Chapitre 12 - Ezra

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  Allongé dans l'une des couchettes du bus, qui nous mène vers notre première destination, je contemple le plafond, luttant pour ne pas laisser mes souvenirs me submerger une nouvelle fois. Les aveux de Obeline sont ancrés dans mon esprit et ne cessent de remuer dans ma tête, me forçant à me rappeler que les miens ne m'ont jamais quitté, toujours là, en arrière-plan, menaçant de refaire surface à chaque instant.

⸺ Ezra, tu es avec nous ? m'interpelle Claus, me sortant de mes pensées.

Je tourne la tête vers le groupe assis dans l'espace repas.

⸺ Oui, désolé. Juste un peu perdu dans mes pensées.

Claus continue de parler à Obeline, lui expliquant les subtilités de la vie en tournée. Mais je ne peux m'empêcher de revenir à mes pensées. Les fantômes de mon passé rôdent, je lutte pour maintenir la façade.

Obeline capte mon regard et me sourit timidement. Il y a une force en elle, une résilience que je reconnais. Peut-être que c'est ce qui me trouble autant. Peut-être que c'est pour ça que je ressens cette vieille émotion en sa présence. Je me force à détourner le regard lorsque je sens le matelas s'enfoncer. Mon cœur tambourine dangereusement.

⸺ Tu sembles ailleurs, remarque-t-elle doucement, son corps allongé près du mien.

Je tente de dissimuler mes préoccupations, mon envie de me coller davantage contre la vitre afin de mettre une plus grande distance entre nos deux corps trop proches. Mes yeux sont rivés sur la plaque de la couchette au-dessus de nous.

⸺ Juste des souvenirs, dis-je en essayant de cacher la douleur dans ma voix. Parfois, ils ont une manière de ressurgir sans prévenir.

Je la sens hocher la tête à mes côtés. Puis, alors que je pense qu'elle va rejoindre les garçons, elle se met sur le dos, son portable au-dessus des yeux. Je jette rapidement un œil dessus, la voyant pianoter rapidement sur le clavier. Son message envoyé, elle glisse de nouveau son portable dans la poche de son jean.

⸺ Je sais que ma présence te dérange, Ezra. Mais rappelle-toi que je ne suis que de passage.

Elle se redresse après ses mots, je l'observe traverser le couloir du bus menant à la grande chambre que nous lui avons laissée afin qu'elle ait son intimité.

Je me pince les lèvres. Ce n'est pas en soi sa présence qui me dérange, mais ce truc entre nous qui m'oblige à fuir.

Le bus plonge dans le silence lorsque nous entendons les notes de guitare mélancolique prenant possession de l'espace. Je ferme les yeux puis me laisse emporter par sa musique jusqu'à ce que sa voix prenne part, des vibrations faisant réagir tout mon être.

Sa voix est un mélange de douceur et de tristesse, chaque note résonnant en moi, ravivant des émotions que j'essaie de garder enfouies. C'est comme si elle savait exactement quoi jouer pour toucher les parties les plus sensibles de mon âme.

Les souvenirs de cette nuit reviennent en force. Les images de l'accident, les cris, la douleur insupportable de la perte. Je serre les poings, luttant contre l'envie de me laisser submerger par le chagrin, par la culpabilité.

⸺ Tu vas bien ? Demande Claus, une note d'inquiétude dans la voix.

J'ouvre les yeux et le regarde perdu dans mes pensées.

⸺ Ouais, c'est juste... elle me rappelle elle. Lui avoué-je en silence.

Claus hoche doucement la tête, posant une main réconfortante sur mon épaule. Nous partageons un moment de compréhension silencieuse.

La musique d'Obeline continue de remplir l'espace, chaque note semblant porter un morceau de son âme. Je ferme à nouveau les yeux, me laissant emporter par les mélodies, ressentant à la fois la douleur et le réconfort qu'elles apportent.

For them, For usOù les histoires vivent. Découvrez maintenant