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Harry

La pendule accrochée au mur du salon se balance dans un rythme régulier. Elle est en forme de chat, car ma mère adore cet animal. Le bruit infernal de sa queue qui frotte la tapisserie, bien qu'il soit minime, commence à me rendre fou. Ses grand yeux jaune, à la fois hypnotisant et terrifiant, semblent me juger d'un air hautain. Je regarde l'animal d'un air de défi. Je me concentre sur la régularité du mouvement pour faire abstraction de toutes les discussions animées autour de moi.

Les enfants me frôlent en jouant. Je balade mes yeux sur leurs sourires contagieux. Ils s'amusent avec les jouets qu'ils ont reçut ce matin du père noël. Je les envie un peu. Un petit sourire triste se glisse sur mes lèvres en cette journée où tout le monde est censé être heureux. Quelques souvenirs me reviennent en tête en reprenant une gorgée de chocolat chaud. Avec les garçons on avait l'habitude d'aller jouer l'après-midi chez Niall avec nos cadeaux. C'était les beaux jours. Sa mère avait fait des cookies et du thé. Elle laissait pour nous des couverts le soir, sachant bien qu'on risquerait de rester pour le dîner. A cette époque on était pas préoccupé comme maintenant, on passait toute l'après-midi à jouer avec insouciance sans compter les heures.

C'était beau toute cette innocence, toute cette joie, tous ces Noël qu'on attendait avec impatience alors que maintenant ça ne signifie plus rien.

A l'autre bout de la table, mon père me scrute. Il ne dit rien. Pour lui aussi, rien n'est plus pareil. J'ai l'impression d'être assis autour d'une table d'inconnus que j'ai aimé, il y a longtemps. Je réponds machinalement aux questions qui sont les mêmes tous les ans, mais personne n'écoute. Tous mes proches sont des étrangers, je ne reconnais plus mes cousins. Maman et mes tantes s'affolent en cuisine. Derrière elles, ma grand-mère regarde le travail qu'elle critique plus ou moins gentiment.

J'ai envie de partir.

M'enfuir à nouveau.

Quitter cet enfer que je me suis moi-même créé, car même si c'est ma vie, car même si ce sont mes proches, je ne reconnais rien là-dedans qui me permet de me dire que je suis à ma place.

Je me lève silencieusement, jette un coup d'œil à mon père qui me regarde toujours sans rien dire, puis rejoint silencieusement ma chambre sans que personne ne le remarque. Je m'allonge sur mon lit, sur le dos.

Louis n'a pas donné signe de vie. Il n'a pas répondu à mes messages ni n'est passé à l'appartement. J'ai essayé de me soigner mais la fièvre à semblé s'aggraver, j'ai passé presque trois jours à dormir sans me nourrir.

J'ai à nouveau envie de partir.

M'en aller loin d'ici.

Quelques larmes roulent sur mes joues à chaque éclat de rire bruyant qui provient d'en bas. Elles sont silencieuses, elles, furtives et brûlantes. Elles ne font pas trembler mon corps comme Louis le fait, et tout à coup je me sens comme oublié alors que je me suis moi-même retiré de tout ça.

Je n'arrive plus à en profiter. C'est fade. J'ai juste envie de dormir pendant mille ans, rien d'autre. Je soupire en fixant le plafond, on toque à ma porte. Je tourne la tête pour voir de qui il s'agit, c'est mon père.

- Tu descends pas ? Il demande alors que sa voix paraît éteinte, fatigué. Comme si quelque chose en lui était rompu.

Je secoue la tête négativement. La main autour de la poignée se serre. La réponse ne lui plait pas.

- Je te conduis chez Niall ? Il demande doucement, légèrement déçu, peut-être. Ce constat me fait un pic au cœur, même si je ne montre rien.

- Pourquoi pas. Je dis en haussant les épaules.

Il hoche la tête et retourne dans l'entrée, un peu plus festive que ce qui se passe dans ma tête. Je mets silencieusement mes chaussures, un manteau et une écharpe, fais un bref signe de la main à maman qui me regarde partir sans rien dire, puis suis mon père dans l'allée couverte de neige. On monte dans la voiture, les portes claquent mais aucune parole n'est échangée. Je me place à ses côtés, car c'est toujours mieux qu'à l'arrière qui bouge un peu trop pour mon estomac à peine nourri malgré les fêtes.

TÊTE DE CALAMAR [LARRY STYLINSON]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant