ANIL : CE QUI DOIT ÊTRE SERA

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— Dépêche-toi ! On va être en retard ! cria un grand jeune homme au crâne rasé.

— C'est de ta faute ! Tu ne m'as pas réveillé à temps ! lui répondit en courant Anil, un autre garçon d'une tête de moins.

Les deux amis étaient surexcités ; c'était le jour de la Cho-Ga, autrement dit la journée la plus importante de l'année. Essoufflé, Anil prit tout de même le temps d'admirer les décorations ; toute la cité était décorée de bannières rouges et dorées annonçant l'évènement. Des lanternes colorées étaient suspendues sur tous les toits extérieurs du temple, rehaussant les couleurs déjà multiples de la bâtisse.

Accroché au sommet d'une falaise à plus de 3000 mètres d'altitude dans l'Himalaya, le temple semblait dater d'une autre époque. Il avait été construit sur plusieurs étages et comportait à chacun d'entre eux des toits en pagode. Ses couleurs avaient terni au fil des années, mais le bâtiment avait néanmoins conservé toute sa splendeur.

Anil avait grandi ici, parmi les moines Tibétains, tout comme son ami Sonam. Ils avaient l'habitude de l'altitude et de constamment monter ou descendre pour se rendre quelque part. Mais aujourd'hui, le souffle coupé par le stress, il leur était plus difficile de grimper les marches quatre à quatre.

Ils arrivèrent en retard au centre du temple ; le gong de départ avait déjà sonné et le cortège avait avancé, traînant derrière lui les musiciens. Heureusement, les deux amis connaissaient les montagnes comme leur poche et empruntèrent un raccourci pour atteindre facilement le sommet. Ils se faufilèrent parmi les tambours et les cymbales puis rejoignirent la foule l'air de rien.

Les moines présidaient le cortège, faisant flotter au rythme de leurs pas des brûles-encens en or. Une fois le sommet atteint, ils se stoppèrent et entonnèrent des chants Tibétains. Le reste de la population avait les yeux fermés et joignait ses mains vers le ciel dans une sorte de prière commune.

Le soleil était haut dans le ciel, et malgré de nombreux nuages, ses rayons se reflettaient sur les montagnes environnantes. De ce point de vue, on pouvait admirer la chaîne de l'Himalaya, avec ses nombreux sommets enneigés de différentes hauteurs. Si l'on baissait les yeux, on apercevait le vert des milliers d'arbres habillant les pentes abruptes. Au loin, la neige fondue s'écoulait en ruisseau le long des montagnes et terminait sa course dans des cascades impressionnantes. Le paysage était à couper le souffle, et même si Anil l'observait tous les jours, il en était toujours abasourdi. À leur gauche, une paroi d'environ dix mètres se dessinait pour présider véritablement les cieux.

C'était le moment, la Cho-Ga allait démarrer.

Anil s'était entraîné toute sa vie pour ce moment. Il était plus petit que ses pairs, mais néanmoins agile, et il grimpait sans peine sur les plus hauts sommets environnants. Sonam était plus athlétique et remportait haut la main toutes les épreuves de force, ce qui lui conférait un sacré avantage pour la cérémonie.

Les onze disciples se rangèrent en ligne. Ils étaient classés par âge : Anil se retrouvait en dernier, alors que Sonam était deuxième. Il n'aimait pas ça. L'attente était longue et il savait que si le soleil perdait trop d'altitude, il serait désavantagé. Le très estimé Tashi se présenta devant ses disciples d'un air grave ; depuis leur enfance, il les avait préparés pour cet instant. Il était un druppa, un mentor. Le temple en abritait plusieurs : un pour chacune des six factions.

Les aînés étaient majoritaires dans deux factions : les bâtisseurs, qui géraient tous les travaux, réparations et constructions, et les nourriciers, qui cuisinaient les repas et s'occupaient des enfants en bas âge.

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