Chapitre 13

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Jordan

Gabriel caresse distraitement mes cheveux depuis une dizaine de minutes tandis que ma tête repose sur son torse. Les battements de son cœur m’apaisent, je pourrais m’endormir sans problème dans cette position.
“Je veux plus.”
Je redresse la tête pour le regarder.
“Deux fois c’est déjà pas mal dans la même soirée tu ne penses pas ?
-Je ne te parle pas de ça, dit-il en me frappant avec un coussin. Non je te parle de… nous.”
Je dois avoir mal entendu.
“Tu es sérieux ?
-Oui. Sauf si bien sûr…
-Je suis d’accord !”
Gabriel rit de ma réponse précipitée et se redresse.
“Vivre une relation cachée, secrète, ne t’effraie pas ? Et si un jour tu te lasses ?
-Cela me convient. Et si ça devient compliqué, on en parlera et on avisera. La communication, Gabriel. C’est important.
-Je sais, je sais. C’est juste que j’ai peur.”
Je prends le visage de Gabriel entre mes mains pour qu’il me regarde dans les yeux.
“Je suis très heureux que tu veuilles plus, parce que je veux plus moi aussi. J’ai peur. Je suis terrifié parce que tu as bouleversé ma vie et mes certitudes, mais c'est une très bonne chose. Tu es important pour moi.”
Gabriel sourit en baissant les yeux. Je l’embrasse rapidement pour le ramener à moi. Il prend la parole en accrochant mon regard.
“Toi aussi tu es important pour moi, Jordan.”
Je sens mes joues rougir, submergé par toutes les émotions que ses mots font naître en moi. Maintenant j’ai encore plus peur que notre travail ne finisse pas nous séparer. Alors je choisis de vivre l’instant présent, de savourer son contact, son odeur sur mes draps, son sourire et ses yeux pétillants, sa voix qui me fait miroiter un avenir à deux. Désormais, je le choisis lui. Je ne sacrifie pas ma carrière politique, je fais seulement en sorte qu’elle ne passe pas avant Gabriel.

Les jours suivants, nous faisons tout notre possible pour être ensemble. Nous nous voyons chez moi, rarement à Matignon par souci de discrétion, et parfois en extérieur pour changer d’air. Nous discutons, nous rions, nous nous amusons. Je passe de merveilleux moments avec lui. J’ai navigué entre campagne législative et rendez-vous avec Gabriel ces deux dernières semaines. Les élections sont ce weekend, mais je ne ressens aucune tension entre nous à ce sujet. J’aimerai qu’il gagne pour le voir heureux, mais j’aimerai gagner pour réussir dans mon travail. Finalement, quel que soit le résultat, je serai satisfait.
Nos derniers débats ont été ponctués de sourires en coin et de regards pleins de promesses que nous seuls pouvions comprendre. L’aspect secret de notre relation apporte une touche de piment à nos débuts. Nous ne pourrons peut-être jamais officialiser, mais cela nous permet de préserver notre intimité. Être une personnalité publique n’est pas une mince affaire, nous faisons donc de notre mieux pour conserver à l’abri des regards ce qui ne concerne que nous.

Je suis en pleine réunion avec mon parti lorsque je reçois une notification de message sur mon téléphone. Gabriel m’a écrit. J’ouvre discrètement son sms, souriant bêtement en lisant ses mots.
“Hâte de te voir. Je ramène à boire.”
Il a hâte. J’aime lorsqu’il me communique ses émotions, ses ressentis. Et j’aime lui communiquer les miens.
“J’ai hâte moi aussi.”
Je verrouille rapidement mon téléphone pour me recentrer sur la réunion. Personne n’a remarqué ma minute d’inattention : nous avons tous énormément de choses à faire et recevons régulièrement des appels et sms qui concernent ou non le travail.
Son message me redonne l’énergie nécessaire pour me concentrer sur la discussion en cours : plus vite nous réglons ces affaires, plus vite je pourrais retrouver Gabriel.

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