Contes de fées pour petits et grands

La lamentation de l'Île d'Emeraude

 Il était une fois, dans une terre mystique connue sous le nom de l'Île d'Émeraude, où l'herbe était plus verte que tout ce qui était connu, il existait une tristesse qui planait lourdement dans l'air. Les feuilles d'émeraude chuchotaient des secrets au vent, et les rivières chantaient des airs mélancoliques en coulant à travers les vallées. Les habitants de ce royaume enchanté étaient accablés par un chagrin qui semblait suinter du sol même qu'ils foulaient.

Au cœur de l'Île d'Émeraude se dressait un chêne ancien, dont les racines noueuses s'enfonçaient profondément dans la terre. La légende disait que cet arbre détenait la clé de leur salut : une mélodie perdue qui pouvait guérir les cœurs brisés, apaiser les esprits tourmentés et soigner les blessures visibles et invisibles. Mais la mélodie avait disparu depuis des siècles, laissant derrière elle une douleur qui résonnait à travers les collines et les vallées.

Dans une modeste chaumière nichée au bord de la rivière vivait une jeune fille nommée Elowen. Ses yeux étaient de la couleur des feuilles d'émeraude, et ses cheveux coulaient comme le courant de la rivière. Elowen possédait un don : la capacité d'entendre les chuchotements de la nature. Elle écoutait le bruissement des feuilles, les murmures des ruisseaux et les cris lointains du vent. Pourtant, malgré son don, elle ne parvenait pas à trouver la mélodie perdue qui hantait ses rêves.

Une nuit éclairée par la lune, alors qu'Elowen était assise près de sa fenêtre, la rivière entonna un air mélancolique. Ses notes étaient comme des larmes tombant sur les rochers. Elowen ferma les yeux et laissa la mélodie l'envahir. Elle ressentit la douleur de chaque créature de l'île : le cerf blessé, le renard solitaire et la veuve en deuil. Et puis, au milieu de la tristesse, elle entendit un écho faible – un fragment de la mélodie perdue.

Déterminée à découvrir la vérité, Elowen se lança dans une quête. Elle remonta la rivière, à travers des forêts denses et des vallées enveloppées de brume. En chemin, elle rencontra des créatures magiques : les farfadets espiègles dansaient dans les rayons de lune, les sages vieilles chouettes gardaient des secrets anciens, et les nymphes aquatiques insaisissables pleuraient la mélodie qu'elles avaient perdue.

Alors qu'Elowen gravissait les collines d'émeraude, l'air se raréfiait, et les arbres chuchotaient avec urgence. Elle atteignit le sommet, où se dressait le chêne ancien, ses branches s'étendant vers le ciel. Elowen posa sa main sur l'écorce rugueuse, sentant le pouls de la terre sous ses doigts. Elle ferma les yeux et écouta.

Le vent lui porta la mélodie – un refrain obsédant qui parlait d'amour, de perte et d'espoir. Elowen chanta, sa voix se mêlant au bruissement des feuilles et à la chute lointaine de la cascade. Le sol trembla, et le chêne ancien frémit. Soudain, l'arbre se fendit, révélant une chambre cachée à l'intérieur de son tronc.

À l'intérieur, baignée d'une lumière éthérée, se trouvait une harpe de cristal – l'instrument même qui avait autrefois contenu la mélodie perdue. Elowen en pinça les cordes, et les notes résonnèrent à travers le pays. Les rivières dansaient, les fleurs s'épanouissaient, et les cœurs des habitants s'élevaient. L'Île d'Émeraude pleurait des larmes de joie alors que la mélodie apaisante se répandait loin et large.

Elowen devint la gardienne de la harpe de cristal, veillant à ce que sa chanson ne s'estompe plus jamais. Elle la jouait lors des mariages, des naissances et des funérailles, insufflant à chaque moment sa magie. Ainsi, la tristesse qui avait tourmenté l'Île d'Émeraude se transforma en une nostalgie aigre-douce – un rappel de la beauté qui pouvait surgir de la douleur.

Et ainsi, cher lecteur, si vous vous retrouvez un jour à errer à travers des prairies d'un vert émeraude, écoutez attentivement. Vous pourriez bien entendre les faibles notes de la mélodie perdue – la lamentation de l'Île d'Émeraude – portées par le vent, vous rappelant que même dans la tristesse, il y a de l'espoir.