Échange et décisions

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Suite à leur court échange, Enola et Andrea retournent au poste de police pour retrouver Sébastien et Tewkesbury. Les deux hommes les attendent dans la même pièce qu'auparavant. Tous deux laissent échapper un soupir de ce qui semble être du soulagement en les voyant revenir. Ils comprennent aussitôt que tout s'est bien passé et que les deux filles vont désormais travailler ensemble pour résoudre l'affaire. 

— Je suppose que vous n'avez donc plus besoin de mon aide, annonce Tewkesbury en se dirigeant vers la sortie.

— Attendez ! s'exclame Enola avant de le suivre. 

Sans plus attendre, elle marche derrière lui, laissant Andrea et Sébastien seuls dans la pièce.

— J'en conclus que vous avez finalement accepté, confie ce dernier lorsque la porte est claquée. 

— Vous avez raison, je n'arriverai pas à résoudre cette affaire sans son aide, quoique je fasse. Le tueur agit trop vite, et j'en ai même peur, chuchote la jeune femme avec une pointe d'angoisse.

— Se serait-il passé quelque chose de nouveau ?

Andrea hésite à lui parler de l'intrusion chez elle. D'un côté, elle n'a aucune raison de s'inquiéter s'il s'agissait de Moriarty, mais elle ne peut pas risquer d'éveiller quelconque soupçon. 

— Non, tout va bien. Je suis simplement un peu dépassée par tout ce qu'il se passe. La journée a été très longue. 

— Je m'en doute, mademoiselle DelRose, il est vrai que cette journée a été haute en couleurs. Mais je sais que vous saurez vous en sortir. 

— Et si je ne m'en sors pas ? Si je n'arrive pas à résoudre cette affaire à temps et que d'autres innocentes en perdent la vie ? Ou même moi ? 

Il la regarde avec attention, son expression traduisant inquiétude mais également un surprenant mélange de confiance et compassion. 

— Vous réussirez, mademoiselle DelRose. Je sais très bien que pour rien au monde vous ne laisseriez qui que ce soit vous dépasser, et encore moins dans cette enquête. 

C'est comme s'il savait exactement pourquoi elle s'inquiète autant. Il se doute qu'elle est accablée par le poids de la pression. Celle de ne pas réussir évidemment, de voir d'autres innocents en mourir, mais également la pression de donner raison aux Holmes. Plus que tout au monde, elle veut prouver qu'elle en est capable et qu'elle les écrasera une bonne fois pour toute. Andrea et Sébastien viennent à peine de se rencontrer, mais d'une certaine manière il semble déjà la comprendre, la connaître. Elle ne peut s'empêcher de lui sourire en retour, reconnaissante envers lui. 

— Vous savez, cette affaire pourrait tout changer pour moi, avoue-t-elle doucement. 

— Je le sais. D'un côté, vous pourriez gagner très gros, tout comme vous pourriez perdre encore plus. 

Elle acquiesce mais ne répond pas, laissant le silence s'installer entre les deux. Aucun n'ose le briser, trop confortables dans ce calme ambiant. Elle sait qu'il a raison, et c'est exactement pourquoi elle a si peur. Tout pourrait changer, en bien ou en mal. C'est pourquoi la jeune femme sait qu'elle doit être prudente et jouer chacun de ses coups à la perfection. 

— Vous vous rendrez vite compte que cela est la meilleure décision, mademoiselle. Vous mettrez peut-être du temps à vous y faire, mais à la fin vous serez heureuse de constater toutes les vies que vous avez sauvé, dit-il après un moment. 

— Je le sais, c'est pourquoi j'ai accepté, n'est-ce pas ? 

— Oh, je n'en sais trop rien. Je ne peux m'empêcher de penser que sauver des vies n'est pas l'unique raison de votre changement d'esprit. 

Encore une fois, c'est comme s'il pouvait lire ses pensées. Pendant un très court instant, elle se demande même s'il ne sait pas quelque chose à propos d'elle. Saurait-il pour Moriarty ? Impossible. Mais une part de doute reste coincée au fin fond de son esprit et elle n'arrive pas à s'en défaire. Elle n'ose même pas lui répondre de peur d'en dévoiler trop sur ses intentions. Il a parfaitement raison, et c'est ce qui la frustre le plus malgré tout. Elle aimerait protester, lui dire qu'il se trompe sur toute la ligne, mais elle ne peut pas. 

— Et vous ? Quelles sont vos motivations ? demande-t-elle dans l'espoir de détourner légèrement le sujet. 

— Je veille simplement à faire mon travail comme il se doit. Et contre toute attente, je dois vous avouer que je ressens ce besoin de vous aider. Peut-être est-ce parce que je vois une partie de moi en vous, mais sachez que je veille surtout à ce que l'ordre soit établi. Vous êtes différente, mademoiselle DelRose. D'une manière que je ne peux expliquer, vous l'êtes. Et c'est même peut-être exactement ce dont Londres a besoin maintenant. Je suis persuadé au fond de moi que vous êtes capables de mettre fin à tout cela. Voilà ma motivation. 

La jeune femme reste sans voix pendant un instant, se plongeant à nouveau dans le silence si apaisant qui les encerclait il y a de cela quelques minutes. Il est une des rares personnes à croire en elle, et cela la touche. Elle ne le montre pas, mais elle lui en est reconnaissante. Sous sa façade imperturbable, Sébastien lui a apporté exactement ce dont elle avait besoin. Elle se répète une nouvelle fois ses mots, ne pouvant ignorer pendant un court instant le regret de ce qu'elle s'apprête à faire. Mais elle sait parfaitement qu'elle ne changera pas d'avis et que le discours de Sébastien ne la poussera qu'à redoubler d'efforts pour obtenir ce qu'elle veut. 

— Vous m'excuserez, il me reste encore quelque chose à faire. Prévenez mademoiselle Holmes de mon départ, je vous retrouverai à son bureau demain à la première heure, annonce Andrea après un certain temps. 

Elle se dirige une nouvelle fois vers la porte mais Sébastien la stoppe dans son élan en lui disant une dernière chose. 

— Faites attention, mademoiselle DelRose, ne laissez pas votre soif de pouvoir vous dépasser. Parfois le meilleur moyen d'atteindre ce que l'on veut est de rester soi-même au lieu de prétendre être quelqu'un que nous ne sommes pas.



Enola Holmes 3 : Leurs cœurs enragés | Sherlock Holmes x AndreaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant