Dans les malles aux vêtements, Noisette choisit une chemise à carreaux noir et blancs, et un pantalon large. Pour lui, ce serait plus facile de se fondre dans la masse, mais Paëlla et moi, avec nos cheveux de couleurs, nous étions reconnaissables.
Au début, je voulais mettre une nouvelle belle robe, mais Noisette me conseilla une tenue de sport, blanche rosé. Je gardais mes lunettes. Je me démaquillais avec tristesse. Finis le maquillage bling-bling, passons à quelque chose de plus sobre. Je me détachais les cheveux, car ce chignon travaillé ne serait pas une grande aide pour se camoufler.
Je me fis alors une queue-de-cheval. Pas question de mettre une perruque. Les rouquins ne courraient pas les rues, mais ce n'était pas un crime de posséder les cheveux de cette couleur.
— Heu, Miel, j'adore tes cheveux et leur couleur flamme, mais non ! C'est trop dangereux, ne prend pas de risque et met une perruque. Me conseilla, Noisette d'une voix ferme.
Je soupirai. Mais Noisette ne reviendrait pas sur sa parole, et nous ne pouvions pas nous permettre le luxe de perdre du temps à nous disputer. Je retirai alors les rajouts avec l'aide de ma sœur qui semblait bien s'y connaître en mode et en coiffure.
Puis je choisis une perruque brune, et tressé mes "cheveux" à l'aide de Paëlla. Cette dernière avait lavé ses cheveux pour en faire partir sa coloration et maintenant, ils étaient d'un blond platiné très réputé. Elle avait aussi opté pour une tenue simple et sportive. Ainsi déguisés, nous étions prêts à chevaucher Frégate vers le palais de la Reine Paelia.
Mais un détail me revint en mémoire. La chatte ailée ne s'était jamais rendu en demeure royale. Et ni Paëlla, ni Noisette, ni moi ne connaissions le chemin depuis un endroit si éloigné de notre ville natale.
Mais c'était ce qu'il y avait de mieux à faire se diriger au hasard jusqu'à une ville, là-bas, nous obtiendrons sûrement des renseignements et pourrions reprendre la route.
Je pris les rênes. Non seulement, car Paëlla n'avait pas le permis, mais aussi, car mes deux amis étaient trop mal en point pour conduire. Ce voyage à dos de créature magique, leur permettrait de se reposer.
Au bout de deux heures de vol, nous atteignîmes un village du semi-monde blanc. Aucune idée sur son nom. En-tout-cas, il semblait y faire bon vivre.
De la vue aérienne, je distinguais un pâté de maisons et une grande place centrale qui monopolisait l'activité des habitants. Il n'y avait pas d'écurie, de toute façon si j'avais voulu laisser Frégate aux soins d'un propriétaire, j'aurai dû présenter mes papiers.
Je nous fis atterrir dans une forêt de fleurs géantes, situé pas loin de la ville. L'endroit pouvait paraître enchanteur avec ces fleurs : des Yulisols, mesurant trois à quatre mettre de hauts, les larges pétales faisait penser à des bouts de nuages (terriens) et les tiges à des bambous, fines et élégantes.
Frégate se posa alors au pied d'un yulisol. Elle aussi avait besoin de repos après la lutte et le voyage. Ses paupières se faisaient lourdes. Nous la laissions se reposer, tandis que nous nous dirigeâmes vers le village.
Je proposai à Noisette de s'appuyer sur moi, car il lui était difficile d'avancer avec sa jambe estropiée. Et puis c'était une bonne occasion pour respirer son doux parfum. Nous trouverions peut-être un guérisseur, qui pourrait aider mes amis à se sentir mieux.
En pénétrant dans le village, je reconnus l'odeur du pain frais. C'était un petit village paisible comme je l'avais deviné. Les maisons étaient faites de tiges de yulisols et les toits recouverts de pétales de ces fleurs.
Ce n'était donc pas là un riche village, les villageois utilisaient la forêt alentour pour subvenir à leur besoin. D'un autre côté, ainsi, ils ne dépendaient pas de leur capital White City.
Nous ne croisâmes pas grand monde en chemin. Lorsque nous arrivâmes à la place, je fus surpris par ce que je vis. Des créatures aux bras écailleux, à la peau translucide, aux oreilles pointues et aux doigts griffus bavardaient gaiement avec des humains. Le monde dont Zilla rêvait, Voyageurs et Hommes cohabitant sans haine, ni insultes. J'aurais tellement voulu qu'elle voie ça de ses propres yeux. C'était magique.
— Il me plaît bien, ce village. Affirma ma sœur. Enfin, sans ces racistes !
— Tu penses qu'il n'y a pas d'homophobes non plus ici ? Me glissa Noisette.
Je haussai les épaules. Le mot « homophobe » appris dernièrement dans Astrologie et amour dans une autre galaxie, me paraissait toujours étrange. Rejeter les couples contre-nature n'était que suivre la Loi, alors pourquoi inventer un terme pour discréditer les personnes ayant peur des relations comme Noisette et moi.
Même si je me demandais bien de quoi ils avaient peur ? De se faire contaminer. Non, l'amour n'était pas une maladie. Alors de quoi ? De l'inconnu ? De la rébellion ? Que plus personne ne fasse d'enfants sur cette planète ? Non, c'était absurde.
Pourtant, les Lois avaient un sens. C'était normal de vouloir perpétuer l'espèce humaine, logique d'empêcher les gens de vivre dans la passion, oubliant leurs responsabilités. Alors pourquoi croiser le regard de Noisette me faisait regretter ces pensées ? Pourquoi j'avais l'impression de bien agir en partageant mes sentiments avec mon petit copain ?
— Hé, vous ! Nous héla un Voyageur.
Il était de petite taille, portait un chapeau de tige/bambou et avait des cheveux rose framboise, court et emmêlé. Il devait avoir une vingtaine d'année terrienne. Je ne l'avais même pas entendue approcher tant j'étais plongé dans mes réflexions.
— Vous m'avez l'air exténués. Continua-t-il. Vous devriez aller voir Madame Helga, elle pourra s'occuper de vos blessures. Mais d'abord présentez vous. Moi, je m'appelle Kyoto et vous ?
Noisette répondit pour nous trois :
— Je suis Gus. Ma petite amie se nome Gwen et voici Grace. Mentit-il, avec toujours le même calme.
Ce n'était pas vraiment un mensonge, plutôt un jeu de rôle. Nous avions pensé que nous nous ferions repérer trop facilement en utilisant nos noms, donc nous avions choisit des pseudonymes, tirés des livres de Naelle.
— Nous venons du semi-monde noir et une affaire importante nous amène dans le coin. Ajouta Paëlla/Grace.
C'était là la vérité. Sauf que personne ne devait apprendre de quelle affaire importante, il s'agissait.
— Moi, je voyage avec le groupe. Ici, c'est notre point d'escale le plus fréquent, car comme vous l'avez vu, les humains de ce village n'ont pas de préjugés. Ils sont habitués à notre présence et nous à la leur. Si seulement cela pourrait être de même de partout. Déclara le Voyageur, en soupirant.
C'était étrange que j'ai jamais entendu parler d'un tel village. Mais ça semblait irréel. Comme si tout ça était trop beau pour être vrai. Je chassais ces pensée méfiantes car les Déesses voulaient qu'on accorde notre confiance à quiconque qui ne l'avait pas trahi.
Quand soudain... Un affreux mal de crâne comme si je venais de recevoir un coup sur la tête. Puis plus rien, le noir total, plus un bruit hormis un son aigu discontinu. Mes sens avaient terni jusqu'à pourrir et disparaître. Incapable de bouger, mes muscles me lâchèrent, je m'écroulais sans ressentir de douleur suite à ma chute. J'aurais préféré avoir mal, car tel un fantôme déjà mort, j'étais là sans être là. Coupé du monde, sans aucune communication. Petit à petit, les effluves sylvestres se brisèrent dans l'air qui passait à travers mon corps plutôt que de le couvrir.
J'aurai dû pouvoir touché, effleurer, ce sol terreux. Pourtant non. Mes pupilles écartelés, j'étais aveuglé. C'était donc ça la mort.
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Tome 1 : Miel | Un Monde Incolore
FantasyDans un planète lointaine, Miel, un serviteur loyale de la Déesse Amaya vit dans un monde sans couleurs. Au sens littéraire du terme comme au sens figuré. Les constructions comme les coutumes vestimentaires visent à promouvoir le noir et le blanc...