Quatre

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Assis dans sa loge, Gabriel se frotta les yeux. Le débat avec Jordan Bardella allait commencer dans une vingtaine de minutes. Comme il était déjà prêt, il alla s'assoir sur un des tabourets à côté du plateau.

Il avait plus le trac que d'habitude avant un passage en direct. Même si Jordan avait été compréhensif la dernière fois qu'ils s'étaient vu, il avait très peur que son quart d'heure de bonté soit passé et qu'il lâche des informations sur leur réunion à tout le monde.

« Bonjour Monsieur Attal, vous allez bien ? »

Gabriel sursauta, c'était le président du RN qui se tenait devant lui, un grand sourire sur son visage, l'invitant à lui serrer la main.

« Au top ! Et vous ? » répondit-il en lui empoignant sa main.

« Ça va. » il jeta un coup d'œil furtif autour de lui, tous les membres du service technique semblaient trop occupé pour les écouter. « Enfin comme ça peut... »

Il avait dit ces derniers mots si silencieusement que Gabriel faillit lui demander de répéter. Au lieu de ça, il baissa la tête et soupira.

« Vous avez été viré ? » chuchota t-il avec autant de tendresse qu'il pouvait.

Jordan hocha lentement la tête, le regard ailleurs, il était visiblement dans la lune. Gabriel aurait voulu le réconforter un peu mais l'équipe technique vint leur attacher leur micro car le direct allait bientôt débuter.

Les deux hommes s'avancèrent et rejoignirent leur place respective afin de commencer le débat.

De retour à son domicile, Gabriel se posa sur une de ses chaises de cuisine après s'être servit un grand verre d'eau.

Il avait connu des débats bien plus mouvementés que celui auquel il venait de participer. Jordan Bardella ne semblait pas dans son assiette alors, connaissant la raison, Gabriel n'avait pas essayé de l'enfoncer davantage.

Il lui avait même lancé de petits sourires en coin pour qu'il sache qu'il compatissait.

Ce n'était pas compliqué de remarquer à quel point l'ancien président du RN se sentait mal, par exemple, Gabriel l'avait surpris à trembler à plusieurs reprises, il aurait voulu faire quelque chose pour l'aider, mais il n'y avait rien de plus à faire.

Sa curiosité lui criait de lui demander plus d'informations. Alors, il retrouva un vieux mail dans lequel le numéro de Jordan Bardella figurerait et ajouta le contact à sa liste.

Gabriel
Bonsoir Monsieur Bardella,
J'espère que vous n'êtes pas trop affecté par cette nouvelle. Si jamais, je reste disponible si vous voulez en discuter.
Bonne soirée.
Gabriel Attal

Il se sentit un peu ridicule en relisant le message, comme si son ennemi politique allait se confier à lui sur ce qu'il se passait à l'intérieur de son parti. En plus, il savait très bien qu'il avait été affecté.

Néanmoins, d'après ce qu'il avait pu voir de Jordan Bardella, ça ne l'aurait pas étonné qu'il dise le contraire.

Mais peut importe, maintenant le message était envoyé. Il bu une gorgée d'eau et faillit s'étouffer en recevant la notification de Jordan aussi rapidement.

Jordan
Bonsoir Monsieur Attal,
votre message me fait très plaisir !
En effet, je me sens un peu rejeté par mon parti... Aucun collègue n'avait prit le temps de m'avertir de ce changement soudain et les raisons qui m'ont été expliquées sont très bancales...
Mais je ne veux pas vous embêter avec ça, ce n'est même pas encore officiel et vous avez bien plus important à gérer en ce moment !
Bonne soirée

Décidément, Jordan Bardella n'arrêtait pas de le surprendre ! Il venait littéralement d'avouer quelques chose de privé et une sorte de « trahison » au sein de son parti, à un membre d'un parti opposé !

Le fait de savoir qu'il se sentait aussi seul que Gabriel mit se dernier dans un état de compassion silencieuse et de profonde tristesse.

Alors, ils continuèrent leur conversation !

Jordan lui décrivit parfaitement la scène où il a appris son changement de poste, et Gabriel était, lui aussi, dans une rage folle contre Marine LePen et les autres membres du parti.

Il fut encore plus énervé quand Jordan lui raconta à quel point il était proche de cette dernière, il avait même utilisé le mot « mère » pour l'exprimer.

Leur conversation dura jusqu'à tard, à deux heures du matin, les deux discutaient toujours. Leur dialogue avait légèrement vrillé.

À présent, il parlait de comédie française après avoir échangé sur la F1 et sur les meilleurs lieux pour partir en vacances.

Gabriel était un peu responsable de cet éloignement du thème principal, il voulait changer les idées à l'ancien président du RN et ça avait plutôt bien marché !

Il avait aussi réussi à esquiver le sujet alors quand ils se rapprochaient de sa rupture avec Stéphane Séjourné.

Même si il se sentait à présent à l'aise d'échanger avec Jordan, il ne voulait pas non plus parler d'homosexualité, ou de tout ce qui pouvait s'en rapprocher. En devenant amis avec ce dernier, il espérait qu'il devienne un peu plus ouvert.

Mais leur conversation fini par prendre fin, étant donné que Jordan s'était endormi devant son téléphone !

Alors Gabriel posa le sien et alla se coucher lui aussi. Demain, il avait une grande réunion à l'Elysée tôt le matin, il devait donc être en forme.

« Bah alors, le débat avec Jordan Bardella hier ?? »

Stéphane et Gabriel attendaient tous les deux, ainsi que d'autres ministres, dans la grande salle de réunion de l'Elysée. L'annonce qui leur allait être faite promettait d'être très importante.

« Quoi le débat avec Jordan Bardella ? » répéta Gabriel à son ex-compagnon.

« Comment tu as fais pour qu'il soit aussi calme et poli ? D'habitude, il agresse tout le monde pendant les débats ! » répondit Stéphane.

« Je ne sais pas, je n'y suis pour rien ! » se défendit le premier ministre sur la défensive.

« Et bien, tu aurais pu en profiter ! » s'exclama t-il. « Tu aurais pu te montrer plus imposant ! Là, tu ne lui a même pas coupé la parole une seule fois ! »

Gabriel haussa les épaules en signe de réponse. Il ne savait pas quoi dire de plus.

La porte s'ouvra, laissant entrer le président de la République. Tous les ministres allèrent s'assoir à leur place attitrée après l'avoir salué. Gabriel croisa les bras, il ne savait pas à quoi s'attendre.

Il fut profondément étonné lorsqu'Emmanuel Macron leur expliqua qu'il avait dissous l'Assemblée Nationale.

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Quand la politique s'efface... (bardella x attal)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant