Chapitre 5.

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La douche lui avait fait du bien. Kana se sentait... un peu moins sale. Elle doutait de pouvoir un jour se sentir propre, mais au moins elle n'avait plus l'impression que la sueur et la crasse du poivrot lui collaient à la peau. Sans doute parce qu'elle avait frotté jusqu'à avoir l'épiderme en feu.

Elle récupéra les vêtements qu'Ilgog lui avait fournis après s'être séché. Le t-shirt était immense et Kana ne s'était jamais considéré comme une femme petite, le caleçon allait à peu près, quoi que la braguette était bizarre à porter. Elle enfila le jogging, mais il était définitivement trop grand et elle détestait l'idée de trébucher en courant avec, si elle devait fuir, alors elle renonça.

— Pfff, quelle soirée, se murmura-t-elle à elle-même en croisant son regard dans le miroir.

Il fallait qu'elle sorte de la salle de bain, mais elle redoutait ce qui allait se passer après. Est-ce qu'elle allait devoir partir ? Elle n'avait aucune envie de rentrer au campement elle avait... besoin de temps. Putain, Ilgog l'avait touché, elle sentait encore la chaleur de la main dans la sienne, immense, rassurante. Et Neo les avait vus. Il allait forcément le rapporter à Tarik, deux mois qu'elle se battait bec et ongle pour soigneusement éviter le moindre contact avec lui, parti en fumée à cause de son incapacité à gérer le choc.

On aurait pu croire qu'après deux ans de viol régulier et de maltraitance, elle aurait appris à passer outre, mais apparemment non. Elle s'en voulait, elle se détestait tellement de n'avoir juste... pas réussi à réagir. Elle s'était retrouvée sidérée à l'idée que tout pouvait recommencer, que la sécurité qu'elle pensait avoir acquise n'était qu'une illusion. Que se serait-il passé si Ilgog n'avait pas débarqué ? Si ce foutu rat n'était pas plus têtu qu'elle ? Elle savait, évidemment. Elle se souvenait. La douleur, la honte, l'humiliation, l'impression de se faire poignarder a chaque coup de rein et de disparaître un peu plus à chaque fois. Elle essayait d'oublier, mais c'était tellement dur, chaque contact, chaque regard lui rappelait son enfer.

— Kana, tout va bien ?

Kana ferma les yeux en soupirant pour réprimer ses larmes.

— Ouais, donne-moi une seconde, je... je me brosse les cheveux, mentit-elle.

Elle chercha brièvement une brosse à cheveux des yeux avant de se souvenir qu'Ilgog n'en avait pas l'utilité ; il se rasait la tête. Elle se demandait pourquoi. Secouant la tête pour chasser sa curiosité, elle passa les doigts dans ses cheveux humides et prit plusieurs grandes inspirations pour se donner du courage.

Elle sortit de la salle de bain en se sentant étrangement idiote dans ce grand t-shirt qui lui arrivait juste sous les fesses. Ilgog était dans la cuisine et il flottait dans l'air une odeur de nourriture qui lui mit l'eau à la bouche. Elle s'avança prudemment, pas certaine d'être la bienvenue. Elle détestait tellement travailler comme serveuse qu'il lui arrivait d'avoir l'estomac trop noué pour manger, ce qui était arrivé ce soir, elle en vint à espérer qu'Ilgog avait préparé quelque chose pour elle sans oser demander.

Il était derrière les fourneaux, et c'était une image étrange. Elle avait tellement l'habitude de le voir derrière un bar à servir des cocktails ou à faire sa loi dans son restaurant que le voir en t-shirt dans une cuisine bien agencée, à faire glisser d'une poêle à une assiette quelque chose qui sentait bon était étrangement amusant. Il lui jeta un coup d'œil, son regard glissa une seconde sur ses jambes nues avant qu'il ne se reconcentre sur ce qu'il faisait.

— J'ai préparé des croques au fromage, dit-il.

Kana cilla.

— Des croques au fromage ? répéta-t-elle amusée par ce plat très enfantin.

Proie et Prédateur - La Vipère et le RatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant