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Lorsque George rejoint la salle de bal, quelques pas après les frères Evans, Victoria était en train de quitter la pièce, accompagnée par sa mère qui l'entourait de son bras. Elle semblait bouleversée.
- Victoria ! s'exclama George en accourant vers celle-ci. Allez-vous bien ?
- Oui, merci Votre Majesté. J'ai simplement besoin d'aller me reposer, dit Victoria en lui souriant, afin de paraître convaincante.
- Bien, je comprends, répondit George, sceptique.
Prenez soin de vous, dit-il en posant une main réconfortante sur l'épaule de Victoria.
Amelia et sa fille le saluèrent puis quittèrent la salle de bal, suivies des frères Evans.
La semaine qui suivit, Victoria ne participa pas au bal organisé par la haute société. Elle avait entendu des domestiques de la maison que des rumeurs circulaient à son sujet.
Il faut dire que le départ précipité de lord Treck avait suscité de nombreuses questions, et la présence de Victoria dans les jardins ce soir là commençait également à faire jaser.
- Irez-vous au nouveau bal royal ce soir ? questionna Amelia.
- Oui, j'irai...
- Ne te force pas Vic. Si tu as besoin de temps on te comprend... dit Ethan.
- Non. Je ne peux pas rester cachée entre ses murs éternellement. Je sais ce qui s'est passé ou non, je ne vais pas me laisser détruire par ces... rumeurs... à mon sujet.
- Comme tu voudras, répondit William.

Palais Saint-James, 7 novembre 1761, bal royal.

George était assis, comme à son habitude, sur le trône qui présidait la salle de bal.
- Vous n'allez pas danser ? demanda la princesse Augusta.
- Non.
Elle marqua une pause avant de poursuivre :
- J'espère qu'elle viendra... Elle est le diamant, elle ne peut manquer un bal royal.
- Elle a d'autres choses à gérer en ce moment, répondit sèchement George.
Sa mère le regarda avec un air interrogateur.
- Si vous tenez à sa réputation, faites taire les rumeurs à son sujet.
- Vous seul êtes le roi.
- Et je fais taire ce que je peux. Je vous demande seulement de faire de même.
- Vous semblez en savoir plus que moi sur ces rumeurs.
George ne répondit pas.
- Pourquoi étiez vous également dans ce jardin, George ? Pourquoi cet homme a-t-il fui la société ? insista la princesse douairière.
- Sachez seulement que rien de ce qui a été dit sur elle n'est vrai. Son honneur est irréprochable, affirma George.
- Qu'avez-vous fait bon sang ?!
- J'ai défendu une demoiselle d'un être répugnant ! Vous devriez être fière !
- Je le suis, mais vous passez bien trop de temps dans les jardins. Vous allez finir par compromettre votre honneur à vous aussi... Pourquoi diable vous entêtez-vous à la suivre ?
- Parce que c'est mon amie, répondit George, implacable.
Victoria fit son entrée dans la salle de bal royale, en compagnie de sa famille.
- Sur ce, je vais de ce pas la rejoindre.
Il se leva de son trône et partit accueillir Victoria.
Celle-ci lui adressa une révérence, à laquelle il répondit avant de lui tendre la main.
- M'accorderez-vous cette danse ? questionna-t-il.
Victoria acquiesça d'un signe de tête et le suivit sur la piste.
Certains regards méprisants étaient tournés vers elle, et elle savait assurément pourquoi.
- Vous allez nuire à votre réputation en dansant avec moi... dit-elle.
- Ma réputation est déjà bien établie, ne vous en faites pas pour moi, plaisanta George.
Victoria lui accorda un sourire timide.
- Je ne pourrai jamais avoir honte de vous, Victoria.
Celle-ci sentit son cœur se réchauffer. Cela faisait du bien de pourvoir compter sur quelqu'un dans la société, autre qu'un membre de sa famille. Elle était heureuse que George ne l'ait pas renié.
Elle lui sourit davantage.
- D'autant que je vous ai aidé dans votre quête de vengeance mesquine, si je dois vous le rappeler.
- Ce qui a chassé mes prétendants, par ailleurs, rit Victoria.
- Je me dédouane de toute responsabilité pour cela, plaisanta George.
- Ceci dit, vu ce qui se dit sur moi dernièrement, les prétendants auraient fini par fuir dans tous les cas, commença à plaisanter Victoria, à son tour.
George avait réussi à ramener un peu de bonne humeur et de plaisanterie entre eux. Il ne voulait pas qu'elle s'apitoie sur son sort, elle ne méritait pas cela.
- Vous m'avez moi, dit celui-ci en la regardant dans les yeux.
- Je vous ai vous, affirma Victoria qui soutenu son regard.
- Venez, dit-il en la tirant par la main, hors de la piste de danse.
- Que faites-vous ? Que vont-ils penser ?
- Peu importe. Ils pensent déjà que je suis un libertin et vous déshonorée, rit George.
Victoria le suivit en riant de plus belle.
Il entreprit de lui faire une visite guidée du palais, afin de profiter davantage du calme. Ils passèrent par l'orangerie, la galerie des arts, la chapelle, en bref, partout sauf dans la salle de bal.
Puis George l'entraîna dans l'herbe, proche des jardins, où ils s'allongèrent côte à côte, en regardant les étoiles.
- J'aime les étoiles, dit George. Quand je vois toutes ces constellations, alors que nous ne sommes que de ridicules points dans l'univers, cela me rappelle que je ne suis pas réellement important, même si je suis roi. Elles me rendent humble.
- Ça ne doit pas toujours être facile pour vous d'être le roi, dit Victoria avec compassion.
- Vous plaisantez ?
- Non, je suis sérieuse.
Cela sembla surprendre George, qui n'avait pas l'habitude qu'on se soucie de ses sentiments.
- Tout le monde vous traite comme si vous étiez exceptionnel, et attend beaucoup de vous. Croyez moi, je sais à quel point cela peut être épuisant de toujours devoir...
- Paraître parfait, dirent-ils en même temps.
Victoria se mit à rire.
George ne pouvait s'empêcher de la contempler. Elle était si belle lorsqu'elle riait, cela lui réchauffait le cœur.
- C'est la première fois que je parle à quelqu'un qui me comprend vraiment. Et qui me vois et m'apprécie tel que je suis, en tant que personne, et non pas en tant que roi...
- Vous êtes une personne, pour moi, dit-elle.
George tourna la tête vers elle et lui sourit.
Avec elle, il se sentait complet.
- Je suis heureux de vous connaître, Victoria.
- Moi aussi, Votre Majesté.
- Avec vous, je me sens plus... libre.

My heart calls your name Où les histoires vivent. Découvrez maintenant