bondé, et bien trop cher pour sa formule libre-service, pour autant, Sidjil est bien content de sa trouvaille. L'enseigne « smokehouse » choisie au hasard sur le net répond parfaitement aux attentes qu'il s'était fixé pour leur diner en tête à tête. L'ambiance Texane qui décore la salle est un peu convenue, quoique chaleureuse, et le menu déborde de viandes fumées qui embaument le lieu au point de le faire saliver. Et puis, le restaurant est juste assez décontracté pour les mettre à l'aise, laissant passer leur diner pour une expérience de plus dans leur programme du jour, et pas pour un rendez-vous amoureux trop évident... Pas que Sidjil s'en serait plaint.

À vrai dire, il préfère ne pas trop en faire et s'assurer que Maxime reste détendu à ses côtés, même après leurs dernières confessions, même après leurs derniers rapprochements. Et puis, il est bien trop heureux du spectacle qui se joue devant ses yeux pour se préoccuper du reste.

Les loups sont carnivores. C'est un fait plutôt connu, un régime alimentaire qui va de pair avec leur profil de prédateur, l'animal étant assez opportuniste pour se nourrir de grands cerfs, de bétail ou de petits herbivores. Alors forcément, en tant qu'espèce cousine à la leur, les lycanthes sont plus ou moins concernés par le phénomène.

Ce n'est pas qu'ils sont carnivores eux aussi, loin de là. Dans leur cas, c'est surtout une question de préférence. S'ils n'ont aucun problème à manger des légumes, des féculents ou des snacks plus ou moins bons pour la santé, il est évident que manger de la viande, quelle qu'elle soit, vient chatouiller le côté plus animal de leur physionomie. En bref, manger de la viande a quelque chose de profondément grisant. C'est un acte qui réveille en eux une satisfaction viscérale, primaire, qui flatte leur part animale dans sa forme la plus pure. Une satisfaction que Sidjil est ravi de faire redécouvrir à Maxime.

Il était presque assuré de gagner sur ce point-là, mais sa victoire en reste particulièrement enivrante.

Maxime n'a pas encore clairement admis la chose, mais tout est déjà dit. Sidjil voit comme l'agacement taquin dont il se parait avant de diner s'est envolé, comme ses petites bouchées cachent son appétit vorace, comme son envie de tout goûter révèle ses instincts carnassiers. Maxime et lui discutent d'anecdotes, de points de vue, d'avantages et de défauts, tandis que leurs plateaux-repas se vident à vue d'œil. Ils en finissent un chacun avant d'aller se resservir, Sidjil notant sans le mentionner comme la moitié de sa portion disparait dans la bouche de l'autre garçon, trouvant une satisfaction nouvelle dans ce partage forcé auquel il se plie avec joie.