Chapitre 1

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Nathalie

-Maman, ça fait du vent, hein !

La voix mi-anxieuse, mi-fascinée de mon bambin retentit dans l'habitacle. Il est 7 :30, il fait encore nuit noire et il pleut des cordes sur notre trajet en voiture vers Assas. A cela s'ajoute un vent phénoménal qui, je le sens, est à deux bourrasques de faire virevolter ma Twingo. Encore un kilomètre comme ça et on finira les quatre fers en l'air !

-Oui, dis donc, t'as vu ça ? Ouuulala, dis-je en tentant de ne pas trahir mon angoisse.

Mon petit Lio vient d'avoir cinq ans. Depuis sa naissance, je m'efforce de l'éduquer avec bienveillance et positivité et ce n'est pas trois coups de vent qui vont venir ruiner tous mes efforts. A peine ai-je pensé cela qu'une rafale oblige ma voiture à faire un écart et m'arrache un cri.

-AAAAaaaaalouhetteuh, gentille alouetteuh...

Je reprends le cap et jette un coup d'œil dans le rétroviseur. Mon fiston me regarde une seconde inquiet avant de se prendre au jeu et chanter avec moi en se dandinant sur son siège-enfant.

J'allume la radio pour suivre la météo, dans l'espoir qu'ils annoncent la fin de la tempête.

« Zone orange dans les départements de l'Hérault... »

L'Hérault ?! Mais c'est nous ça !

« Il est vivement recommandé de ne prendre la route qu'en cas de nécessité absolue »

Emmener mon fils à l'école et défendre ma cliente face à son pervers de chef, on est d'accord, c'est une nécessité absolue ! Non ? Quand je vois les arbres au loin danser la java, je me pose maintenant la question.

Je baisse le volume de la radio, comme si cela allait m'aider à mieux voir la route. Les essuie-glaces balayent rageusement le pare-brise et me donnent un semblant de visibilité. La départementale dépourvue de trafic m'indique que mes compatriotes ont préféré écouter les conseils de Catherine Laborde. Bon sang, j'aurai dû vérifier la météo avant de partir. Je me fustige : Nath, toujours écouter Catherine Laborde avant de partir !

Un SUV me double à vive allure, imperméable aux intempéries, et je me décide à appuyer sur la pédale d'accélération. Plus vite on sera arrivé, mieux ça vaudra. Je jette un coup d'oeil sur mon tableau de bord qui m'indique que je suis encore bien en-dessous de la limite lorsqu'une ombre massive vient nous surplomber puis un arbre vient s'écraser sur le capot de ma Twingo, m'arrachant un cri de terreur et nous projetant mon fils et moi vers l'avant. Je ne vois maintenant plus qu'un ramassis de feuillage et la carrosserie rouge de ma voiture pliée en deux.

-Mon chéri, ça va ?!

Lio me regarde hagard avant de hocher lentement de la tête. Je tâtonne son visage et son petit corps frêle mais il n'a pas l'air blessé, juste un peu secoué.

-Un arbre nous est tombé dessus, dis donc. Quel vilain ! m'exclamé-je, pas du tout sereine.

-Oui, méssant l'arbre ! répète mon fils.

Sous le choc, le moteur de ma titine s'est brusquement éteint. Les mains tremblantes, je réenclenche la clé. Ma Twingo cahote avant de de nouveau s'éteindre. Par pitié, pas maintenant, ce n'est vraiment pas le jour ! J'insiste encore et encore mais en vain. Je n'ai pas le choix : si je veux nous sortir d'ici, je dois appeler de l'aide.

Je bénis mon oncle d'être dépanneur et m'empresse de chercher son numéro dans mon portable lorsque je distingue des phares nous éclairer depuis la voie d'en face. Ouf, au moins, nous ne sommes pas seuls ! Une silhouette munie d'un parapluie sort du véhicule qui s'est maintenant arrêté face à nous et s'avance vers nous tout en luttant contre le vent. Je distingue alors un homme d'une quarantaine d'années scruter dans notre habitacle avec inquiétude. Je m'empresse d'ouvrir manuellement ma vitre, la pluie battant maintenant mon visage et m'obligeant à plisser les yeux.

-Ça va, vous n'avez rien ? s'enquiert l'homme.

-Non, nous ne sommes pas blessés mais ma voiture ne démarre plus.

-Venez à l'abri dans ma voiture, me propose-t-il.

-Merci, c'est gentil.

Je me tourne alors vers mon fils pour lui expliquer la situation. Je m'apprête à sortir mais lorsque je tente de faire un mouvement, je réalise que mon pied est bloqué. Sous le poids de l'arbre, l'avant de la portière niveau conducteur s'est repliée sur ma cheville, la maintenant coincée contre la pédale d'embrayage. Je ne ressens pourtant rien, mon corps certainement encore en proie à l'adrénaline. Je tente de m'en dégager mais impossible de m'en dépêtrer.

-Vous me suivez ? me presse le type.

-Je... je ne peux pas, je... mon pied est coincé ! paniqué-je.

L'homme se pince les lèvres et se penche pour tenter de voir ce qui me bloque à travers ma vitre ouverte. Il essaie de m'aider à me dégager mais en vain.

-J'appelle les pompiers, dit-il aussitôt.

Je m'affale contre mon siège, dépitée. C'est une catastrophe... et ma cliente qui m'attend à la cour.

-Maman ?

-Oui, mon chéri, j'ai juste un petit problème mais les pompiers vont venir nous aider, ne t'inquiète pas, d'accord ?

-Ouaiiiiiiii, les pompiers ! Les pompiers !

Je souris nerveusement face à son enthousiasme. Au moins un qui ne perd pas le nord. Depuis sa plus tendre enfance, mon fils voue une passion sans égale pour les hommes et les femmes du feu. J'ai beau lui faire jouer à un peu de tout : kit médical, Barbie, voiture de police, lego... il n'a d'yeux que pour Djeco PinPon.

Après avoir raccroché, l'homme m'informe que les pompiers sont en route.

-Je vais mettre votre fils à l'abri dans ma voiture.

Il s'apprête à ouvrir la portière côté passager mais je l'arrête.

-Non, je... je préfère qu'il reste avec moi.

L'homme, d'abord surpris, se résigne puis se poste de nouveau à côté de moi. Je ne veux prendre aucun risque, surtout après ce qui s'est passé il y a deux ans.

Les minutes s'égrènent. 7 :50. Si les pompiers viennent maintenant, j'ai encore une chance d'arriver à l'heure pour le jugement de Courbier. Ce fils de chien ne s'en sortira pas cette fois. Cela va faire cinq ans que je tente de l'envoyer derrière les barreaux. Trois de mes clientes ont porté plainte contre lui pour harcèlement et agression sexuelle, sauf qu'évidemment, le peu de preuves collectées n'a pas suffi à le culpabiliser et aujourd'hui, je m'en vais lui tirer les verres du nez... enfin, si je sors d'ici à temps. 


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Fin du chapitre!

Alors, que pensez-vous de notre héroïne? Un poil "speed", pas vrai? Et ce n'est que la facette aimable de cette avocate intrépide! 😏

Dans le prochain chapitre, qui sera publié la semaine prochaine, vous découvrirez Dan, un vaillant pompier qui va venir à sa rescousse, pour son plus grand plaisir... Ou pas! 😁

J'espère que ce premier chapitre vous a plu! N'hésitez surtout pas à me faire vos retours si quelque chose vous fait tiquer ou à voter si vous avez adoré 🥰

A très bientôt!

Nina

ConsumésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant