Chapitre 1.

436 80 54
                                    

Bambam-Bambam.

Respire.

Bambam-Bambam.

Ne me touche pas !

Bambam-Bambam.

Crève, crève, crève.

Les mains sur les oreilles, Kana n'entendait que les battements de son propre cœur et le hurlement de sa psyché.

Leurs mains sur son corps, restreignant ses mouvements, agrippés à ses jambes, ses cuisses, ses poignets, une main sur sa bouche... ses crocs qui s'enfonce, ses ongles qui griffe et ses cris, ils sont si nombreux ils mettent tellement de temps à MOURIR.

Et alors même qu'ils sont condamnés, c'est elle qui meurt.

Se balançant d'avant en arrière, recroquevillée, Kana se mord la langue jusqu'au sang.

Bambam-Bambam.

Leur rire, leurs cris, l'odeur de leur sang, l'odeur de leur peau qui nécrose.

Il fait tellement noir. Elle mord son poing, elle sent son propre venin se reprendre dans ses veines à la vitesse d'un sang pompé par son cœur au bord de l'implosion. Elle ne peut pas mourir à cause de son propre venin, mais comme elle aimerait.

Pitié que ça s'arrête !

La porte s'ouvre, de la lumière, ils reviennent. Non, non, non ! Mais une seule ombre entre, se profile, s'étend jusqu'à ses pieds. Elle se recroqueville un peu plus dans le renfoncement entre les deux étagères, retiens son souffle. Peut être qu'il ne la verra pas, peut être qu'il ne lui fera pas de mal...

— Kana ?

Elle feule, montre ses crocs, crache, il l'a vu !

— Bordel, Kana !

Mais ce n'est qu'une proie, il exhale la peur, ce n'est pas un homme, tout juste un rat, se serait si facile de l'entourer, d'enfoncer ses crocs dans son corps, d'attendre qui s'agite sous le coup de son poison, meurt, pour enfin l'engloutir d'une bouchée...

La vipère se raidit, prête à se projeter sur lui, ce sera si rapide ! Si délicieux, si...

Un seau d'eau glacée se déversa sur sa tête, envahissant sa bouche, son nez et entrant dans ses yeux. Merde ! Kana prit une inspiration, s'étouffant à moitié avec de l'eau et se mit à tousser.

— Putain, Ilgog, râla Kana en se sentant redevenir elle-même.

Sa vipère, chassée par l'eau et les glaçons, était retournée se recroqueviller au fond de son esprit et quand Kana passa la langue sur ses dents, elle était redevenue inutilement humaine et elle n'avait plus que le goût de son propre sang sur les lèvres.

— Je peux savoir à quoi tu joues à te planquer dans la réserve en feulant ? Tu m'as fait flipper !

Son patron claqua de la langue, réprobateur en s'accroupissant devant elle. Elle imaginait l'image qu'elle devait renvoyée, trempée et coincée entre deux caisses d'alcool. Sa panique avait été chassée par l'eau, mais ça ne signifiait pas qu'elle était à l'aise, coincé ainsi avec un homme. Mais au lieu de s'effondrer de nouveau, elle attaqua.

— C'est ma pause, je fais ce que je veux, répliqua-t-elle.

Elle soutint son regard avec plus de bravoure qu'elle en ressentait en réalité. Ilgog le soutint, même dans la semi-pénombre de la réserve, elle visualisait sans peine son visage. Ça faisait plusieurs mois qu'elle travaillait pour lui, à rembourser la dette que sa meute avait contractée auprès de lui.

Athos, sa meute avait vécu l'enfer dans une prison illégale pour changelin : le Zoo. Sortis depuis peu, ils avaient reçu de l'aide – mais pas gratuitement, jamais – de la part d'Ilgog. Oh, Ilgog pouvait bien être un rat, une proie, il n'en restait pas moins l'homme le plus vicieux qu'elle ait jamais rencontré. Elle supposait qu'on ne devenait pas le patron de bar le plus influent de la ville la plus pourrie de Miterra, Jaykam, sans être soit même un peu pourrie. Ilgog n'était pourtant pas très différent des autres hommes, au premier abord, un visage avenant, mais des yeux glaciaux et qui voyait tout. Kana détestait ces putains d'yeux dorées qui la détaillaient. Si encore c'était pour la mater, comme elle avait cru au début, mais non, cet enfoiré la jaugeait. Il déterminait comment elle allait d'un seul regard et...

— C'était qui ?

Et il devinait. Kana renifla et détourna la tête, consciente d'avoir l'air d'une gamine qui boudait.

— Ce n'était rien, va-t'en ma pause n'est pas finie, si je suis venu ici c'était pour être tranquille, tu m'importunes.

— Tu peux me le dire, ou alors me laisser le découvrir, j'ai mes contacte, mais ce sera retenu sur ta paye.

Kana retourna la tête vers lui, choquée.

— Espèce d'enfoiré ! glapit-elle.

Il haussa les épaules, absolument pas dérangé par l'appellation. Parce qu'il était un enfoiré et qu'il le vivait bien. Kana serra les dents, de nouveau tenté de les planter dans son épaule musclée, à cette enfoirée de proie qui pensait pouvoir la dominer elle. Bordel. Il plissa les yeux, comme s'il avait ressenti ses pensées.

— Très bien.

Il se releva et s'éloigna, mais au moment de franchir le seuil de la porte, il ajouta :

— Ta pause est finie depuis trente minutes, ça aussi se sera retenu sur ta paye.

Kana poussa un cri de frustration alors qu'il refermait la porte et elle fut presque sûre de l'avoir entendu ricaner. Putain d'enfoiré.

Mais elle n'arrivait pas à se résoudre à admettre sa faiblesse. Putain c'était juste... tellement rien par rapport à ce qu'elle avait vécu, mais ça lui avait comme parut insurmontable. Deux ans d'enfermement et de violence, et elle allait se noyer une fois libre ? Putain d'ironie, ça lui donnait envie de pleurer. Mais elle ne pouvait pas. Elle perdait pied, elle se noyait dans ses cauchemars depuis des mois, si elle se mettait à pleurer elle ne se relèverait pas. Et elle devait se relever. Ce n'était pas terminé, sa meute était fragile, le campement où ils s'étaient installés était fragile, sujet aux aléas du temps, il fallait construire et vite. Il fallait manger, il fallait survivre. Il fallait rembourser Ilgog où il vendrait les informations qu'il avait sur eux au plus offrant et tout recommencerait.

Kana n'était pas naïve au point de penser qu'Ilgog ferait une exception pour elle et sa meute. Le rat était une puissance de l'ombre à Jaykam, il ne s'amusait pas à aider les autres si ça ne lui rapportait rien. Quand ils avaient réussi à s'enfuir, Ilgog et sa nichée de souris leur avaient apporté nourriture, eau et outils indispensables, en profitant au passage pour réclamer une dette astronomique que Kana mettrait des mois à rembourser en travaillant tous les soirs dans son bar sordide. Avoir sous sa coupe la nouvelle meute composer de tueur bien dressé qui venait de s'installer dans le coin, c'était un coup très malin de sa part.

Putain d'enfoiré.

********************************************

Ouais ce tome commence très fort X) j'espère que vous avez hâte de vous plonger dans la relation Kana-Ilgog parce qu'elle promet X)

Alors ce premier chapitre ? Je suis curieuse d'avoir votre avis !

Kiss


Proie et Prédateur - La Vipère et le RatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant