Chapitre 5

144 12 0
                                    


Jordan

J'entends les conversations autour de moi, mais je n'arrive pas à me concentrer sur ce qu'ils me racontent. Je souris poliment de temps à autre, sirote mon verre distraitement. Quelque chose cloche. Pour une fois que j'étais sincère et que je ne me montrais pas sarcastique avec lui, Monsieur Attal a réagi d'une bien étrange manière. Il me regardait d'abord avec stupéfaction, ses yeux chocolat relevés vers moi, puis il a rougit, semblait gêné et mal à l'aise. Je ne crois pas avoir dit quelque chose de malveillant ou d'incommodant.

Je m'isole un peu pour recentrer mes pensées sur l'instant présent, mais ses expressions contradictoires reviennent par vagues dans mon esprit. Je passe ma main sur ma mâchoire et me surprend à le chercher dans la foule. J'aimerai éclaircir ce qui semble être un malentendu, mais mon opposant n'est nulle part. Je consulte ma montre et me dirige vers les toilettes. Je le croise au détour d'un couloir. Il regarde droit devant lui, m'évite. J'attrape son bras au passage pour le retenir.

"Monsieur Attal, vous vous sentez bien ?

-Je vais bien.

-Aurais-je dis ou fais quelque chose qui vous aurait contrarié ?

-Je vous ai dit que j'allais bien, Monsieur Bardella, répond-il en évitant toujours mon regard.

-Je ne vous crois pas. Il y a très clairement quelque chose qui ne va pas. Mais soit, je ne vais pas vous forcer à parler."

Je relâche ma prise sur son bras, cherchant toujours à rencontrer ses yeux.

"Gabriel vous..."

Il me regarde enfin, mais ses yeux reflètent quelque chose de fragile, de sensible. Cette facette de lui disparaît aussi rapidement qu'elle est arrivée. Comme s'il s'était ressaisi.

"Veuillez excuser mon impolitesse. Je vais rentrer je pense.

-D'accord. Bonne fin de journée.

-A vous aussi, Monsieur Bardella."

Je le regarde prendre la direction du parking, Je crois que c'est la première fois que nous avons une discussion aussi calme. J'espère que nous pourrons nous entendre. J'en ai étrangement envie. Je veux certes continuer à le taquiner, mais je voudrais qu'il apprécie lui aussi ces moments. J'aimerai connaître Gabriel et non Monsieur Attal, l'homme derrière le politicien.

Je ne le lâche pas des yeux jusqu'à ce qu'il quitte mon champ de vision. Je soupire. Je crois savoir pourquoi je ne peux m'empêcher de l'approcher, mais c'est un chemin dangereux que je suis en train d'emprunter.

Je retourne auprès de mes confrères et consœurs, même si mon esprit s'échappe régulièrement ailleurs

Après le débatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant