Partie 2 | Noisette (8)

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Chapitre 8

Cheveux noirs frisés, yeux chocolat aux reflets arc-en-ciel, pommettes roses à peine visible, peau sombre, oreilles légèrement décollées pourvues d'anneaux d'or blanc.

C'était lui.

Âgé de quelques années de plus et haut d'une trentaine de centimètres supplémentaires. Je l'avais revu entre-temps, mais l'image de mon souvenir correspondait toujours à l'époque de notre adolescence. Comment ça se faisait, qu'il se tienne devant moi si tôt ? L'avait-on alerté de ma venue ? Non, il paraissait tout aussi stupéfait que moi.

— Q-Que les Déesses soit avec toi, Noisette. Récitai-je, en clignant des yeux.

— Oh, Miel, salut. Dit il, sans réciter les paroles rituelles ce qui m'étonnait qu'à moitié.

Puis il y eut un silence pesant. Je n'osais rien dire de peur, de me rendre à l'évidence, que mes sentiments n'avaient pas changé. On s'était retrouvé lorsque je revenais à Erion pour voir ma famille, mais ce n'était pas pareil et on n'était pas seuls tous les deux.

Il était habillé de couleur, pas de rose fluo comme Paella, mais d'une chemise et d'un jean bleu marine. Notre couleur. Pourquoi en dépit de ce que je lui avais fait, portait il cette encore couleur ? Pourquoi ne m'avait-il pas effacé de sa vie ? Mon regard se porta alors sur mon bracelet. Moi non plus je n'avais pas pu. C'était trop douloureux, comme ce vide, ce silence. Son regard suivit le mien.

— Il est beau, pas vrai ? Tout comme la personne qui l'a choisit. Lança-t-il avec un sourire qui me fit plus de bien que tout le feu que contenait le soleil terrien.

Je souris à mon tour et me détendis quelque peu.

— En fait, je cherche Carle. Il est de sortie ? On pourrait se promener en attendant son retour, comme au bon vieux temps. Déclara-t-il avec espoir, les yeux brillants comme mille étoiles.

Il était pareil à avant. Comme si rien ne s'était passé. Il m'avait pardonné. Mais ce n'était pas une bonne nouvelle, nous ne devons plus jamais revivre ces émotions, si intenses. C'était dur, mais le meilleur pour nous deux.

— Non, Frère Carle est malade. Et, heu, je le remplace, pour quelques semaines. Répondis-je, les yeux rivés sur le sol.

Le regarder dans les yeux était comme se faire envoûter, parfois, j'en venais à conclure que c'était de la magie. Sauf que ça n'existait pas, notre amour ne devrait pas exister.

— Ah, ... Commença Noisette, visiblement embarrassé. Zut, alors. Tu le remplaces dans toutes ses taches ?

— Oui. Pourquoi tu as besoin de nos services ? L'interrogeai-je, en fronçant les sourcils.

— Heu, n-non... Enfin, je veux dire, oui. J-Je dois passer le test avec les bougies, tu sais. C'est mon patron, enfin futur patron, il ne me fait pas vraiment confiance. Alors il ne m'embauchera que si j'obtins une couleur, soit disant, noble (noir ou blanc), ou du violet ça passe encore.

Je compris. J'avais tellement passé de temps avec lui que j'aurai pu le deviner rien qu'à son regard, ses mimiques, ses gestes. Comme une sorte de fusion. Noisette devait passer le test de noblesse d'esprit, pour devenir agent de police. Pour son père.

Ce n'était pas là son choix, mais le poids de l'héritage familial. Sauf que je connaissais bien mon ami, il était la personne la plus incroyable du monde, l'amour de ma vie, mais il n'était pas des plus honnêtes. Le pire était de le passer devant moi, ça risquerait de modifier la couleur. Et si par ma faute, il obtenait du rouge ? Couleur de la passion, de l'amour et de la violence.

Je croisai son regard et je réalisai qu'il n'avait jamais eu l'intention de passer le test dans les règles. Jusqu'à maintenant. Noisette ne tricherait pas devant moi, car il ne voudra pas me créer des ennuis. Je le savais, il était comme ça. C'est ce que j'appréciais chez lui, cette dévotion pour ceux qu'il aimait, savoir s'adapter et mettre de côté ses ambitions pour le bien d'un autre.

— Ah, ... Très bien. Repasse demain, je suis arrivé il y a quelques heures à peine et je ne me suis pas encore installé. Dis-je en désignant mon sac posé au sol, au pied de l'hôtel.

Gagner du temps et réfléchir, voilà ce qu'il fallait faire. Et puis c'était vrai que je devrai aller poser mes affaires.

— Alors je t'emmène manger une glace, je suis sûr que tu n'as pas pu trouver meilleur à Black City que chez Julie, glaces artisanales. Me proposa Noisette, retrouvant sa bonne humeur.

— C-C'est que j-je dois poser mon sac et tout...

Je mourais d'envie d'y aller. Mais je ne pouvais pas, sinon tout nos efforts pour vivre selon les normes seraient anéantis.

— Allez, ce ne sera pas long. Ça fait si longtemps qu'on n'a pas fait un truc rien que nous deux. Insista-t-il, avec ferveur.

— Mais...

— Je ne veux rien savoir, tu m'as trop manqué, on file ! Me coupa Noisette.

Il me regardait avec un air suppliant. Toi aussi, tu m'as manqué, mais je ne peux pas, c'est pour ton bien crois moi.

— Non ! M'écriai je, fermement avec violence et en réprimant un sanglot.

Dérouté par cette réaction soudaine, il repartit avec une tristesse palpable. Je le regardais, le cœur brisé et dès qu'il fut sorti, je craquai. Les larmes coulant à flots de mes yeux comme les jours de pluie terrienne. J'avais blessé l'être le plus cher à mes yeux. La culpabilité s'empara de moi, les règles et les mots de mon ami se mélangèrent.

Le vif de la passion est un pêcher.

« Notre amour est au-dessus de tout. »

Deux hommes en couple, c'est contraire à la nature.

« Notre amour est au-dessus de tout. »

Les Fils des Déesses doivent être entièrement dévoués à ces dernières.

« Notre amour est au-dessus de tout. » 》

Je pleurais en silence, seul et désespéré. Pourquoi les règles étaient ainsi faite ? Pourquoi y avait-il fallu que je tombe amoureux alors que notre relation était illégale ?

— Oh, Grande Déesse des Ténèbres, protectrice de la partie de l'Ombre du territoire, pourquoi ? J'ai prié chaque matin, aidé mon prochain alors pourquoi moi, pourquoi nous ? Murmurai-je, avec une tristesse plus grande que toutes les planètes de l'univers.

Je savais que c'était indigne de ma profession de demander de telles choses, mais c'était plus fort que moi. L'impuissance qui s'emparait de moi, suffit à me faire m'effondrer à même le sol. Je n'en pouvais plus.

Trop compliqué de chaque jour se lever le petit matin un sourire aux lèvres. D'apparaître heureux, de se convaincre intérieurement que tout allait bien. Et dire que j'avais cru y parvenir. Sans lui, ma vie n'en était plus une. Et je savais que de voir à nouveau la déception apparaître sur son visage, me déchirerait le cœur.

Alors pardonnez moi Déesse Amaya, mais j'allais le faire. Pour lui. Pour nous. Si ce n'est pas d'une relation amoureuse que nous vivions tant pis, si elle pouvait au moins être amicale.

Tome 1 : Miel | Un Monde Incolore Où les histoires vivent. Découvrez maintenant