DON : CELUI-CI NE BRILLE PLUS

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Don n'avait revu Chad qu'au moment du dîner. Il avait retrouvé le sourire et interpella son ami quand il entra dans le réfectoire :

— Donni ! Je t'ai gardé une place !

À sa table mangeaient cinq autres personnes, ce qui fit grimacer Don. Désireux de prévenir son ami qu'ils allaient devoir partager leur chambre, il se força à prendre la parole devant les autres. Son nouveau rôle de babysitter n'eut pas l'air d'affecter Chad, qui haussa les épaules et continua à manger son risotto.

— Tu le savais ?

Il pouffa et lui répondit la bouche encore pleine de riz.

— J'ai eu la vision cet après-midi, tu vas passer deux jours merveilleux !

Don réprima un frisson. L'idée de sacrifier sa solitude pendant tout ce temps l'angoissait de plus en plus.

— Je les emmène où ? Je ne sais même pas par où commencer...

— Dortoir, bibliothèque, jardin, salles de classe. Simple et efficace. Benjamin est plutôt satisfait.

— Benjamin ?

— Le nouveau directeur, Monsieur Rentaï. Mes parents ont travaillé avec lui et on a déjà partagé des repas, quand j'étais enfant. Ses mioches n'étaient pas encore nés, donc je ne les connais pas. À part dans mes visions, bien sûr, ajouta-t-il avec un clin d'œil.

Ils en étaient au dessert quand le colosse se pointa. La petite fille semblait plutôt excitée de partager ces deux prochains jours avec Don, contrairement au garçon qui restait accroché aux jambes de son père. Ce dernier le réprimanda.

— On en a déjà parlé, Ulysse. Au Suloeste, tu seras livré à toi-même. Ici, tu as la chance de pouvoir te préparer à cette situation. Profite-en.

Le petit opina, les yeux baissés. Don en eut mal au ventre. La posture d'Ulysse lui rappelait la sienne lorsqu'il était entré à l'Académie, seul et terrifié. Lui n'avait pas eu droit à des journées de visite pour s'acclimater. Compatissant, il s'agenouilla pour être au niveau du garçon et, avec sa voix la plus douce, tenta de le rassurer.

— On va bien s'amuser, Ulysse. Je te montrerai toutes les cachettes de l'école et on se moquera de Madame Mims ensemble, OK ?

Nouvel hochement de tête. Elisa prit place à côté de Don, détendue. Benjamin était déjà en mouvement lorsqu'il salua sa progéniture.

— À dans deux jours, les enfants. Profitez bien !

Don craignait que l'ambiance devienne gênante, mais Elisa ne laissait aucune place aux temps morts. Elle noyait de questions toutes les personnes capables de l'entendre.

Plus tard, Don emmena les enfants visiter les dortoirs, les douches communes et la salle de repos.

— Cette salle est pleine de jeux, vous pouvez y aller quand vous le voulez pour vous changer un peu les idées. Bon, ici, il n'y a pas grand monde qui joue... Mais peut-être que dans votre école, ce sera différent.

— Moi, j'adooooore les jeux, surtout ceux avec des plateaux. On joue beaucoup dans mon école et je gagne toujours. Kole dit que je triche, mais c'est n'importe quoi, moi je suis pas une tricheuse, je suis juste plus maline, c'est ce que papa dit toujours et...

Les paroles d'Elisa sonnaient à l'oreille de Don comme un bruit de fond, impossible à éteindre, mais duquel on finissait par s'habituer. Ulysse, lui, n'avait toujours pas ouvert la bouche. Don l'observa, se demandant s'il était muet ou seulement timide. Le visage d'Elisa apparut subitement dans son champ de vision.

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